Le chantier d'un immense "casier pilote" touche à sa fin en Seine-et-Marne, près de Montereau-Fault-Yonne. Ce bassin de rétention des eaux doit permettre de réguler le débit de la Seine en abaissant son niveau de maximum 15 centimètres en cas de crue.
Des millions de m³ d'eau qui se déversent dans les rues de Paris : c'est le scénario catastrophe que ne veulent pas voir arriver les autorités. Depuis plusieurs années, un important chantier est en cours en Seine-et-Marne, à la confluence entre la Seine et l'Yonne à Montereau-Fault-Yonne.
Un immense bassin de rétention des eaux, appelé casier pilote de la Bassée, va être inauguré ce mercredi. Il s'agit d'un réservoir de 360 hectares entouré d'une digue. Doté d'une capacité de stockage d’environ 10 millions de m³, soit l'équivalent de 4.000 piscines olympiques d'une profondeur de 2 mètres, il doit permettre de faire baisser le niveau de la Seine de 15 centimètres en cas de crue.
Ainsi, grâce à un système de pompage, il pourra protéger des inondations de l’aval de l’ouvrage à hauteur de Marolles-sur-Seine jusqu’à Paris.
"L'ouvrage est assez proche de la région parisienne où il y a beaucoup d'enjeux d'habitants en zones inondables. Cela permet d'intervenir sur des crues qui peuvent survenir sur la Seine ou indirectement sur l'Yonne lorsque les pluies tombent proches de la région parisienne", se félicite Baptiste Blanchard, directeur général de Seine Grands Lacs qui ajoute qu'une telle installation "n'a pas été construite depuis 35 ans".
La mise en service définitive de ce casier pilote à 114 millions d'euros va prendre plusieurs semaines. Une phase de test a lieu jusqu'à début mars où le bassin sera successivement rempli d'abord à mi-hauteur puis vidé, à nouveau remplit totalement, et de nouveau évacué.
Le saviez-vous ? La région Ile-de-France est le territoire français le plus exposé au risque inondation.💧
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Il accueille plus de 12 millions de personnes, dont 850 000 habitent directement en zone inondable.
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Des centaines de milliers de personnes concernées
Moins médiatisé que le bassin d'Austerlitz, cet immense réservoir n'a pas la même fonction. Alors que le premier est nécessaire en cas de fortes chutes de pluies à Paris, principalement pour maîtriser la qualité de l'eau, ce nouveau réservoir vient s'ajouter aux quatre lacs-réservoirs situés en amont de Paris (en Bourgogne et en Champagne) pour maîtriser le débit de la Seine.
"Toutes les communes qui la bordent sont potentiellement très exposées au risque d'inondation majeure. La référence, c'est la crue de 1910, même si elle serait totalement différente aujourd'hui. À l'échelle régionale, ce sont environ 1 million de personnes qui vivent dans une zone inondable, à 85% sur la Seine", explique Ludovic Faytre, responsable des études Risques - Aménagements à l'Institut Paris Région.
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Deux crues de la Seine ont marqué les esprits ces dernières années : celles de 2016 et de 2018 où le fleuve a menacé de sortir de son lit. Encore dernièrement, il a fallu réguler ce fleuve capricieux, été comme hiver :
"On avait des niveaux de débit, pour un mois de juillet, qui étaient de l'ordre de la vicennale. Cela veut dire qu'on avait une chance sur vingt d'avoir un niveau d'eau, de débit, aussi élevé. Nous avons dû retenir de l'eau avec un lac-réservoir pour que la cérémonie d'ouverture se passe bien par exemple. Et en 2024, on a connu 7 crues sur le bassin, que ce soit sur la Marne, sur la Seine ou sur l'Yonne", indique Baptiste Blanchard de l'établissement public Seine Grands Lacs.
Pour vous informer sur le risque d'inondations, il existe 4 niveaux de vigilance : vert, jaune, orange, rouge ? 🚦
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Ils sont utilisés pour caractériser le niveau de risque. À tout moment, informez-vous sur l’état de vigilance des crues avec @Vigicrues : https://t.co/5sifrXudaG pic.twitter.com/piflpJ01mO
Une crue majeure ne peut être évitée
Mais ce seul bassin "casier pilote", accompagné des lacs-réservoirs, ne peut empêcher une crue d'importance exceptionnelle. D'autant qu'elle pourrait durer plusieurs semaines. "Il doit exister cette réflexion dans toutes les mesures que nous appelons non structurelles, c’est-à-dire qui relèvent de la culture du risque, des diagnostics, de la compréhension, de la préparation, de la continuité de l'activité", avance le géographe Ludovic Faytre.
Les experts de Seine Grands Lacs ont bien conscience de ces enjeux. L'établissement public coordonne plusieurs centaines de travaux à effectuer sur 62 communes qui pourraient être concernées par de telles inondations.
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"Ce sont des digues à conforter, des ouvrages de protection ou des mesures à prendre qui permettent que, lorsque la crue est arrivée, si on ne peut pas l'empêcher, que les conséquences soient plus faibles. On fait par exemple un diagnostic des bâtiments d'une commune qui sont situés en zone inondable pour voir si on ne peut pas déplacer les prises électriques ou adapter certains niveaux de stockage pour les mettre hors d'eau de façon à limiter les conséquences financières", poursuit Baptiste Blanchard, directeur général de Seine Grands Lacs.
Selon lui, il est très compliqué de prédire les répercussions du changement climatique sur l'évolution des crues de la Seine. Paris n'est d'ailleurs pas la seule métropole à devoir s'adapter à ces problématiques. "Aujourd'hui, il n'y a pas de grandes villes dans le monde qui ne soient pas développées autour de l'eau. L'eau fait partie de la ville et de l'aménagement du territoire", conclut Ludovic Faytre.