Une décision du conseil municipal de Chevigny-Saint-Sauveur va prendre effet à la rentrée prochaine de septembre, où un "menu unique sera proposé" dans les cantines scolaires de la commune. Une décision vivement constestée par la Ligue des Droits de l'Homme et le Parti Communiste de Côte-d'Or.
Dossiers d'inscription 2017Une mention est apparue dans les dossiers d'inscription à la restauration scolaire pour la commune de Chevigny, pour la rentrée 2017.
Elle précise "Dans le cadre du principe de laïcité, un menu unique est proposé. Aucun repas de substitution ne sera prévu, sauf en cas d'allergies alimentaires et sur validation d'un projet d'accueil individualisé"
Alors que, jusqu'à présent, les enfants bénéficiaient d'un repas de substitution en cochant simplement une case.
Le maire de Chevigny-Saint-Sauveur, Michel Rotger (LR) affirme, dans les colonnes de notre confrère le Bien Public, qu'il "applique la recommandation de l'Association des Maires de France (AMF), un guide de la laïcité publié en novembre 2015"
Un extrait du Vademecum sur la Laïcité indique :
Pour l’AMF, il n’est pas acceptable de proposer des « menus confessionnels » et il est contraire aux règles laïques de déterminer les menus en fonction de motifs religieux ou philosophiques.
Ainsi, il serait contraire au principe de laïcité d’exclure un aliment ou un type d’aliment pour répondre à des prescriptions religieuses ou philosophiques comme il le serait d’ailleurs également de proposer systématiquement cet aliment ou ce type d’aliment.
En ce sens, l’utilisation du terme même de « menu de substitution » est impropre.
Le Vademecum sur la laïcité complet, édité par l'Association des Maires de France, est téléchargeable sur le lien ci-dessous :
Indignation de la Ligue des droits de l'Homme
Dans un communiqué du 15 juin, la section de Ligue des Droits de l'Homme de Dijon a exprimé "son indignation" :
La LDH de Dijon poursuit :
"Nous dénonçons le fait que la laïcité soit invoquée pour en bafouer les principes. Une fois de plus, elle est utilisée abusivement pour justifier intolérance et exclusion.
Faut-il redire ses trois fondements inscrits dans la loi de décembre 1905 ?
- liberté de conscience et donc de pratiquer la religion de son choix ou aucune religion,
- indépendance de l'Etat vis à vis des religions .
- neutralité de l'Etat.
C'est par exemple au nom de ces règles qu'avait été institué, avec l'enseignement obligatoire, un jour de repos, le jeudi à l'origine, pour permettre aux familles qui le souhaitaient d'envoyer leurs enfants au catéchisme ce jour.
La laïcité est fondée sur la tolérance, sur le vivre ensemble avec nos différences. Or, nous avons affaire, avec cette décision municipale, à une mesure qui revient à exclure ou marginaliser certains enfants du fait de la religion de leurs parents : chacun sait qu'elle vise en fait particulièrement nos concitoyens musulmans, même si elle peut en toucher d'autres.
Pour la Ligue de Droits de l'Homme comme pour tous les véritables laïques, tous les enfants doivent se sentir accueillis et respectés à l'école. Elle doit être un des premiers lieux d'apprentissage de la tolérance et de la démocratie. Elle ne saurait être l'otage de quelques élus et de leur démagogie. Ceux-ci n’ont aucun droit à définir ce que doivent manger ou pas les enfants de la commune. C'est ce qui est respecté dans toute l'agglomération dijonnaise. Chevigny ne doit pas être une triste exception." - Ligue des Droits de l'Homme Dijon
Réaction du Parti Communiste de Côte d'Or
Quant au Parti Communiste de Côte-d'Or, ce dernier a réagi, voyant dans cette application de la laïcité une "mesure d'exclusion" :
"Monsieur le Maire de Chevigny-Saint-Sauveur fait le même usage du concept de laïcité que le Front National. Il le détourne pour en faire un motif d’exclusion. La laïcité n’est pas une arme tournée contre les religions, ni un instrument de domination pour imposer ses propres croyances ou un seul mode de vie.
La laïcité a été conçue pour que, quelle que soit notre foi, notre opinion, nous puissions trouver la manière de vivre ensemble dans le respect des uns et des autres. Elle permet de s’adapter aux évolutions de notre société, en prenant le temps du dialogue et du partage, de l’élaboration de règles de vie communes.
Si pour cause de religion ou de régime alimentaire spécifique certains enfants ne mangent pas certains aliments, en quoi cela constitue- t- il un motif d’irrespect pour les autres ? Ces enfants vont très jeunes apprendre l’intolérance, le rejet, l’exclusion. Est ce tout ce que la République a à leur proposer ?
Les services publics locaux doivent demeurer ouverts à tous, tant par l’accès financier que par la qualité des services proposés. Cela passe par la modernisation des restaurants scolaires avec des choix de menus qui permettent à la fois de vivre dans le respect des uns et des autres et de découvrir la variété des aliments." - PCF 21
Un précédent déjà en Bourgogne
Cette suppression des menus de substitution n'est pas sans rappeler la décision du maire de Chalon-sur-Saône Gilles Platret en mars 2015, où la suppression des menus "sans porc" avait engendré un tollé de réactions. (voir rubrique "à lire aussi")