Des agriculteurs de la Coordination rurale ont bâché trois radars jeudi soir entre Aix-en-Provence et Pertuis, dans les Bouches-du-Rhône. Exaspérés par les promesses gouvernementales non tenues neuf mois après la grande mobilisation nationale, ils interpellent l'État et les Français face à la dégradation de leurs conditions de vie.
"On a laissé aux politiques le temps de s'engager, maintenant, à eux de faire ce qu'ils ont promis". Neuf mois après les blocages qui ont marqué la région, Laurent Dubost ne veut plus attendre. Les réponses du gouvernement ne sont toujours pas à la hauteur. Ce jeudi 24 octobre, alors que les routes sont sombres, une poignée de membres de la Coordination rurale des Bouches-du-Rhône ont recouvert trois radars d'une bâche, installés sur la route entre Aix-en-Provence et Pertuis.
Depuis neuf mois, rien n'a changé
Caroline Lecanuet, présidente de la Coordination rurale 13, maintient l'échelle pour atteindre l'un de ces trois radars : "C'est un avertissement." Ce jeudi soir, les agriculteurs membres de ce syndicat sont venus exprimer leur colère face à l'absence d'avancées de la part de l'État après les engagements pris l'hiver dernier. Une carotte est accrochée à chacun des radars ciblés. Symbole d'un gouvernement qui en demande toujours plus aux agriculteurs, selon Laurent Dubost, viticulteur et secrétaire général de ce mouvement syndical, en référence à la loi contre l'utilisation des phytosanitaires, votée en 2022.
Sur place, les agriculteurs sont encore déterminés à poursuivre de nouvelles mobilisations sociales pour se faire entendre. "On avait annoncé que si on n'avait pas de réponses concrètes aux revendications que l'on avait émises pendant le grand mouvement de mobilisation d'hiver, on repartirait après les récoltes à l'automne par un mouvement de mobilisation, explique Caroline Lecanuet. On tient nos engagements, contrairement au gouvernement."
Rien n'a changé depuis le début des mobilisations agricoles, voire les conditions empirent selon eux. "Les trésoreries pour certains se sont asséchées, les prêts bancaires continuent à monter, les cotisations de MSA (Mutualité sociale agricole) sont toujours les mêmes", note Caroline Lecanuet.
Pour elle, seul le prix du gazole non routier (GNR) a diminué. Elle souligne aussi être satisfaite que le fonds viticole a été débloqué. Mais tous se sont accordés ce jeudi soir pour le dire : "Il faut arrêter ces accords de libre-échange." "Aujourd'hui, quatre hectares du côté de Noves (Bouches-du-Rhône) de navets d'un agriculteur ont été détruits à cause des pucerons. On va importer quatre hectares de navets d'ailleurs. On ne sait même pas comment ils ont été produits. Ce n'est pas entendable", s'exaspère Laurent Dubost.
"Aujourd'hui, on n'arrive pas à se relever"
La lassitude s'est fait entendre, ce jeudi soir, lors du rassemblement. Nicolas Pelegrin, administrateur à la Coordination rurale, était présent lui aussi. Il est à bout. Sur l'année, il assure avoir perdu 30 % d'acomptes. "On est vraiment dans le dur en ce moment. C'est très compliqué de vivre de l'agriculture. Par toutes les normes, toutes les taxes qu'on se prend sur la tronche, aujourd'hui, on n'arrive pas à se relever."
L'alliance syndicale agricole Jeunes agriculteurs / FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) appelle les agriculteurs à reprendre les blocages à partir du 15 novembre, notamment pour protester contre l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, qui pourraient être ratifiés fin novembre lors du G20 au Brésil. Une stratégie qui ne fait pas l'unanimité. "Je ne vois pas pourquoi il faudrait attendre le 15 novembre. Nous, on est là, nous, les difficultés, on les vit au quotidien." Les agriculteurs de la Coordination rurale préviennent que des actions fortes sont à prévoir, si le gouvernement n'apporte pas de réponses concrètes à leurs revendications.