À l'occasion de la journée mondiale du don d'organes et de tissus, jeudi 17 octobre, intéressons-nous à l'évolution de cette pratique. En 2023, le taux d'opposition au don d'organes et de tissus a augmenté en France. Pourquoi ?
En 2023, le taux d'opposition au don d'organes et de tissus était de 36,1 % pour les patients décédés en France de morts encéphaliques. Un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes puisque le taux d'opposition était de 33 % en 2022 et 30 % en 2018. Pour Florine, infirmière en charge de la coordination des prélèvements d'organes et de tissus au CHU de Besançon dans le Doubs, les explications sont multifactorielles.
"Dans une enquête d'opinion, [publié en janvier 2024 par l'Agence de biomédecine], 80 % des gens interrogés se disent favorables au don, donc on devrait avoir un taux d'opposition de 20 %", souligne la soignante. Problème : l'enquête révèle de nombreuses fausses croyances entourant le don d'organes et de tissus.
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Une méconnaissance du don d'organes et de tissus
Seuls "24 % des Français savent que les organes de don prélevés ne servent pas à la science, mais uniquement à sauver des vies", note Florine. Il y aurait donc une confusion entre les dons d'organes et de tissus et le don de son corps à la science.
"Certains croient aussi que la personne n'est pas décédée lorsqu'ils voient leur proche en réanimation avec une ventilation artificielle. Il n'a pas l'aspect de quelqu'un de décédé donc ça peut être difficile de comprendre", explique l'infirmière. "C'est à nous de les accompagner", ajoute-t-elle.
D'autres facteurs peuvent aussi entrer en compte, comme l'attachement aux valeurs religieuses et traditionnelles. "Beaucoup pensent que s'il y a dons d'organe, ils ne vont pas pouvoir réaliser leur rite funéraire comme d'habitude." Pourtant, les prélèvements d'organes et de tissus ne retardent pas les obsèques et la chirurgie se réalise avec autant de précautions et de soins que sur une personne vivante.
Le corps est respecté. On est garant du fait que quand le défunt est au funérarium, on ne voit pas qu'il y a eu un prélèvement de dons d'organes ou de tissus. Il a le même aspect que tout défunt.
Florine, infirmière de la coordination des prélèvements d'organes et de tissus à l'hôpital de Besançon
Pour Florine, la méfiance du système de santé et le déni de la mort joue aussi dans les refus.
Le principe du "consentement présumé"
Lors du décès par mort encéphalique, les soignants cherchent à connaître le souhait de la personne décédée. En France, le principe de "consentement présumé" s'applique : chacun est considéré comme donneur d'organe sauf si, de son vivant, la personne s'est inscrite sur le Registre national des refus.
"Quand le décès est déclaré par les médecins, nous, on a obligation de consulter le registre national des refus pour voir si la personne s'est inscrite sur ces registres. Si c'est le cas, on ne va pas continuer la procédure de don", explique l'infirmière.
Si la personne décédée n'est pas inscrite sur ce registre, les soignants vont se tourner vers les proches pour qu'ils témoignent du positionnement du donneur potentiel. Ce dernier peut notamment s'être opposé aux dons d'organe et de tissus en laissant un écrit à ses proches ou en leur parlant de son opposition. "On peut être sélectif dans ce qu'on souhaite donner ou pas, ce n'est pas tout ou rien", ajoute Florine.
"Nous, on cherche chez les proches qu'ils nous témoignent du positionnement de la personne décédée. Après, souvent les gens n'en ont pas parlé". À partir du moment où les proches sont informés, ils ont quelques heures pour faire connaitre le positionnement du défunt.
Ce n'est pas leur avis à eux qu'on recherche, mais ce que le donneur potentiel aurait souhaité.
Florine, infirmière de la coordination des prélèvements d'organes et de tissus à l'hôpital de Besançon
Sensibiliser et informer
Le travail des services de dons d'organes est donc aussi d'informer le grand public pour inciter les gens à communiquer entre eux sur le don d'organe. "On intervient en milieu scolaire et au niveau des entreprises qui le demandent ou encore lors d'événements comme la journée nationale du don d'organe", précise-t-elle.
Il s'agit pour ces soignants de faire baisser le taux de refus. En 2023, 5 634 greffes d'organes ont été réalisées pour 11 422 personnes qui étaient sur liste d'attente, selon l'Agence de la biomédecine. Un taux hausse de 2,5 % par rapport à 2022. Malgré tout, "par manque de greffons, il y a encore des gens en attente qui décèdent", informe la soignante. En 2023, 823 personnes ont ainsi perdu la vie par manque de greffe.
Pour l'année 2023, le CHU de Besançon a effectué 316 prélèvements : 201 cornés, 36 reins, 37 fois, 14 cœurs, six pairs de poumons, huit pancréas, cinq prélèvements d'épiderme et neuf artères.
Pour plus de renseignement, vous pouvez contacter par mail le service de coordination des prélèvements d'organes et de tissus de l'hôpital de Besançon à l'adresse mail : prelev-organ-tissus@chu-besancon.fr