"Grandes oubliées" du Ségur de la Santé, les sages-femmes manifestent leur colère pour la journée des droits des femmes

La date du lundi 8 mars n'a pas été choisie au hasard. A l'appel de plusieurs syndicats, les sages-femmes se sont réunies pour faire part de leur indignation. Elles demandent d'avantage de moyens humains et financiers pour continuer de mener à bien leurs missions. Témoignages recueillis à Dijon. 

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Les sages-femmes déclenchent le " code rouge ". Ce lundi 8 mars, elles sont une cinquantaine à avoir répondu à l'appel de plusieurs syndicats pour manifester leur mécontentement. Neuf mois après le Ségur de Santé, elles estiment en être les grandes oubliées. 

" Quand on choisit un métier comme sage-femme, on le fait par amour des gens "

" C'était important de manifester aujourd'hui, le 8 mars, explique Sylvie (prénom modifié), sage-femme depuis dix ans. C'est la journée des droits de la femme, les sage-femmes sont aussi là pour défendre les droits de la femme. "

Devant la Préfecture de Dijon, les syndicats, CGT et CFDT en tête, demandent une augmentation globale des effectifs, une revalorisation de leur rémunération ainsi que l'amélioration globale des conditions de travail. 

Parmi les manifestants, Bénédicte, drapeau en main, est sage-femme depuis 21 ans. Depuis plusieurs années, elle constate une évolution dans son métier. J'ai senti mon métier changer quand j'ai dû acquérir de nouvelles compétences. Cela s'est vraiment technicisé et complexifié à outrance d'un point de vue administratif. Moi j'ai appris à faire du soin et aujourd'hui on me demande de faire du chiffre, c'est insupportable, raconte celle qui travaille à l'hôpital de Semur-en-Auxois. Quand on choisit un métier comme sage-femme, on le fait par amour des gens, de l'humain et devoir être rentable ce n'est pas acceptable. "

Plus loin, Clémence, 23 ans, et Annaelle, 22 ans, sont étudiantes en quatrième année d'études de sages-femmes. Toutes deux sont venues pour " défendre les droits de leur futur métier. " Après plusieurs stages pratiques au CHU de Dijon, elles constatent déjà les difficultés auxquelles font face leurs collègues et bientôt elles aussi. " Il manque beaucoup de personnel dans les services et on ne peut pas prendre en charge les patientes de manière correcte. Il manque de temps, de matériel... C'est dur la pression qu'il y a sur nos épaules " concède Clémence. 

Annaelle se souvient d'un moment particulièrement révélateur pendant un de ses stages : " Il arrive que deux femmes accouchent dans deux salles différentes et que l'on soit seule pour gérer les deux. On se retrouve à faire l'accouchement d'une patiente qui n'était pas la nôtre car la collègue qui s'en occupait est trop chargée. On ne connait pas la dame et on s'occupe d'elle sur le tard comme ça ! ".

 

" Alors que la charge de travail augmente, le temps consacré aux patients diminue "

Plus qu'un manque de reconnaissance et d'accompagnement dans leur service, les sages-femmes craignent d'être devenues transparentes aux yeux de leurs concitoyens. Après dix ans de métier, Bérénice s'indigne de ce " manque de reconnaissance globale " des sages-femmes en France. " On lutte pour faire connaitre ce métier qui est beau et qui doit être défendu pour continuer d'exister. "

Dans son travail au quotidien au CHU de Dijon, la maïeuticienne dénonce le manque de temps et de moyens : " Il y a une demande croissante de physiologie, d'accompagnement des mamans, des couples mais on n'a pas plus de personnel ni de temps. Alors que la charge de travail augmente, le temps consacré aux patients diminue. À partir du moment où on est frustré de ne pas avoir plus de temps avec nos patientes et que l'on redoute le fait qu'elles nous posent plus de questions parce qu'on n'aura pas le temps d'y répondre, là on se dit que l'on n'est pas satisfaite de notre métier. "

La déception du Ségur de la Santé

Surtout, toutes les professionnelles interrogées estiment que le Ségur de la Santé a accouché d'une souris

" Le Ségur a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, tranche Bénédicte, sage-femme à l'hopital de Semur-en-Auxois. On n'a pas été reconnu par le ministère, cela fait des années que ça dure mais là c'est vraiment trop. Au Ségur on a eu une revalorisation de base, la même que les femmes de ménage et les infirmières. C'est vraiment mépriser nos compétences médicales. Cela dure depuis des années. "

Elle poursuit : " Malheureusement je n'attends presque plus grand chose personnellement. J'espère que cela va bouger mais c'est pas aujourd'hui que ça va bouger. Ca va mettre du temps. "

De son côté, la relève se dit prête. " Il faut être déterminée sinon on ne fait pas ce métier, expliquent Clémence et Annaelle. Tout ce que l'on voit du métier ne nous motive pas vraiment, hormi la passion. On sait ce qui nous attend donc on va y aller. Mais des choses peuvent et doivent s'améliorer et c'est pour cela qu'on est là " concluent les deux étudiantes, déterminées.

 

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