Jugés pour avoir torturé, éventré et tué deux chèvres : "un spectacle bien moche"

Loïc, un jeune majeur, comparaissait en correctionnelle à Dijon ce 14 juin pour avoir participé, avec quatre mineurs, à des actes de torture sur deux chèvres près de Selongey (Côte-d'Or) en juillet 2022.

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► Cet article relate des faits pouvant heurter la sensibilité des lecteurs.

"C'est un dossier qu'on n'a pas envie d'ouvrir, quand on voit ce qui vous est reproché", entame la présidente du tribunal. Ce mercredi 14 juin à la chambre correctionnelle de Dijon était jugé Loïc D., tout juste 19 ans, habitant de Selongey (Côte-d'Or) pour des "sévices graves ou actes de cruauté envers un animal domestique, ayant entraîné la mort". Et les détails sont glaçants. 

Un préservatif retrouvé dans le corps d'une des chèvres

Le 22 juillet 2022, Théo T., jeune agriculteur, est averti que ses quatre chèvres sont en divagation. Il ne les utilise pas pour l'élevage, ce sont ses animaux de compagnie. "Très affectueuses, encore plus que des chats", dit-il. Son terrain est situé à Rivière-les-Fossés, à la frontière de la Haute-Marne et de la Côte-d'Or.

En arrivant sur place, il trouve l'enclos cassé et trois de ses chèvres. La quatrième est morte dans un fossé. "Elle est en sang avec des blessures à coups de fourche, des plaies à l'abdomen. Un spectacle bien moche, hein, on peut le dire comme ça", assène la présidente du tribunal. 

C'est un premier choc pour le jeune agriculteur, mais ce sera pire le lendemain. À l'aube, il retourne voir ses trois chèvres survivantes. Il trouve à nouveau la porte de l'enclos ouverte. Et une seconde chèvre, morte, à 20 mètres de l'enclos.

"On retrouve sur place un couteau ensanglanté, un manche de marteau. La chèvre a été éventrée, elle a une corne sectionnée", liste la présidente. Détail effarant : un préservatif (apparemment non utilisé) est retrouvé dans les viscères de la chèvre éventrée.

Confondus... grâce aux réseaux sociaux

L'enquête aurait pu rester au point mort, comme d'autres affaires de sévices sur des animaux - on pense notamment aux cas de chevaux mutilés qui continuent. Mais dans cette affaire, les auteurs ont été facilement retrouvés, explique la présidente.

"On vous retrouve parce que des gens vous mettent en cause pour vous être vantés de vos exploits sur les réseaux sociaux, pour les chèvres et aussi pour le vol du véhicule." [Le groupe de jeunes, qui n'a pas le permis, avait en effet subtilisé un Citroën Berlingo appartenant à leur entourage pour se rendre sur les lieux.] L'un des mineurs, Mickaël, dit avoir "tué une chèvre". La présidente rappelle à Loïc "un message où vous dites avoir fini la chèvre pour qu'elle ne souffre pas".

Marteau, poing américain, couteau, fourche

Interpellés et interrogés, les mineurs mis en cause donnent leurs versions aux enquêteurs, puis au tribunal pour enfants où ils ont été jugés en mars. Loïc D. étant l'unique majeur, il comparaît seul ce 14 juin en correctionnelle. 

La présidente reprend les déclarations des autres. "Le premier soir, vous étiez trois dont deux mineurs. Ils indiquent que l'un a planté la chèvre avec la fourche, l'autre avec un piquet. Le deuxième soir, vous êtes revenus avec deux filles mineures en plus. Les deux filles participent et torturent la chèvre. Vous, vous dites qu'à la fin, vous lancez la fourche sur la chèvre pour l'achever."

Dans le détail, les sévices sont atroces : coups de marteau, coups de poing américain, coups de couteau, coups de piquet... 

"Ensuite, vous avez roulé avec le Berlingo sur la chèvre, "pour faire le malin", comme vous direz aux enquêteurs. Qu'avez-vous à en dire maintenant ?"

questionnne la présidente.

Ce 14 juin, Loïc minimise sa responsabilité : "Je n'ai pas participé, je les ai juste achevées comme mon père m'a appris à la chasse, en les plantant dans le coeur", affirme-t-il.

Il charge ses complices : "Au début c'est Jérémy qui a eu l'idée, il voulait en tuer une pour la manger", déclare-t-il face au tribunal. Le deuxième jour, il affirme que les filles "voulaient juste aller voir les chèvres", à la base. Pourquoi ne s'est-il pas interposé lorsqu'il a vu la troupe commencer à torturer les animaux ? "J'étais bouche bée." Il accuse l'une des filles, Enola, d'avoir porté les coups qui ont éventré la deuxième chèvre.

Les explications du prévenu convainquent peu la juge, le procureur, et la partie civile. Loïc D. jure qu'il a ressenti "du dégoût" mais affirme qu'il a joué un rôle moindre, que les mineurs le "chargent". "Pourtant, au tribunal pour enfants, les mineurs ont dit que c'était vous, le meneur", rétorque David Cabannes, l'avocat de l'agriculteur.

"Pendant l'audition, vous dites que les chèvres ont crié. Ça veut dire quoi ?"

questionne David Cabannes, l'avocat de l'agriculteur.

"Elles ont eu mal", marmonne Loïc.

"Elles ont eu mal, oui", assène l'avocat. "Vous dites que vos complices ont éventré la chèvre et qu'ils ont "mis des capotes dans la chèvre". Vous feriez quoi si ils faisaient pareil sur votre chat ?"

Réponse du prévenu : "Ce sont des mineurs. Je n'ai pas le droit de les toucher." Loïc ne donnera pas vraiment d'explications plus poussées.

Les chèvres étaient ses "bébés"

Théo, le propriétaire des chèvres, silencieux et concentré pendant les débats, prend la parole à son tour. "J'ai de la haine", déclare-t-il. 

"Je sais que je ne devrais pas dire ça, mais si je les avais trouvés sur le coup, j'aurais eu un fusil, je les aurais tués."

Théo

propriétaire des chèvres

Il raconte qu'il a sauvé ses quatre chèvres de l'abattoir. "Je n'ai pas d'enfants. Je les considère comme mes bébés." Les deux chèvres survivantes sont, selon lui, "traumatisées".

Le procureur requiert contre Loïc 15 à 18 mois de prison avec sursis probatoire. Après décision du tribunal, Loïc écope de deux ans de prison assortis d'un sursis simple.

► Cette affaire de torture sur animaux n'est pas sans en rappeler une autre, récente, jugée au même tribunal correctionnel de Dijon. Trois semaines plus tôt, deux jeunes de 19 et 20 ans ont été condamnés pour avoir massacré des moutons à coups de couteau

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