Le 14 mars 2024, le groupe pharmaceutique Pierre Fabre dévoilait sa participation au capital de l’entreprise Atosca, en charge de l’édification de l’autoroute A69. Le laboratoire y participe en fait avec la CCI du Tarn et plus d’une dizaine d’entreprises locales. Mais le sujet semble tabou dans le département.
Elles sont treize. Treize entreprises du sud du Tarn à avoir souhaité s’impliquer dans le projet de l’Autoroute A69, actuellement en construction entre Castres et Toulouse.
La carte de la discrétion
La société Atosca, en charge du chantier a récemment vu entrer dans son capital le groupement "Tarn sud développement" à hauteur de 5,3% (soit 8,6 millions d’euros). Derrière ce nom, plusieurs entités : les laboratoires Pierre Fabre, la Chambre de Commerce et d’Industrie du Tarn, et treize entreprises locales, comme Thouy, Waroude, ou Frayssinet, selon nos confrères de la Dépêche du Midi. Contactées, la plupart n’ont pas donné suite à notre demande. Certaines nous ont même clairement précisé qu’elles ne souhaitaient pas communiquer sur le sujet.
Contactées, la plupart n’ont pas donné suite à notre demande. Certaines nous ont même clairement précisé qu’elles ne souhaitaient pas communiquer sur le sujet. Rester discret, c’est visiblement la stratégie adoptée dans un contexte de fortes tensions autour du projet autoroutier.
Objectif : se préserver
Le groupe Pierre Fabre, qui ne s’est jamais caché de son soutien à l’autoroute, a été régulièrement la cible des opposants à l’A69, que ce soit frontalement lors de manifestations, ou par des appels au boycott.
"Je comprends la discrétion des autres investisseurs", explique Ludovic Gatti, responsable de LG Holding. "Au vu des exactions de certains, les entreprises concernées veulent se préserver. Moi personnellement je ne m'en suis jamais caché. Et si j'ai investi au départ, c'est avec des engagements clairs"
Priorité à l'emploi
Le responsable de cette société d'investissement veut redynamiser les entreprises du sud du Tarn avec une participation symbolique : "Je voulais d'abord jouer un rôle de sentinelle pour m'assurer qu'Atosca allait respecter son cahier des charges en matière d'environnement.", explique Ludovic Gatti. "Mais mon objectif principal c'était l'emploi. Et sur ce dossier Atosca a joué le jeu. On parle de 1000 emplois créés, dont 500 indirects".
Une participation symbolique, c’est aussi sur ce point qu’appuie la société Atosca : "L’ensemble des fonds propres de ce projet, c'est 150 millions d’euros, l’ensemble des coûts de l’opération, c'est 450 millions. Donc 8,6, c’est moins de 2%", souligne Martial Gerlinger, le directeur du groupe.
Des répercussions politiques
Le député Renaissance de la 3ᵉ circonscription du Tarn, Jean Terlier, soutien inconditionnel du projet, est aussi le président de la commission d’enquête parlementaire sur le financement de l’A69 à l’Assemblée Nationale.
Ces révélations sur les liens qui unissent désormais le groupe Pierre Fabre et Atosca viennent mettre à mal son statut. Son épouse étant l’une des directrices du laboratoire pharmaceutique, les opposants à l’autoroute dénoncent un conflit d’intérêts.
D’un point de vue juridique, aucun conflit d’intérêts n’est pour l’instant reproché au député. Avant les révélations du groupe Pierre-Fabre, il se confiait dans nos colonnes : "J'ai saisi le déontologue. Il a rendu un avis circonstancié de quatre pages qui établit très clairement que le seul fait que mon épouse travaille pour les laboratoires n'est pas de nature à constituer un quelconque conflit d'intérêts ni à remettre en cause la possibilité pour moi de me présenter à la présidence de la commission d’enquête."
Pas question pour lui de quitter son rôle de président de la commission.