Un an après l'épisode de gel qui a ravagé les vignobles de Bourgogne, les viticulteurs se préparent à affronter de nouvelles gelées. Cette nuit du dimanche 3 au lundi 4 avril représente un moment fatidique pour la récolte annuelle, alors que le mercure doit chuter en deçà des -2 degrés.
Une nuit blanche pour éviter une année noire. C'est ce qui attend certains viticulteurs entre dimanche 3 et lundi 4 avril. La température doit en effet tomber sous la barre des -2 degrés, voire jusqu'à -5. Un aléa climatique qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices sur les vignobles bourguignons.
À Puligny-Montrachet (Côte-d'Or), sur la côte de Beaune, Jean-Michel Chartron a ressorti les bougies antigel. Gérant du domaine éponyme, il a été durement touché par le catastrophique épisode de gel d'avril 2021. La moitié de la récolte avait alors succombé au froid.
"On a rallumé les bougies la nuit dernière [entre samedi et dimanche]", raconte-t-il. "Pour l'instant, on n'a pas de dégâts... Mais si au petit matin, on a un ciel bleu comme annoncé, et pas de couverture nuageuse pour réduire la déperdition de chaleur, ça risque d'être difficile."
Pour l'instant, pas besoin de protéger toutes les parcelles. Une météo moins avenante que l'an passé a permis d'éviter un débourrement trop précoce. "On ne protège que les vignes situées sur les côteaux, ce sont celles qui sont le plus en avance donc le plus en danger. En-dessous de la colline, il n'y a pas encore lieu de protéger."
Au moins 300 bougies sont nécessaires pour protéger un hectare. À 9€ hors taxes la bougie, a minima, l'installation de ce dispositif représente un coût certain.
"S'il faut allumer des bougies toutes les nuits pendant 10 nuits, je vous laisse imaginer l'impact financier", déplore Jean-Michel Chartron.
"On ne peut simplement pas se le permettre"
Cet impact financier, certains viticulteurs l'ont jugé trop élevé pour continuer de protéger leurs cultures. C'est le cas de Christophe Ferrari, vigneron à Irancy, dans l'Yonne.
En 2021, ses récoltes ont été détruites à 80% par les gelées. En 2020, c'étaient déjà 60% de sa production qui s'envolait, et en 2019, 35%. Résultat, il n'a "plus beaucoup de vin à vendre".
Avec le peu de récoltes qu'on a, les protections sont trop chères, trop dures à rentabiliser.
Christophe Ferrari, vigneron dans l'Yonne
"L'installation de bougies nécessite beaucoup de main d'œuvre", poursuit-il. "C'est de la main d'œuvre qu'il faut payer en heures supplémentaires. S'il faut le faire une dizaine de jours, on ne peut simplement pas se le permettre."
Autre système de protection : les câbles chauffants. Mais là encore, cet équipement est bien trop onéreux : entre 120 et 150 000 euros par hectare, selon le producteur.
Une lueur d'espoir subsiste malgré tout. La production de Christophe Ferrari se compose pratiquement à 100% de pinot noir, un cépage actuellement moins développé que les aligotés par exemple.
"Ce n'est pas encore vraiment sorti", se réjouit-il. "La situation est saine aujourd'hui. On espère qu'on ne revivra pas l'année dernière. On croise les doigts, mais pour le moment je reste optimiste !"