Chaque année, la période des vendanges est un peu une loterie pour les vignerons qui subissent les caprices de la météo. La récolte 2016 s’annonce cruciale pour une partie des professionnels de la vigne. Certains jouent même leur avenir. Florilège de propos recueillis sur le terrain.
Comment les gelées du printemps ont-elles bouleversé la donne ?
Le vignoble bourguignon a été frappé par plusieurs épisodes de gel : début avril (dans le Mâconnais) et fin mai (Grand Auxerrois, Chablis et Mâconnais).Mais, c’est surtout le matin du mercredi 27 avril 2016 qui restera dans toutes les mémoires, car ce jour-là, il a gelé sur la quasi-totalité de la Bourgogne.
Dans les villages qui ont été touchés, certains vignerons estiment avoir perdu 70 à 80 % de leur récolte.
« Dans les secteurs où les gelées ont été les plus virulentes, on ne trouve que deux grappes de raisins sur un cep qui pourrait en donner huit à dix en temps normal. Dans certaines travées (distance entre deux piquets), on observe même sept ceps qui n’ont à offrir qu’une seule et unique grappe de raisin. »
Quel est l’état de santé de la vigne actuellement ?
De façon générale, la vigne est dans un état sanitaire correct. « Elle est assez jolie. Après la période de gel, il a fallu se bagarrer, être vigilant et suivre en permanence l’évolution du raisin pour le maintenir en bon état. En effet, la vigne a subi une grosse pression du mildiou en mai et en juin. Heureusement, les mois de juillet et d’août sont restés secs, ce qui a largement contribué à sauver la récolte restante. »Actuellement, la véraison (le moment où les grains changent de couleur) est quasiment achevée.
Cela dit, quand on y regarde de plus près, la situation est complexe car les gelées ont un fort impact sur la maturité.
« On voit que les ceps de vigne portent des grappes de raisin mûres et d’autres qui ne le sont pas. Ce décalage remonte au printemps, quand les bourgeons se développaient. Le matin du mercredi 27 avril, des bourgeons ont gelé et d’autres ont poursuivi un développement normal avec des grappes, qui sont aujourd’hui les plus avancées. De plus, à côté des bourgeons détruits par le gel, de nouveaux bourgeons secondaires se sont développés. »
Comment vont s’organiser les vendanges ?
Dans l’état actuel des vignes, en particulier sur la Côte de Nuits, les vendanges pourraient débuter fin septembre. Une date légèrement tardive par rapport à d’autres années. « Mais pas tant que cela, car autrefois les vendanges avaient lieu fin septembre, voire début octobre. »Dans une partie des domaines viticoles, les équipes de vendangeurs seront plus petites, mais elles travailleront sur la même durée que pour une vendange classique. Certains vignerons n’excluent pas qu’il faille interrompre les vendanges deux à trois jours pour attendre que les raisins en retard mûrissent un peu plus.
Les vendangeurs devront faire la distinction entre une grappe à maturité et une autre qui l’est moins. « Il faut observer le cep et regarder comment a poussé la grappe. Si elle vient d’un bourgeon primaire (pas touché) ou secondaire (qui s’est reformé ensuite). »
Cependant, si le temps reste au beau, avec un bon équilibre entre l’ensoleillement et la pluviométrie, on pourrait espérer une maturité optimale entre les grappes mûres et celles qui le sont moins. « Dans l’idéal, il faudrait que le temps ne soit pas trop sec. Un peu de pluie permettrait de faire avancer la maturité du raisin. A l’inverse, le manque d’eau pourrait diminuer la taille des fruits et réduire encore la récolte. »
Pourquoi ces vendanges 2016 sont-elles cruciales pour les viticulteurs ?
La récolte 2016 s’annonce en baisse. Pour certains vignerons, c’est un nouveau coup dur, dont les conséquences financières pourraient être dramatiques. En effet, entre 2010 et aujourd’hui, des viticulteurs de la région ont déjà fait les frais de trois ou quatre récoltes de petite quantité.« La loterie de la vendange est la même chaque année et elle reste toujours un peu compliquée pour chacun », résume un vigneron. « Nous sommes tributaires des conditions climatiques et il faut faire preuve d’une certaine philosophie. »
Certains viticulteurs de Chambolle-Musigny se rappellent qu’en 1981 il a gelé du dimanche au lundi de Pâques et qu’il a grêlé en été ! La récolte a été très petite en quantité et la qualité très réduite.
Pour l’heure, l’optimisme des vignerons est indexé sur la météo. « Si le temps reste clément, cela peut donner un beau millésime de belle qualité », assure un professionnel.
Dans les vignes de Bourgogne, on croise les doigts.
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