Les oursins disparaissent peu à peu des eaux de la côte bleue. La faute, entre autres, au braconnage. Si en 2023, les quotas de pêche ont été durcis, les pêcheurs comptent aujourd'hui sur la surveillance de la police maritime et la réduction de la durée de la saison pour limiter les activités illégales.
“Vous pêchez aujourd’hui ? On peut voir le résultat de votre pêche ?”. À bord du bateau de la police maritime des Bouches-du-Rhône, le brigadier-chef David Roger et ses collègues surveillent la côte bleue. En cette période de fêtes, l’oursin a la cote.
“Il y a beaucoup de monde en mer aujourd’hui parce qu’il y a eu une période de fort mistral donc les chasseurs sont restés au chaud à la maison”, renchérit l’agent.
La saison des oursins est lancée depuis le 15 décembre dernier et elle s’étend jusqu’au 28 février 2025. Au cours de cette période, la police maritime effectue des opérations de contrôles car l’animal marin est trop souvent sujet au braconnage.
Cette période des fêtes de fin d'année est propice au braconnage d'oursins. Ce délit de braconnage porte un préjudice important à la préservation de l'espèce. Opération de lutte menée ce matin dans la rade #Marseille par la Brigade Maritime Départementale @PoliceNat13 pic.twitter.com/T3qmliltwS
— Police nationale 13 (@PoliceNat13) December 27, 2024
Un business facile et très lucratif
“Ce n’est pas très compliqué de pêcher des oursins. Vous les retrouvez en bord, dans des profondeurs quand même assez correctes. Tout le monde peut s’adonner à cette pratique”, souligne David. Un masque, un tuba et un couteau peuvent parfois suffirent.
“La pêche aux oursins est assez lucrative. C’est quelque chose qui se vend assez cher au marché noir”, explique le brigadier avant d’ajouter : “C’est tellement lucratif que certains s’adonnent à ça pour donner des compléments de revenu, surtout en fin d’année”. Dans le commerce, les oursins se vendent entre 15 et 20 euros la douzaine.
"Il y a de moins en moins d'oursins"
Les pêcheurs qui pratiquent le braconnage ne respectent pas la réglementation et contribuent à l’extinction de l’espèce. Il est ainsi interdit, pour les plaisanciers, de pêcher plus de deux douzaines d’oursins par jour et par pêcheur et plus de cinq douzaines par jour par bateau.
“Ces quotas ont été mis en place pour limiter la pêche aux oursins parce que malheureusement, il y en a de moins en moins”, déplore David qui espère que cette nouvelle réglementation, durcie depuis octobre 2023, va empêcher les activités illégales de se développer.
“Quand j’étais petite, je venais ici avec mon père et je trouvais des oursins partout. Maintenant, il n’y a plus rien”, renchérit une pêcheuse. La faute aux braconniers mais aussi aux activités touristiques, le va-et-vient des bateaux, qui selon elle “envahissent les côtes l’été et tuent la faune sauvage”.
“Je regrette simplement qu’à Marseille, on ait une dérogation pour pêcher les oursins avec des bouteilles. En Corse, ils pêchent en apnée, sur la Côte d’Azur un peu plus loin également”, explique le pêcheur retraité avant d’ajouter : “Quand vous respirez sous l’eau, vous êtes plus libre de prendre autant d’oursins que vous voulez”.
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Résultat, les professionnels se retrouvent obligés d’importer des oursins de Sète, ou de Galice, au nord de l'Espagne. Les quotas en vigueur depuis octobre peinent encore à se faire respecter. Les pêcheurs qui ne respectent pas la réglementation risquent jusqu'à 22.500 euros d'amende.
Réduire la durée de la saison
En plus des quotas resserrés depuis plus d’un an et des opérations de contrôle menées par la police maritime, les autorités ont pris une autre mesure restrictive : jusqu'en 2026, la période de pêche à l'oursin est réduite de moitié. Désormais, elle passe de 4 à 2 mois et demi.
“Je pense que ça porte ces fruits. Ce matin, j’ai fait une plongée avec une quantité relativement correcte d’oursins avec un gros diamètre”, se réjouit Damien Ferraud, pêcheur professionnel d’oursins, qui a déjà effectué cinq plongées depuis le début de la saison. Il voit en cette nouvelle mesure une solution pour que l’oursin puisse davantage se reproduire en dehors de la période de pêche.
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“Le but, c'est de prendre un peu sur nous pendant quelques années, que l’oursin revienne et que l’on arrive de nouveau à le pécher de manière correcte, de donner des licences s’il y a la ressource. Faire en sorte que l’oursin reste sur nos côtes”, renchérit le professionnel.
Sur le bateau de la police maritime, les coups de siffler se multiplient. “Pêchez-vous des oursins ? Connaissez-vous la réglementation ? Pouvez-vous nous montrer votre prise ?”, interrogent les agents à chaque interaction avec un pêcheur. Ce vendredi 27 décembre, la plupart des pêcheurs étaient au fait de la nouvelle réglementation et aucun n’a été surpris en train de braconner.