Cinq agriculteurs de la Confédération paysanne, dont un Haut-Saônois, ont été violemment interpellés à Paris, le 5 décembre. Réunis devant la préfecture du Doubs ce 7 décembre 2024, les membres du syndicat dénoncent un "deux poids deux mesures" dans le traitement des manifestations paysannes.
"Quand les calmes se bougent, c'est que la situation est grave". La coupe est pleine pour Laurence Lyonnais, porte-parole de la Confédération paysanne dans le Doubs. Le syndicat agricole a manifesté à Besançon et dans d'autres villes de France, ce samedi 7 décembre.
"On souhaite que les autorités fassent remonter nos mécontentements", explique-t-elle devant la préfecture de Besançon. Mécontentements au pluriel car selon Laurence Lyonnais, "la démocratie a été bafouée à plusieurs niveaux" ces derniers jours.
Cinq interpellations violentes à Paris
Il y a d'abord eu ces interpellations d'agriculteurs, à Paris. Jeudi 5 décembre, lors d'un rassemblement dit "pacifique" contre la spéculation sur les produits agricoles organisé devant Grand Palais à l'occasion d'une réunion d'opérateurs du négoce des céréales, cinq manifestants ont été interpellés par les forces de l'ordre.
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L'un d'eux est paysan-boulanger à Cornot, en Haute-Saône. Traîné par les pieds sur plusieurs mètres par les officiers de la brigade de répression de l'action violente motorisée (BRAV-M), Toussaint Lamy a passé "une trentaine d'heures" en garde à vue, avant d'être libéré vendredi sans être inquiété.
"C'était une manifestation calme. Des banderoles, des chants, des discours..." raconte-t-il dans le train, en chemin pour retrouver sa famille, ce samedi.
Les forces de l'ordre nous ont mis en nasse. La BRAV-M est arrivée. Ils sont venus chercher cinq personnes violemment. Je n'ai toujours pas compris pourquoi j'ai été choisi. Comme j'ai opposé de la résistance à mon interpellation, j'ai été traîné sur le sol sur une dizaine de mètres. Lunettes cassées, vêtements arrachés. Pas de blessure mais c'est tout de même traumatisant.
Toussaint Lamy, agriculteur en Haute-Saône
"Ailleurs, l'Etat laisse faire"
Comme Toussaint Lamy, deux manifestants ont été libérés le lendemain, vendredi 6 décembre. Tandis que deux autres, un homme et une femme, sont déférés devant le juge, en comparution immédiate ce samedi. Premières en date depuis la reviviscence du mouvement de protestation des agriculteurs en novembre, ces interpellations ont choqué la Confédération.
"Ce qui est évidemment choquant, c'est le deux poids deux mesures appliqué vis-à-vis des mobilisations agricoles. (...) La Confédération paysanne est réprimée alors qu'ailleurs, l'Etat laisse faire des actions de dégradation et d'intimidation"
Appel à manifester de la Confédération paysanne
En creux, le syndicat fait allusion aux actions de la FNSEA et des Jeunes Agriculteurs. Dont certaines, récentes, ont consisté à déverser du fumier devant les permanences des députés ayant censuré le gouvernement Barnier. Ce n'est ni la ligne, ni la stratégie de la Confédération d'après Laurence Lyonnais. "On n'a pas vocation à faire pression sur des sujets électoralistes".
🔴 Après avoir fait évacuer l’esplanade du Grand Palais, les forces de l’ordre nassent les agriculteurs et procèdent à des interpellations violentes.
— Le Média (@LeMediaTV) December 5, 2024
5 participants ont déjà été interpellés. pic.twitter.com/86BGFGOLuO
Des membres du parti Europe Ecologie les Verts (EELV) ont rejoint le rassemblement. Co-secrétaire régional du parti, Philippe Chatelain regrette que "ceux qui défendent le vivant et donnent une chance à nos enfants d’habiter une terre à peu près supportable soient mis en garde à vue" quand "la police regarde et laisse faire les manifestants qui attaquent les permanences d'élus et d'associations pro environnement".
Inquiétudes quant à l'accord UE-Mercosur
En réunion avec les représentants du préfet, Laurence Lyonnais de la Confédération Paysanne a demandé à ce que "lumière soit faite sur la chaîne de commandement" policière qui a conduit à ces interpellations.
Autre sujet de discussion en préfecture : la récente signature de l'accord UE-Mercosur par la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen. Un accord de libre-échange auquel l'Assemblée nationale française s'était pourtant opposée et qui suscite une vive inquiétude dans le monde paysan.
"On nous a assuré faire remonter nos revendications, sans garantie que des réponses redescendent", a confié, sans trop d'espoir, Laurence Lyonnais en sortie de réunion. Contre ce traité et pour une "égalité de traitement entre les manifestants", la Confédération paysanne annonce se mobiliser les prochaines semaines.