Alors qu'une étude sur la sexualité des Français a été publiée, celle des personnes en situation de handicap reste encore largement ignorée. Pourtant, entre exclusion, contraception forcée et agression sexuelle, il existe encore beaucoup d'inégalités. 3 questions à Nastasia Monchicourt, d'Intimagir Bourgogne-Franche-Comté.
Installé dans la région depuis 2021, le centre de ressource Intimagir Bourgogne Franche-Comté s'adresse aux personnes en situation de handicap, aux professionnels qui les accompagnent ainsi qu'aux aidants. L'objectif pour la structure est de sensibiliser et de répondre aux questions autour de la vie intime, sexuelle et affective, de la parentalité, mais aussi des violences sexistes et sexuelles.
La vaste enquête publiée mercredi 12 novembre par l'Inserm sur les sexualités en France aborde de nombreux sujets, mais ne mentionne pas les personnes en situation de handicap.
Trois questions à Nastasia Monchicourt, responsable d'Intimagir Bourgogne Franche-Comté.
Est-ce qu'on parle assez de la sexualité des personnes en situation de handicap ?
Nastasia Monchicourt : On commence à en parler. Au début des années 2000, c'était très tabou, c'était très peu abordé. Vers 2010, on a commencé à en parler, des formations ont été créées et l'Agence régionale de la santé (ARS) à commencer à financer un certain nombre d'actions pour les établissements qui accueille des personnes en situation de handicap. Les choses bougent, mais il reste encore beaucoup à faire. Il y a encore des structures dans lesquelles les salles de couple n'existent pas. On stigmatise encore beaucoup la sexualité de ces personnes : soit on considère qu'ils n'en ont pas, soit qu'elle est déviante. Jusque-là, c'était un impensé dans les établissements médico-sociaux.
Quelles sont les problématiques principales ?
N. M : Les profils sont tous différents et chaque situation est particulière, mais de nombreuses personnes nous sollicitent parce qu'ils ont du mal à faire des rencontres. Cette thématique revient souvent et on l'explique surtout par le manque d'inclusion des personnes en situation de handicap dans la société. C'est plus difficile pour eux de faire des rencontres et de créer du lien social. L'isolement est un véritablement obstacle.
Les personnes viennent aussi nous voir parce qu'elles ont tout simplement des questions sur la sexualité. Dans ces cas-là, on les redirige vers des sexologues ou des psychologues spécialisés pour qu'ils soient accompagnés au mieux.
Enfin, c'est plus rare, mais on peut être contacté par des personnes victimes d'agression sexuelle au sein de l'établissement de soin qui les accueillent. On va venir les aider pour les sortir de ces situations et trouver des solutions pour que ça s'arrête.
Quels sont les risques ?
N.M : les personnes en situation de handicap sont plus souvent victimes de violences physiques et sexuelles. Elles sont plus vulnérables, que ce soit physiquement ou mentalement. Des personnes qui ont un trouble du spectre autistique vont, par exemple, rencontrer plus de difficulté pour comprendre les intentions de l'autre. D'autres individus ne savent pas ce qui peut être autorisé ou non, ils ne savent pas qu'ils peuvent dire non.
Lors d'un forum, nous avons abordé le sujet du consentement et nous avons eu beaucoup de réactions. Ça prouve que c'est un sujet qui est encore très important.
Bien sûr, nous avons aussi des retours de personnes qui ne rencontrent aucun problème et qui vivent bien leur vie intime et sexuelle. Mais c'est essentiel d'en parler, il faut lever le tabou pour qu'ils puissent avoir droit à une vie sexuelle respectueuse et épanouie.