En Bourgogne Franche-Comté, entre 7% et 10% des naissances sont dites prématurées. Les bébés de moins de 34 semaines et dont le poids est inférieur à 1,8kg sont alors nourris avec du lait maternel. Quand la maman ne peut pas fournir ce lait, l'hôpital fait appel à des donneuses. Grâce à cela, des vies sont sauvées tous les jours.
“Coucou mon ange.” Quand Marion Pes se penche sur la couveuse, ses yeux sont humides, elle a du mal à contenir ses émotions : “c’est magique, je viens la voir tous les jours”, précise t-elle tout en caressant la petite main de Cléa. Sa fille est considérée comme une grande prématurée. Elle est née au bout de 28 semaines et pesait seulement 1 kilo et 245 grammes. Des tuyaux sortent de son petit nez. Elle est endormie et semble apaisée.
Je pouvais donner un peu de lait mais pas en quantité suffisante pour qu’elle puisse manger toute la journée
Marion, maman de la petite Cléa
Si, aujourd’hui, elle a repris des forces, les débuts ont été difficiles. Lorsque l’accouchement a été déclenché, Marion ne pouvait pas fournir de lait maternel. “Mon corps n’était pas prêt à ce qu’elle sorte immédiatement.. En attendant, ici on lui donnait du lait féminin d’une autre donneuse ou de plusieurs donneuses” explique cette jeune maman.
La petite Cléa est hospitalisée depuis quelques semaines au service néonatologie du CHU de Dijon. Elle est encore alimentée par sonde et un pousse-seringue électrique. C’est grâce au Lactarium de l’hôpital qu’elle a pu retrouver des forces les premiers jours.
“J’ai trouvé ça magnifique dans le sens où il y a d’autres femmes qui ont donné ce lait-là pour mon bébé, et moi je trouve ça beau”. Marion n’est pas venue seule. Nicolas, le papa, observe avec fierté sa fille. Une infirmière lui propose de faire un peau à peau (ndlr : une pratique qui consiste à placer le bébé contre la peau nue d’un des parents) “Elle a bien grandi, bien grossi, c’est une belle poupette”. Derrière le masque, on devine un immense sourire qui accompagne les petits miaulements du nourrisson aujourd’hui hors de danger.
Un geste simple et vital
Les études scientifiques ont démontré que le meilleur lait pour ces nouveau-nés est en priorité le lait maternel. Riche en nutriments, il est aussi plus facile à digérer. “Quand ils naissent très prématurés, il faut le temps que l’estomac se mette en route donc du coup c’est tout bénéfique pour eux” explique Emeline Gavignet, infirmière puéricultrice en réanimation néonatale au CHU de Dijon. Cela agit presque comme un médicament.
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Face à ce genre de défi vital qui survient tous les jours, le CHU de Dijon a lancé un appel aux dons de lait maternel. Un geste simple au profit des nouveau-nés les plus vulnérables. Dans une autre chambre, si Marion Petit est assise sur un fauteuil avec Victoria posée sur son ventre, cela n’a pas toujours été si paisible. “Elle est née à 740 grammes et aujourd’hui elle pèse 1,870 kilo” sourit la maman de 37 ans. La petite est arrivée avec trois mois d’avance par rapport au terme. “Ici elle est entre de bonnes mains”
C’est aussi grâce au lait maternel d’autres femmes que Victoria va bien. Même si les dons sont anonymes, Marion tient à les remercier : “Ce sont des petits anges gardiens. Le lait maternel c’est quand même très important, c’est le meilleur. En quelque sorte ça lui a sauvé la vie”, conclut-elle avant de redresser la tête de son bébé encore fragile.
Éviter de jeter le lait maternel
Le Lactarium du CHU de Dijon est le seul dans toute la région Bourgogne Franche-Comté. Il collecte chaque année 2500 litres de lait féminin et s'appuie sur un réseau de 450 donneuses. Des mamans allaitantes dont les bébés ont moins de 12 mois.
C’est le cas de Coline Dell Ova. A 27 ans, cette Dijonnaise est l’heureuse maman d’une petite Mélodie. A sa naissance, tout s’est bien passé et depuis elle continue de nourrir sa fille avec son lait maternel. Les jours où elle est à la crèche, elle utilise un tire-lait pour fournir des biberons. Mais le surplus, elle a décidé de le donner.
A la crêche ils n'utilisaient pas tout, du coup c'était du lait jeté
Coline Dell Ova, donneuse de lait maternel
“Je tire en moyenne 600 ml par semaine et quand j’ai presque deux litres dans le congélateur, j'appelle le Lactarium”, explique Coline. Une collectrice vient alors à son domicile récupérer le lait et lui fournit des biberons stériles pour une prochaine collecte. “De savoir que ça va servir à nourrir des petits bébés qui ne peuvent pas boire autre chose que du lait de maman c’est vrai que ça fait plaisir"
Ce jour-là c’est Sylvie Parisot, qui se charge de prendre les biberons pleins. Les deux femmes prennent le temps d’échanger quelques minutes. “Parfois j’ai des mamans qui me disent, je ne savais pas que c’était possible. On entend beaucoup parler du don du sang, alors que le don de lait, jamais”, souffle Sylvie, qui était aide soignante avant de devenir collectrice pour le Lactarium de Dijon.