Législatives 2024 : "Je ne connais pas son programme mais je vote pour lui", comment les réseaux sociaux influencent-ils les votes des jeunes ?

Les réseaux sociaux sont devenus un outil de communication à part entière, et les politiciens l'ont bien compris. Compte Instagram et TikTok aux centaines de milliers d'abonnés, vidéos courtes comptabilisant des millions de vues: la politique 2.0 est en place.

Les jeunes s'informent principalement sur les élections via les réseaux sociaux. Comment sont-ils influencés par cette nouvelle communication ? Nous avons posé la question aux étudiants de l'université de Bourgogne, à Dijon.

"Des jeunes ont voté Bardella juste parce qu'il est beau et qu'il fait des vidéos TikTok"

"Je pense que les jeunes qui votent pour la première fois sont influencés par les réseaux, moi par exemple j’ai vu beaucoup de vidéos du Rassemblement national sur les applications", témoigne Justine, 19 ans, en bac ST2S et électrice du RN.

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Les réseaux sociaux fonctionnent avec des algorithmes. Sur Tiktok, Instagram ou X, plus l'on passe de temps sur des publications, plus l'application propose des contenus du même type. Si par exemple, on s'arrête sur de nombreuses vidéos de chats et qu'on les regarde en entier, Tiktok va proposer encore plus de vidéos de félins. C'est la même chose avec les contenus politiques.

Et à force de voir quelque chose, on s'y intéresse. "Les réseaux ont une certaine influence : quand tu vois une personne de façon récurrente, tu commences à t'y intéresser", indique Valentin 19 ans, en classe préparatoire de physique chimie au lycée Carnot.

Sur les réseaux, les contenus qui marchent le mieux sont des vidéos courtes, avec un rythme rapide, qui restent dans la tête. "TikTok, ça a une influence réelle, les gens publient des montages rapides sur les politiciens qui ont un impact psychologique, c'est dangereux. On manipule les gens", estime Anna, apprentie à l'institut Agro Dijon.

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"Il y a des jeunes qui ont voté Bardella juste parce qu'il est beau et qu'il fait des vidéos TikTok", s'insurge Lina, étudiante en administration économique et sociale. "Dans ces vidéos, on ne voit qu'un jeune homme charismatique, qui mange des bonbons et joue à Call of Duty", regrette Martin, étudiant en administration économie et sociale.

"Tous les médias prennent parti" ?

Sur la trentaine d'étudiants de l'université de Bourgogne que nous avons interrogés, X (anciennement Twitter) est l'outil le plus utilisé pour s'informer sur les élections européennes et législatives ainsi que sur les programmes des partis politiques. Viennent ensuite les autres réseaux, comme Youtube, Instagram ou Tiktok.

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Les médias ne sont plus plébiscités pour se renseigner. La raison ? Un climat de méfiance s'est installé. Lubin, étudiant en classe préparatoire de littérature, explique que, selon lui,"tous les médias prennent parti, c'est compliqué de savoir ce qu'on nous dit et on ne sait plus qui croire".

Même son de cloche pour trois apprentis de l'institut Agro Dijon : "On en parle entre nous, les médias ne sont plus neutres et fiables."

"Les gens sont influencés par les réseaux, sans savoir le programme"

On peut dire ce que l'on veut sur les réseaux sociaux. C'est la promesse de ce genre d'outil de communication. Pas de limitation de temps de parole contrairement aux médias : les politiciens sont libres de s'exprimer sur leurs programmes. 

C'est également le moyen pour eux d'aller chercher un électorat jeune qui ne regarde pas forcément la télévision, mais qui est présent sur les réseaux.

À titre de comparaison, le débat télévisé entre Gabriel Attal et Jordan Bardella le 23 mai sur France 2 a réuni 3,61 millions de téléspectateurs. Certaines vidéos du président du RN, sur Tik Tok, comptabilisent plus de vues. Et de nombreuses personnes se renseignent via ces contenus : "Je m'informe principalement sur les réseaux, en regardant les vidéos des différents partis", révèle un étudiant du lycée privé Les Arcades, à Dijon.

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Ce qui inquiète la jeunesse dijonnaise, ce sont justement ces individus qui s'informent seulement sur les réseaux : "Les gens sont influencés par les réseaux, sans savoir le programme", déplore Martin, étudiant en licence administration économie et sociale.

"Les politiciens le savent"

Tsiory, étudiante en droit, rajoute que selon elle, "il y a une désinformation des jeunes, ils ne regardent que les réseaux et ne connaissent même pas le programme".

TikTok, c'est de la propagande et de la désinformation. C'est sûr que certains ont voté RN parce qu'ils trouvent stylées les vidéos TikTok sur Bardella.

Étudiante en pharmacie

Outre les contenus des politiciens, une nouvelle mode est arrivée sur les réseaux, les "édits". Créées par des comptes privés, ces vidéos sont là aussi courtes avec un rythme rapide, et mettent en valeur les hommes et femmes politiques.

Cette vidéo comptabilise 134 200 vues, 11 500 likes et 168 commentaires. Parmi les commentaires, on peut retrouver des messages de ce genre : "Je ne connais pas son programme, mais je vote pour lui."

Simple blague ou réalité ? Pour Omar, étudiant à l'université de Bourgogne, ces cas existent : "J'en parlais avec une fille de ma classe, je lui demandais pourquoi elle votait Bardella, elle m’a dit que c'est parce qu'il est beau."

Ces vidéos existent aussi pour les autres partis. Certaines mettent en valeur François-Xavier Bellamy (LR) Raphaël Glucksmann (PS) ou encore Manon Aubry (LFI). 

Ces vidéos pullulent maintenant sur les réseaux. Jusqu'à influencer le vote des électeurs les plus jeunes ? Emma, en master biologie synthétique, le pense : "Sur les réseaux, les jeunes les plus modulables peuvent être influencés par ces édits, ils se disent que la personne est stylée."

Un avis partagé par Lola, étudiante en droit : "Les gens ne lisent pas les programmes, ils regardent juste les TikTok. Les politiciens le savent, ils s'en rendent compte et ils sont bien plus présents sur les réseaux."

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Certaines personnes sont tout de même plus réservées quant à cette présumée influence : "Personnellement, je remets en question tout ce que je vois. Les réseaux ne vont rien changer pour moi, mais certainement ça peut influencer", suppose Lubin.

De plus, parmi les consommateurs de ce genre de vidéo, tous n'ont pas l'âge de voter. 30 % de la communauté TikTok en France aurait moins de 18 ans.

Problème sociétal ou bien simple nouveau moyen de communication pour les politiques ? Ces vidéos soulèvent en tout cas de nombreuses interrogations chez les étudiants en Bourgogne.