L’épidémie de covid crée un climat d’anxiété qui pousse les patients à passer des tests de dépistage sans consulter un docteur au préalable. "N’allez pas vous faire tester sans ordonnance, cela permettra de mieux suivre le virus", demandent des médecins face à un système débordé.
"Est-ce que mon fils qui a le nez qui coule et qui a été renvoyé de l’école a le covid ?"
Depuis que la rentrée scolaire a eu lieu, de plus en plus de médecins voient les patients affluer dans leurs cabinets.
Cette augmentation des consultations est provoquée en partie par les pathologies saisonnières qui reviennent à chaque rentrée de septembre : les gastroentérites, rhinites, angines et autres maux qui accompagnent le retour des enfants à l’école.
Mais, cette année, le contexte est très particulier en raison de l’épidémie de coronavirus covid-19. "Est-ce que mon fils qui a le nez qui coule et qui a été renvoyé de l’école a le covid ? Moi, est-ce que je dois retourner travailler ?"
"J’ai des patients qui viennent, car ils veulent savoir s’ils ont le covid. S’ils ont un petit peu de fièvre, ils sont inquiets. Ils ressentent le besoin de consulter pour avoir un avis médical, pour savoir s’ils sont à risque pour leurs proches, leurs collègues de travail, etc", déclare Emmanuel Debost, médecin généraliste à Plombières, dans l’agglomération de Dijon.
Il est vrai que les symptômes grippaux et ceux du covid se ressemblent parfois : toux, fièvre, fatigue, maux de tête, perte de l’odorat ou du goût... Habituellement, les patients savent comment gérer ces maux. Mais, avec le virus qui court, les médecins voient arriver des gens inquiets d’avoir été contaminés par le Sars-cov-2, car ils sont enrhumés, ils ont le nez bouché et disent ne plus sentir et ne plus avoir de goût.
"On a des symptômes grippaux ou des gênes respiratoires ou de l’anxiété tout simplement. Il y a une angoisse qui s’est créée car tout le monde a un peu peur d’attraper cette maladie ou de la donner à quelqu’un. On a créé une peur que le patient contamine une autre personne et on le rend responsable quasiment s’il y a une mort potentielle d’un autre patient et ça c’est une très mauvaise idée", dit Raymond Gauyacq, médecin à SOS 21.
Dans ce climat anxiogène, de nombreux patients veulent systématiquement passer un test covid. "Pendant la consultation, on sent bien qu’il y a une demande de se rassurer ou de rassurer les proches ou l’environnement sociétal", note Raymond Gauyacq.
Reportage de Guillaume Desmalles, Christophe Gaillard et Chantal Gavignet
"Une semaine pour avoir les résultats d'un test, c'est trop long"
Pour déterminer si les patients sont réellement contaminés par le covid, il y a les tests. Mais, comme on peut le faire gratuitement et sans ordonnance, le système est saturé. Cela se traduit notamment par des délais de plusieurs jours pour avoir les résultats.
"Aujourd’hui les délais sont beaucoup trop longs pour avoir les résultats des tests. Du coup, les patients ne savent pas quelle attitude adopter. S’ils avaient la réponse rapidement, je pense qu’ils adhéreraient beaucoup mieux aux mesures de prévention quand ils sont positifs. Actuellement, il y a un flottement et puis il y a un coût économique d’arrêts de travail, d’enfants qui sont retirés de l’école pendant cinq ou six jours. Il faut absolument trouver le moyen de raccourcir les délais, comme au début de la pandémie où c’était de quelques heures en ville à 24 heures au CHU", précise le docteur Emmanuel Debost.
"En ce moment, il y a des délais de rendu très longs", déplore aussi Anne-Laure Bonis, présidente du syndicat de médecins généralistes MG France en Côte-d’Or. "On est à une semaine et pour suivre le virus et le tracer, c’est très embêtant. Donc, si vous n’avez pas de symptômes, n’allez pas vous faire tester sans ordonnance. Je pense que ça rendra service à tout le monde", assure-t-elle. "Il faut demander un avis médical. Consultez si vous pouvez avoir un rendez-vous ou téléphonez, chaque médecin s’organisera pour vous répondre."
Prendre un avis médical, c’est aussi ce que préconise son confrère de SOS 21 : "Dès qu’ils ont des symptômes, on leur conseille de se faire tester, ce qui semble un minimum, surtout s’ils ont des patients à risque dans leur famille, des gens âgés ou des gens fragiles."
Au-delà des tests, tous rappellent aussi que les mesures barrières, le port du masque, la distance sont très importants, "même dans les réunions privées, parce que c’est là que la contamination est la plus grande".