Mort de Nahel à Nanterre : "on aurait préféré une marche blanche silencieuse, par respect pour la famille"

Ce jeudi 29 juin, une marche blanche a été organisée en hommage à Nahel, cet adolescent de 17 ans tué par le tir d'un policier à la suite d'un refus d'obtempérer mardi à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine. Après une marche dans le calme, les participants ont assisté, médusés, aux tensions qui ont émaillées le cortège en fin d'après-midi.

Alors que Nanterre et de nombreuses villes d'Île-de-France sont sous tension, près de 6 200 personnes se sont rendues à cette marche blanche organisée à l'appel de la mère de la victime, selon la préfecture de police de Paris. À quelques heures du départ de la marche, le parquet de Nanterre avait annoncé dans la matinée la mise en examen du policier soupçonné d'avoir tué le jeune Nahel.

Alors que plusieurs personnes se rendaient au point de rendez-vous initial devant la préfecture des Hauts-de-Seine, le lieu de départ de la marche est modifié à la dernière minute. "J'ai vu sur Twitter que l'adresse avait changée, mais je me demande si beaucoup l'ont vu, s'inquiète un habitant s'étant rendu à la marche blanche. Il y a des gens qui vont à la préfecture là". 

La cortège doit alors partir de la médiathèque des Fontenelles, non loin de la cité Pablo Picasso, où vivait Nahel. Aux environs de treize heures, l'avenue Pablo Picasso se remplit timidement. Devant la médiathèque, des journalistes étrangers installent leur matériel.

"On ramène toujours ces jeunes de quartier à leurs origines, au fait qu'ils sont des racailles"

Karima Khatim

conseillère municipale au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis)

À l'approche de l'heure de départ, l'avenue se remplit au gré des arrivées de participants. Une élue municipale d'opposition au Blanc-Mesnil, en Seine-Saint-Denis attire l'attention des premiers journalistes présents. "On ramène toujours ces jeunes de quartier à leurs origines, au fait qu'ils sont des racailles" s'exclame Karima Khatim.

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Ian Brossat, conseiller PCF de Paris et Fabien Roussel, secrétaire national du PCF arrivent à la marche blanche en hommage à Nahel. ©Kévin Belbéoc'h-Dumarcet / France 3

Un départ dans le calme

La foule, massée devant le camion de tête transportant la mère de Nahel, s'élance dans le calme sur l'avenue Pablo Picasso. La foule scande régulièrement le même mot d'ordre : "Police, assassins !". Un début de marche qui se déroule dans le calme, mais pas dépourvue de slogans dirigés vers les forces de l'ordre. "Police assassine, justice pour Nahel !", "et tout le monde déteste la police !".

"On va leur montrer qu'on n'est pas des sauvages, qu'ils nous ont volé un fils, un frère, un ami, un voisin"

Une proche de Nahel

sur le camion de tête

Des médiateurs au t-shirt rouge floqué "Ville de Nanterre" tentent de diriger le cortège et veiller au bon déroulé de la marche. "On va leur montrer qu'on n'est pas des sauvages, qu'ils nous ont volé un fils, un frère, un ami, un voisin", clame l'une des proches de Nahel sur le camion de tête portant un t-shirt "Justice pour Nahel". Sur le camion, la mère du jeune Nahel est accompagnée d'Assa Traoré, la soeur d'Adama Traoré, décédé à la suite d'une interpellation en 2016.

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Le cortège de la marche blanche pour Nahel ©France 3 PIDF

À l'arrivée au théâtre des Amandiers, où le cortège doit bifurquer sur la route départementale qui rejoint la préfecture des Hauts-de-Seine, la foule s'épaissit. La police se fait alors discrète, la circulation est assurée par des agents de la ville de Nanterre. Plusieurs individus devancent le camion de tête pour se diriger vers la place Nelson Mandela, à proximité de la préfecture. Une heure est passée, les "t-shirts rouges" bénévoles continuent de maintenir la foule et de répéter des consignes de non-violence.

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La foule respecte une minute de silence en mémoire de la victime. ©Kévin Belbéoc'h-Dumarcet / France 3 Paris Île-de-France

Une dizaine de minutes plus tard, la foule respecte une minute de silence en mémoire de la victime, tandis que quelques jeunes le long des Archives départementales continuent de scander le slogan "Tout le monde détestent la police". Sur le camion de tête, la mère de Nahel tient à appeler au calme.

"On a tous demandé que ce soit pacifique, pour le deuil. Tous ceux de Nanterre sont restés calmes"

Farid

habitant et commerçant à Nanterre

La marche blanche atteint la préfecture en milieu d'après-midi. C'est dans ce même bâtiment qu'est entendu le policier responsable de la mort de Nahel.

Les premiers camions de CRS, en file sur le boulevard Jacques Germain Soufflot, apparaissent alors aux yeux des participants. Certains restent à distance, où des huées s'enchaînent.

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Une bande d'herbe a pris feu près d'une station de Vélib. ©Kévin Belbéoc'h-Dumarcet / France 3 Paris Île-de-France

Sur la place Nelson Mandela, la tension monte d'un cran. Alors que des individus tentent d'escalader les grilles de la préfecture, le cortège se scinde en deux. Une partie rejoint l'endroit où s'est encastrée la voiture de Nahel, à quelques dizaines de mètres.

Des tensions en fin d'après-midi

Le gaz lacrymogène commence à envahir les rues et disperse manifestants et participants. Alors que des tirs de mortiers et de fusées d’artifice se font entendre, un feu démarre dans une zone en friche près d'une station de vélos Vélib. 

"Je suis commerçant à côté, on doit protéger nos commerces"

Farid

habitant et commerçant à Nanterre

"On aurait préféré une marche silencieuse par respect pour la famille. On a tous demandé que ce soit pacifique, pour le deuil. Tous ceux de Nanterre sont restés calmes", raconte Farid, 50 ans, qui habite à Nanterre. "Tous ces jeunes ne viennent pas d'ici, ils sont d'autres banlieues. Ils ne connaissent pas la famille", avance-t-il. "Je suis commerçant à côté, on doit protéger nos commerces". La marche blanche dispersée, les tensions avec les forces de l'ordre s'emparent des rues de Nanterre.

Plusieurs départs de feu s'y déclarent, notamment dans l'entrée d'un bâtiment sur la place où les pompiers réuissent à intervenir rapidement. À quelques mètres de là, les pompiers ne chôment pas : pas moins de six voitures sont incendiées dans le boulevards des Bouvets. Une épaisse fumée noire gagne la rue.

En fin d'après-midi, les tensions se déplacent ponctuellement entre l'esplanade Charles de Gaulle et le parc André Malraux, avec, sur place, des tirs de pétards et l'usage de gaz lacrymogène. La brigade de recherche et d'intervention (BRI), une unité dédiée aux interventions difficiles, y est déployée selon une source policière à l'AFP.

Aussitôt dans un communiqué, le préfet des Hauts-de-Seine Laurent Hottiaux "condamne les violences" qui ont eu lieu en marge de la marche blanche, et "appelle au calme". "Si dans un premier temps, la déambulation s’est déroulée dans le calme, (...) les forces de l’ordre ont ensuite été prises à partie par des éléments isolés et violents" a-t-il déclaré. Près de 5 000 policiers et gendarmes étaient mobilisés ce jeudi soir en Île-de-France, soit "quatre fois plus" que les effectifs déployés dans la nuit de mercredi à jeudi selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

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