L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail vient de sortir une étude qui pointe plusieurs substances contenues à l'intérieur des crèmes solaires qui contribuent à dégrader les écosystèmes marins.
Ce n'est pas nouveau, mais l'ANSES (L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail), vient de confirmer l'impact négatif de produits contenus entre autres dans les crèmes solaires, sur les coraux. Une étude de plus d'une cinquantaine de substances chimiques a notamment été menée dans les Outre-mer.
La moitié d'entre elles peut présenter des risques pour les récifs coralliens et contribuer à leur dégradation.
La Côte d'Azur abrite aujourd'hui plusieurs espèces également concernées par ces problématiques, parmi la plus célèbre, il y a le corail rouge, très prisé par la joaillerie, mais aussi le Cladocora caespitosa, reconnaissable par toutes les petites boules qu'il forme sur sa surface.
Et enfin les gorgones, qui forment de grandes ramifications et qui sont de la même famille que le corail.
Toutes ces espèces sont ce que l'on appelle des coralligènes, "avec les posidonies, ils forment de véritables nurseries, des lieux de pontes et de refuges pour la faune et la flore marine", explique Manuel Dietrich, le président de l'association niçoise : Depth's Guard qui défend la vie sous-marine.
"Un cocktail de substances"
Trois filtres à UV régulièrement utilisés dans certaines crèmes sont particulièrement nocifs et toxiques pour les coraux : l'oxybenzone, octinoxate et octocrylène. Sandrine Treyvaud, plongeuse toulonnaise qui a créé son association pour préserver les coraux, Ocean Request explique : "Certains de ces produits vont réactiver des virus qui dorment dans les mers, et ces virus vont ensuite s'attaquer certaines espèces de la faune et de la flore comme les coraux."
Les fameux filtres UV qui nous protègent du soleil desservent eux les écosystèmes marins. Ils forment en fait un film hydrolipidique au niveau de la couche d'eau à l'interface entre la mer et l'air qui empêche le passage des rayons lumineux... Et impacte directement le processus de photosynthèse des espèces végétales.
La biologiste marine, Françoise Loquès, évoque également l'impact du mélange de substances."
Dans les produits solaires, il y a des matières et produits organiques. Ce sont des composés comme les hydrocarbures qui ont évidemment un impact sur le milieu seul ou alors parce qu'ils vont se combiner à d'autres produits et ça fait un effet cocktail dont on ne mesure pas vraiment l'impact.
Françoise Loquès, biologiste marine.
Une combinaison de facteurs
Mais aujourd'hui les coraux ne souffrent pas que de l'impact des produits solaires, qui est plutôt minoritaire. "Cette problématique vient s'additionner à d'autres : acidification de l'eau, arrachage des fonds marins, surpêche et mauvaises pratiques anthropiques, réchauffement climatique..." énumère Manuel Dietrich.
L'ANSES estime aujourd'hui que 20% des récifs coralliens à l'échelle de la planète, ont été irrémédiablement détruits au cours des dernières décennies. Dans l'un de ses rapports, le GIEC prévoyait la disparition de 70 à 90% des coraux à + 1,5°C de température.
Un avenir bien sombre en prévision pour les coraux si rien n'est fait.
Tant que les politiques ne légifèrent pas et n'interdisent pas certaines pratiques et substances, rien ne changera
Manuel DietrichPrésident de l'association Depth's Guard
Les coraux constituent des écosystèmes à eux seuls à proprement parler, ils accueillent à peu près 100 000 espèces en tout genre. Les océans contribuent à stocker du CO2.
Dans la Méditerranée, l'association Depth's Guard, comme d'autres, constate bien l'effet du réchauffement de l'eau de l'eau sur eux. " Actuellement, on ne voit aucune régénération, il y a vraiment une diminution des coraux", atteste Manuel Dietrich.
Sandrine Treyvaud ajoute : " je vois qu'ils réagissent de plus en plus aux variations de températures. L'année dernière il y a eu une grosse perte de gorgones, la situation ne s'est pas améliorée depuis."
Face à la pollution des récifs coralliens avec des substances solaires, l'ANSES recommande de "créer ou de renforcer la surveillance et le suivi des substances chimiques ayant un impact sur les récifs coralliens."
Elle ajoute également : "un certain nombre de produits solaires apposent des mentions ou des pictogrammes mettant en avant leur respect du milieu marin. Ces marquages doivent être soutenus par des études menées sous la responsabilité des fabricants qui les vendent."