Une proposition de loi visant à mieux prendre en charge les sinistrés des sécheresses estivales a été adoptée début avril par l'Assemblée nationale. Pour l'association les Oubliés de la Canicule, le texte va dans le bon sens même s'il reste améliorable.
Il y a un mois, lorsque nous vous parlions d'elle, Josette était désespérée. Cette habitante de Chaume-et-Courchamp, dans le nord-est de la Côte-d'Or, vivait depuis trois mois dans une roulotte. Fin 2022, sa maison avait en effet été déclarée inhabitable à cause de fissures au plafond, au sol et sur les murs, nées des sécheresses estivales successives. "Ma vie s'est arrêtée", déclarait-elle alors à France 3 Bourgogne.
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Mais en cette mi-avril, une lueur d'espoir lui est désormais permise. Le 6 avril dernier, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi portée par l'écologiste Sandrine Rousseau, "visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait‑gonflement de l’argile".
Le texte, qui doit encore être validé par le Sénat, prévoit plusieurs mesures en faveur de l'indemnisation des sinistrés. De quoi réjouir Josette - "Ça ne peut être qu'un bien", sourit-elle ce 19 avril - comme l'association les Oubliés de la Canicule, qui accompagne des centaines de personnes dont les maisons ont été fissurées par la sécheresse.
Faciliter le chemin de croix
Ce contre quoi bataillait l'association, c'était justement la difficulté pour les sinistrés d'arriver à obtenir une indemnisation. "Pour que le sinistre soit considéré, il faut faire partie d'une commune qui a obtenu un arrêté ministériel de catastrophe naturelle sécheresse", explique Yves Moalic, référent en Côte-d'Or du collectif. "C'est déjà un gros défi : ça met en général un an pour que cet arrêté soit pris - quand il l'est."
"Très souvent, l'expert mandaté par l'assurance trouve d'autres causes déterminantes aux dégâts, qui ne sont pas la sécheresse, malgré l'arrêté qui frappe la commune."
Yves Moalic,référent en Côte-d'Or des Oubliés de la Canicule
L'arrêté pris, les sinistrés doivent ensuite prendre contact avec leur assureur. "C'est là que les difficultés commencent. Très souvent, l'expert mandaté par l'assurance trouve d'autres causes déterminantes aux dégâts, qui ne sont pas la sécheresse, malgré l'arrêté qui frappe la commune. Les sinistrés peuvent alors demander une autre expertise, mais ça peut être compliqué pour ceux qui n'ont pas les moyens", poursuit Yves Moalic.
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Or, la proposition de loi contient justement une mesure visant à pallier cette éventualité. "L’expertise pouvant être demandée par l’assureur [...] doit obligatoirement contenir une étude de sol vérifiant que les fondations des constructions sont adaptées aux caractéristiques du sol", est-il ainsi précisé dans l'article 2. L'assuré peut par ailleurs lui-même demander cette expertise... qui, si la loi est adoptée telle quelle, devra être prise en charge par l'assureur.
"Si cette loi va jusqu'au bout, c'est une bonne chose"
Autre avancée pour les sinistrés : le fait que l'aggravation de fissures déjà existantes pourra donner lieu à une indemnisation. "C'est une bonne loi", assure Yves Moalic. "Si elle va jusqu'au bout, ce qu'on espère, c'est une bonne chose. Mais elle ne résout pas tout." L'association pointe notamment "l'indemnisation vénale des dégâts" qui varie "en fonction de la valeur territoriale. Dans un département où l’immobilier est cher, ce n'est pas pareil que dans les départements où l’immobilier n’est pas cher. On demande que ça change."
Pour rappel, la proposition de loi a été adoptée à l'Assemblée avec 115 voix pour et neuf voix contre. Le texte a notamment été critiqué par la majorité présidentielle, qui estime qu'il va "augmenter les primes d'assurance, au détriment des assurés" et "allonger les délais d'indemnisation".