Le Tarn prend sa source au Mont-Lozère puis traverse tout le sud du département d’Est en Ouest. Une première étape cévenole pour le plus important affluent de la Garonne qui parcourt 380 kilomètres en Occitanie. Découverte.
Situé dans le sud du Massif central, le Mont-Lozère (1.700 mètres d’altitude) est le point culminant du département auquel il a donné son nom.
A la recherche des sources du Tarn
C’est sur le versant sud de ce sommet, au milieu des tourbières, que le Tarn émerge de la terre. “On ne dit pas la source mais les sources du Tarn”, explique André Saint-Léger, guide sur le Mont-Lozère. “Il existe plusieurs émergences, plusieurs petites zones humides qui vont donner naissance à un premier filet qui devient très rapidement torrent et rivière”.
En fonction de la saison, les sources sont visibles à différents endroits. “Ici, on est encore à peu près sûr de la voir pendant quelques semaines”, estime André Saint-Léger. “Mais dans un mois, un mois et demi, il faudra aller 200-300 mètres plus loin pour la retrouver. Il y aura toujours de l’eau ici mais plus en profondeur donc on ne la verra pas au sol.”
Les sources du Tarn sont situées dans la zone cœur du Parc National des Cévennes. Yannick Manche est le chargé de mission eau du Parc. Il étudie l’activité de la rivière et travaille au quotidien à sa préservation. “Le Tarn à sa source, c’est une succession de petites zones humides qui amènent de plus en plus d’eau et finalement fait un écoulement permanent et qui au final donne une rivière”, précise-t-il.
L’eau des sources sort ici à une température qui oscille entre 8 et 11 degrés. Malgré de violents écarts au fil des saisons, c’est la température moyenne annuelle du secteur.
Le Mont-Lozère et la ligne de partage des eaux entre Méditerranée et Atlantique
Sur la crête du Mont-Lozère, dans cet environnement préservé, on retrouve une ligne connue de tous les géographes : la ligne de partage des eaux. Cette dernière se situe à quelques dizaines de mètres des sources du Tarn. Sur cette ligne de crête, toute la pluie tombant d’un côté du bassin versant terminera sa course dans la Méditerranée. Mais si elle tombe de l’autre côté, alors cette eau finira dans l’Océan Atlantique. "Elle mettra quelques jours pour aller dans la Méditerranée via le Rhône” estime Yannick Manche. “Mais pour l’autre bassin versant, il faudra compter plusieurs semaines avant d’arriver à l’Atlantique.”
La truite sauvage, une truite endémique du Mont-Lozère
Sur cet immense plateau granitique, le Tarn disparaît régulièrement sous la neige pendant les longs mois d’hiver. Des conditions extrêmes dans lesquelles survit pourtant une truite endémique : la truite sauvage du Mont-Lozère. Rémi Verdier est guide de pêche sur le Mont-Lozère, passionnée par cette petite truite fario. Nous le retrouvons dans l’un de ses coins de pêche favori, alors que sa ligne se tend. “Elle est vive ! L’eau est fraîche à bonne température, ça lui plait bien !”
Dans ces mains, un petit poisson de quelques centimètres seulement, au ventre doré et aux écailles tachetées de rouge et de noir. “C’est la truite sauvage du coin. Elle est là depuis toujours, depuis que le Tarn existe. Il y a des infranchissables un peu plus bas qui font que certaines peuvent arriver à dévaler mais à remonter c’est presque impossible. Ce qui fait que cette truite reste sur la plaine du Tarn et ne se mélange jamais.” En 2009, une analyse génétique du CNRS confirme que l’espèce du Mont-Lozère n’a jamais été croisée avec aucune autre. Plus petite que ses congénères, elle peut se passer longtemps de nourriture et résister aux hiver rigoureux.
Une truite protégée par un parcours No Kill
Ce jour-là, malgré une journée de pêche, Rémi rentrera la sacoche vide. Chacune de ses prises aura été remise à l’eau. Menacée de disparition, la truite du Mont-Lozère est protégée depuis 2008 grâce à la création d’un parcours patrimonial No kill. “L’objectif c’est qu’en cas de pollution majeure ailleurs dans le département ou même ailleurs en France, on puisse venir prélever de la truite sauvage qui puisse tenir le coup n’importe où”, explique François Albrecht. Il est l’ancien président de l’APPMA du Haut-Tarn, c’est lui qui a mis en place ce parcours No Kill, récompensé en 2014 par le prix Charles C. Ritz qui récompense les actions en faveur de préservation de l’environnement.
Les vignes des rives du Tarn
Passé le Mont-Lozère, le Tarn descend ensuite en direction des Cévennes et poursuit sa course entre le causse de Sauveterre et le causse Méjean. Une vallée riche d’activités économiques à l’image de Bertrand et Elisabeth, un couple de viticulteurs qui a su s’adapter aux contraintes du terrain, particulièrement escarpé. “Il y a très peu de machines,” raconte Bertand Servières. “Bien sûr on vendange à la main, après c’est intéressant aussi, ça nous sollicite nous aussi, surtout quand ça monte ! Mais ça a aussi beaucoup d’avantages au niveau de l’ensoleillement, ça permet aux raisins de bien mûrir.”
Il y a une quinzaine d’années, le couple s’installe à Ispagnac. A l’époque, Bertrand Servières travaillait dans le bordelais avec sa femme. Ensemble, ils décident de tout quitter pour replanter des vignes en Lozère, alors qu’elles avaient disparu du territoire depuis un demi-siècle ! “On a un sol, une exposition qui est particulièrement favorable à la vigne et s’il y en avait autrefois il n’y a pas de raison,” se souvient Elisabeth Boyé. “Donc avec les connaissances qu’on a, à l’heure actuelle, avec ce qu’avaient les anciens, c’est sûr qu’on pouvait faire quelque chose de chouette !”
On a des vins qui sont complètement différents des autres régions, on est dans le sud mais aussi en altitude...
Aujourd’hui, le couple produit 25 000 à 30 000 bouteilles par an, à partir de 5 cépages différents. “Ce qu’il y a d’intéressant, c’est qu’on a des vins qui sont complètement différents des autres régions, on est dans le sud mais aussi en altitude”, se réjouit Bertrand Servières. “Ici on est à 600-700 mètres et ça, ça donne des vins forcément différents. Sur les vins blancs, ça donne des vins avec beaucoup de fraîcheur. Et pour les rouges, ça donne des vins avec beaucoup de fruits. On cultive aussi bien des cépages du sud que du nord”. Un second producteur s’est également installé sur ces rives. Le vin produit ici est principalement vendu sur le département.
Quézac, une résurgence dans le Tarn
Une autre source fait la fierté de la Lozère. Il s’agit de la Quézac. Chaque été, de nombreux vacanciers participent à des visites guidées, avides d’en apprendre plus sur la légende de Quézac. L’eau gazeuse, aujourd’hui vendue dans tout le pays, a notamment été popularisée par la diffusion du spot publicitaire de Ridley Scott, le réalisateur de Gladiator. “C’est une eau naturellement gazeuse”, explique Pierre-Alain Cazes, le directeur de l’usine d’embouteillage. “Elle est pompée à 150 mètres de profondeur. Elle met à peu près 35 à 40 ans pour descendre des côteaux et arriver dans une veine et c’est dans cette veine que nous captons l’eau.” L’eau est ensuite directement embouteillée à l’usine située dans le village de Quézac, au rythme de 24 000 bouteilles par heure.
Tuffery, le jeans made in Cévennes
Parfaitement concilier tradition et innovation, c’est aussi le pari gagné par Julien Tuffery. Un enfant du pays revenu dans les Cévennes avec sa compagne pour reprendre l’entreprise familiale vieille de 120 ans. “Du point de vue de la confection, nous faisons le même métier que mon arrière grand-père, ça n’a quasiment pas changé”, confie-t-il. Les moyens de production restent identique, mais le jeune homme a métamorphosé tout le reste de l’entreprise : vente directe, vente en ligne, nouveau marketing, nouvelles coupes… une véritable cure de jouvence pour la marque dont les ventes ont explosé en 6 ans.
Nous faisons le même métier que mon arrière grand-père, ça n’a quasiment pas changé
L’entreprise surfe sur la vague du “made in France” et les clients en redemandent : “On a vu un reportage sur cette entreprise familiale française qui fabrique en France donc ça m’incite beaucoup à acheter ici”, relate une vacancière passionnée de la Lozère. Un autre touriste confie : “Je viens jusqu’ici acheter mes pantalons uniquement parce que c’est une production française, qu’on était dans la région et on s’est arrêté en passant. Cest très sympa d’avoir des jeans fabriqués sur place”. A Florac, l’atelier Tuffery est désormais devenu le passage obligé des vacanciers en quête d’authenticité.