"C’est devenu une attraction", "on en voit en pleine journée" : un quartier urbain de Marseille envahi de sangliers

Dans le quartier de Saint-Loup dans le 10e arrondissement de Marseille, les sangliers font de plus en plus parler d’eux. Si certains habitants sont inquiets et réclament des mesures d’urgence, d’autres s’accommodent de leur présence, voire les apprivoisent. Depuis plusieurs mois, ces animaux sauvages, souvent perçus comme une menace, déambulent librement dans le secteur. Immersion dans le quartier.

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À l'arrêt de bus St-Thys, à quelques mètres de la crèche Saint-Loup dans le 10e arrondissement de Marseille, une maman de trois jeunes enfants, habitante du quartier, témoigne  d'une présence de sangliers, intensifiée ces derniers jours : "cela fait plus de 20 ans que j’habite ici, c'est vrai que je voyais parfois des sangliers, mais jamais en aussi grande quantité".

Si elle continue de fréquenter le parc Saint-Cyr, elle reste vigilante : "je ne m’approche pas trop d’eux. Quand mes parents veulent emmener les enfants au parc, je dois les prévenir de la présence des sangliers. Après je n'ai pas l'impression que cela inquiète tous les habitants, certains semblent amusés, ils les prennent en photo, c’est devenu une attraction".

Un groupe d'amies assistantes maternelles, accompagnant leurs enfants au parc St-Cyr, discutent entre elles du phénomène. Si l'une d'elles se montre préoccupée : ce n'est pas normal qu'on ne soit pas protégés, avant, on avait un gardien. Après, le jardinier m'a donné son numéro personnel, c'est déjà ça". L’autre prend un ton plus rassurant : "ce que j’ai entendu de mon côté, c'est qu'ils ne sont pas agressifs". Son amie rétorque : "je suis d'accord avec toi, mais cela reste des animaux sauvages, un animal est un animal". Elle lui répond, "c'est vrai que leur présence demande de la prudence. Récemment, mon mari a dû s’arrêter sur la route, alors qu'il était à moto pour laisser passer des petits sangliers."

@france3paca Dans le quartier de Saint-Loup dans le 10e arrondissement de Marseille, les sangliers font de plus en plus parler d’eux. Depuis plusieurs mois, ces animaux sauvages, souvent perçus comme une menace, déambulent librement dans le secteur, semant le trouble parmi les riverains. #sanglier #marseille ♬ son original - France3Paca

Une question revient fréquemment : que faire des sangliers ? L'une d'entre elles plaide pour leur gestion dans un cadre approprié : "il faut un lieu spécifique pour eux". Son amie est plus catégorique : "on m'a dit qu'il fallait chercher un lieutenant de louveterie, que ce sont eux qui sont spécialisés, mais ce n’est pas à nous de nous en occuper. La mairie doit prendre ses responsabilités". Elle ajoute, certains disent qu’ils les ont déplacés plus haut, dans la colline, mais c’est déplacer le problème… Ce n’est pas la solution”.

Une dame âgée intervient dans la conversation : “j’ai vu que les terres étaient retournées. Ça fait peur, mais il ne faut pas s’affoler”.

Les risques pour la sécurité publique

Les sangliers s'infiltrent même dans les résidences. Un collégien qui rentrait chez lui affirme leur présence : "Il y en a dans ma résidence. Venez. Souvent, ils sont plutôt vers la pente et remontent vers les buissons pour se cacher". Une situation qui provoque un sentiment d’insécurité. Samir, membre du conseil syndical de la résidence Château Saint-Cyr raconte : "Cela fait plusieurs mois que nous remarquons des descentes de sangliers. Mais, il y en a vraiment beaucoup ces derniers jours. Pourtant, aucune action concrète n’a été prise". Il poursuit, "On en voit en pleine journée". Le manque de communication officielle de la part des autorités locales ajoute davantage de frustration chez les riverains. "On a alerté les services concernés. Aujourd'hui, on n’a pas d’action pour endiguer la situation", précise-t-il.

Il y a vraiment beaucoup de sangliers ces derniers jours, la mairie doit intervenir.

Samir Bouguetaya - habitant et membre du conseil syndical de la résidence Château St-Cyr

Les membres du conseil syndical de la résidence ont un groupe Whatsapp dans lequel ils se partagent des photos et vidéos dès lors qu'ils aperçoivent les bêtes. "Certains habitants évitent même de sortir la nuit pour jeter leurs poubelles, par crainte de les croiser". Samir, parcourt la résidence pour nous y montrer leurs zones préférées : "Ils transitent par ici, vers les poubelles pour chercher à manger. Jusque-là ça va, sauf que dernièrement une voiture a été endommagée, enfin elle a été tamponnée par un sanglier", confie-t-il.

Solange, une autre résidente, rapporte une situation similaire : "à l’école des Trois Ponts, les sangliers passent fréquemment, surtout aux heures d’école. Beaucoup de parents s’inquiètent, car ils empruntent les mêmes chemins qu'eux". Lors d’une promenade au parc St-Cyr avec les enfants qu’elle garde, elle note des traces récentes de passage : "C’était inquiétant, car on ne savait pas si les sangliers étaient cachés dans les buissons, prêts à surgir. Avant, ils venaient surtout la nuit, fouiller les poubelles. Mais depuis cet été, ils se baladent en plein jour, comme s’ils étaient dans la forêt". 

Du côté de la sortie du parc, une maman dans son véhicule assure, elle, que les sangliers descendraient d'une colline située face à la résidence Les Bartavelles.

Des animaux fascinants, mais imprévisibles

En parallèle, certains habitants ont appris à cohabiter avec les sangliers, et apprécient même la présence de ces animaux. Un groupe de collégiens s'amuse à les chercher dans le parc St-Cyr. “On cherche les sangliers. J’en avais vu il y a quelques jours, je sais qu’il y en a dans le parc. À mon avis, ils descendent du parc des Bruyères”.

Une habitante a même appris à les apprivoiser, et s’approchait même pour leur donner à manger : “j’ai mis quelques jours à les apprivoiser. Mais depuis, ils me reconnaissent. J’arrive même à approcher la maman, et ses petits. Ils mangent dans ma main”. Elle approche le groupe de collégiens, “vous les cherchez aussi ? Vous avez réussi à les trouver ?” L’un des jeunes de la bande répond : “aucune trace, j’ai entendu dire qu’ils les avaient déplacés, avant-hier”.

Ida raconte, émue que, malgré leur présence régulière, ces animaux ne posent aucun danger : "ils sont inoffensifs, ils ne m’ont jamais attaquée. Ils ont plusieurs cachettes. Je connais leurs coins favoris dans ce parc". Son conjoint ajoute, "elle entretient une relation privilégiée avec eux, ils viennent vers elle sereins".

Un autre père de famille, qui se promène avec ses deux enfants, adopte une attitude similaire : "Oui, il y a des sangliers, mais cela ne pose aucun problème. Ils sont gentils, ils ne s’approchent pas".

Une présence de longue date

Les sangliers sont désormais un phénomène récurrent dans plusieurs quartiers marseillais. Il y a deux mois, en septembre dernier, des sangliers s'introduisaient régulièrement dans une résidence du 10ᵉ arrondissement de Marseille, traverse Chante Perdrix. De nombreux dégâts étaient visibles au niveau des massifs de fleurs et dans l'ensemble des espaces verts. Un homme était même resté coincé près de deux heures dans sa voiture, ne pouvant accéder à l'entrée de son bâtiment. Les habitants continuent de réclamer une prise en charge des animaux sauvages.

Au mois d'octobre, un habitant craque et tire sur une famille de sangliers. "Avec une arbalète une maman et ses quatre petits sangliers dans le parc du Roy d’Espagne et les ont laissés agoniser", avait dénoncé une habitante du quartier sur Facebook. 

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