Alors que le quartier de Planoise est sous tension en raison de l'explosion de la violence due aux règlements de compte sur fond de trafics de drogue, de nouveaux tirs ont été entendus dimanche soir rue de Fribourg. Deux suspects ont été arrêtés.
De nouveaux tirs ont été entendus dimanche soir 4 septembre aux alentours de 22h30 au niveau de la rue de Fribourg, dans le quartier Planoise à Besançon. C'est à cet endroit que se trouve l'un des plus importants points de deal du quartier pour lequel s'affrontent plusieurs bandes responsables du trafic de drogue.
Il s'agirait "d'un tireur sur un scooter sans plaque et de deux individus qui auraient fait feu en direction de deux autres individus qui ont pris la fuite" selon le procureur de Besançon Etienne Manteaux et la description faite par un témoin de la scène à la police. Les policiers ont réussi à retrouver le scooter grâce aux vidéos de surveillance placées à divers endroits sur le chemin de fuite des deux hommes de 20 ans, dont l'un d'eux était porteur de 6000 euros en liquide et de 100 grammes d'héroïne. Ils ont finalement été interpellés rue Madeleine Bres, dans le quartier des Tilleroyes. "Le suivi de véhicule a suivi environ 17 minutes, 17 minutes de tension très importante" a détaillé Yves Cellier, directeur départemental de sécurité publique (DDSP).
"Il est trop tôt pour dire si les deux jeunes majeurs sont bien les auteurs de ses tirs. Il y a une forte probabilité puisque les signalements précis correspondent aux deux individus interpellés 30 min plus tard" confirme Etienne Manteaux. L'un des deux individus interpellés "était en évasion" et déjà lourdement condamné par le passé. "Il bénéficiait d’une permission de sortie, à la maison d’arrêt de Chalon-sur-Saône" précise le procureur de la République.
Les deux individus ont-ils un lien avec les tirs survenus quelques jours plus tôt ? L'enquête en cours, qui s'avère complexe comme à chaque fois dans ce genre d'affaires, devrait permettre de le dire.
Le troisième mort à Planoise
Quelques heures plus tôt, l'annonce du décès de l'adolescent de 15 ans gravement blessé le 29 août après avoir été visé de plusieurs balles a provoqué une onde de choc dans le quartier. Le jeune homme était-il guetteur sur ce point de deal ou est-il une deuxième victime collatérale des trafiquants de drogue à Besançon ? Pour l'instant, difficile d'en avoir la certitude même s'il s'avère que l'adolescent était défavorablement connu des services de police.
Pour rappel, une personne, totalement étrangère au trafic de drogue, avait été sauvagement tuée par balles le 8 mars 2020 par l'une des bandes rivales se partageant les points de deal. Un autre jeune de 17 ans avait également été abattu en mai 2020. Le procès d'une partie du clan de “La Tour de Fribourg”, l’un des groupes engagé dans le trafic de drogue à Besançon a eu lieu en juin 2022.
"On ne peut pas rester comme ça, c'est pas possible"
Ce lundi matin, l'inquiétude se fait sentir dans les rues de ce quartier populaire de 30 000 habitants. Le mot "peur" est sur toutes les lèvres. "C’est vraiment très tendu dans le quartier. Là franchement, on le sent. La vie est complètement différente" nous confie un habitant de Planoise alors que la violence s'est accrue depuis maintenant plusieurs années. "C’est sûr qu’il va se passer quelque chose" craint-il.
"On a peur pour nous, pour les enfants. On n'est pas en sécurité ici. J'ai deux garçons, c'est compliqué. Ils sont petits mais j'ai peur quand même" témoigne une habitante. "Se dire qu'on vient travailler alors qu'il y a des coups de feu en pleine journée... On a peur des balles perdues" confirment également des pharmaciennes qui travaillent aux abords de la rue de Fribourg.
Jamal-Eddine Loukhiar, habitant et natif du quartier de Planoise siège de manière indépendante au conseil municipal de Besançon. Il connaît bien les problématiques de son quartier. Selon lui, il est urgent d'agir. La répression est indispensable mais il faut absolument travailler sur la reconstruction du lien social. "Il y a une cassure totale" précise-t-il.
On a besoin de travailler avec les gens du quartier. Il faut redonner de la confiance aux familles.
Jamal-Eddine Louhkiar, habitant de Planoise et élu au conseil municipal
Il développe : "On a peur. Tout le monde a peur. On peut tous être au mauvais endroit. Ce matin, un papy disait qu'il avait tellement peur que le soir il rentre dormir chez son fils. C'est dramatique d'avoir cette boule dans l'estomac, d'avoir cette peur d'être touché. Tout le monde est responsable, il faut une prise de conscience de chacun. Il faut que les institutions mettent les moyens. On ne peut pas rester comme ça, c'est pas possible. Je ne reconnais pas le Planoise dans lequel j'ai grandi."
Sur les réseaux sociaux, la maire de Besançon a présenté ses condoléances à la famille de l'adolescent. "Nous avons peur pour nos familles sur place, c'est un problème qui dure depuis des années, nous ne voulons plus de tweet de condoléances.... Nous voulons la sécurité pour nos familles !" a réagi une internaute.
Yves Cellier, directeur départemental de sécurité publique (DDSP), a précisé que finalement la brigade spécialisée dans les violences urbaines n'était pas arrivée jusqu'à Besançon, contrairement aux annonces du début de semaine.
"Des CRS sont bien arrivés lundi soir mais sont repartis mardi matin. On utilisera notre propre ressource qu'on organisera pour pouvoir densifier la sécurisation sur le secteur de Planoise" a-t-il détaillé, précisant que les déploiements de moyens sont décidés au niveau de l'exécutif, donc de la préfecture du Doubs.