Inaugurée en 2022, la grotte Cosquer a attiré en seulement un an un million de visiteurs, devenant un site incontournable à Marseille. Quels ont été les défis des plasticiens pour parvenir à reproduire ses trésors engloutis ?
Les artistes qui ont travaillé sur la sauvegarde de la grotte Cosquer située au cap Morgiou, ont réussi l'exploit de reproduire, de restituer des peintures dessinées il y a 20 000 ans sur les parois de la grotte sous-marine. Véritable trésor unique au monde qu'il a fallu reproduire au détail près.
Henri Cosquer, plongeur professionnel de Cassis, a découvert la grotte sous-marine en 1985 par 37 mètres de profondeur lors d'une plongée dans le massif des calanques entre Marseille et Cassis. Lors de celle-ci il raconte "j'ai posé la lampe et la lampe est tombée droit sur une main et l'histoire est partie de là", ensuite un bouquetin, un cheval, des bisons... Les peintures rupestres se dévoilent dans un relief géologique tourmenté, donnant à la grotte des airs de cathédrale souterraine. Plusieurs centaines de peintures et gravures représentant des animaux principalement, mais aussi des hommes.
En 1991, la grotte est officiellement déclarée du nom du découvreur et classée monument historique.
La grotte Cosquer est la seule grotte sous-marine répertoriée au monde. Aujourd'hui, elle est surveillée et interdite au public en raison des dégradations qu'elle connaît. Henri Cosquer a milité durant plusieurs années pour que le grand public puisse lui aussi profiter de sa découverte.
Grotte en péril
Avec la montée des eaux, une partie de ses gravures vieilles de 25.000 ans commence à disparaître et elle sera un jour totalement engloutie. Le réchauffement climatique influe sur le niveau de l'eau qui augmente plus de 3 millimètres par an. La pollution marine est également en cause dans la dégradation des œuvres. Le rejet d'eaux usées aussi joue un rôle sur leur disparition.
Aujourd'hui encore, les travaux archéologiques se poursuivent dans la grotte. Ces peintures et gravures qui ont traversé les millénaires sont inexorablement condamnées par le réchauffement climatique. Selon Luc Vanrell, responsable scientifique de la grotte Cosquer, "Dès que l'eau monte et lèche les parois, elle dissout la couche tendre de surface du calcaire et cette couche-là se dissout quasi instantanément dans la mer" "chaque fois qu'on a des épisodes de hautes eaux au pied des parois, on a une espèce de traçage blanc sous l'eau qui correspond au dépôt de ce qui a été dissout et c'est vraiment tragique on voit les œuvres se dégrader. Toutes celles qui sont près du littoral vont disparaître".
De nombreux spécialistes de l'art rupestre travaillent donc à la création d'une réplique en fac-similé de la grotte.
Les plasticiens à l'œuvre
Depuis le mois de novembre, une équipe de plasticiens de Montignac, en Dordogne, travaille à la copie des inscriptions, pour qu'en 2022, la Villa Méditerranée, sur les quais à Marseille, soit transformée en avatar de la célèbre grotte.
Les plasticiens travaillent sur 12 parois de résine projetées d'après la modélisation en 3D de la grotte.
Alain Dalis, plasticien de l'Atelier Arc & Os décrit son travail : "il y a un moment on se passe de la projection et on essaie de travailler vraiment comme un peintre en comprenant la façon dont ça a été fait en essayant de redonner la rapidité d'exécution... il faut recréer l'émotion que l'on a lorsqu'on voit la peinture".
Ces plasticiens ont déjà réalisé le fac-similé de la grotte Chauvet, en Ardèche. La réplique de Cosquer est un nouveau défi avec l'impossibilité pour eux de plonger pour explorer la grotte. Une frustration, malgré la précision de l'image 3D, certains détails restent dans l'ombre. "C'est un handicap énorme de ne pas aller dans la grotte", Alain Dalis. Pour la grotte Chauvet, ils pouvaient descendre tous les 15 jours ou tous les mois. Ils ont à leur disposition, en plus des photos, des éléments qui leur permettent d'affiner les choses.
Rien de remplace la visite de l'originale
Alain Dalis
Le responsable du projet de réplique de la grotte Cosquer, Laurent Delbos, utilise la réalité virtuelle pour explorer la grotte et réfléchir avec un scénariste, et un géologue de l'implantation, notamment de bassins dans le fac-similé. La scénographie doit se rapprocher au maximum de la réalité pour les visiteurs.
Selon Kléber Rossillon, gestionnaire, la réplique de la grotte Cosquer "aura deux particularités qui n'ont jamais été faites jusqu'à présent, d'une part la curiosité géologique qui est extraordinaire... mais nous aurons l'eau qui a envahi la grotte Cosquer et que nous allons reproduire dans la villa Méditerranée, sous la mer".
L'exploitant espère attirer 500.000 visiteurs par an. Le projet de 24 millions d'euros est en partie financé par la région PACA, son ouverture est prévue dès juin 2022.
Voir le reportage "Un faux air de préhistoire"
#Mediterraneo
Revoir toutes les émissions
Première publication en avril 2021