Une banderole déployée sur la façade de l'hôtel de ville, au cœur de Besançon (Doubs), dénonce "l’amputation de 5,6 millions d’euros sur le budget 2025 de la ville ". Une initiative des élus de la majorité municipale pour dire aux Bisontins qu’ils refusent de mettre en œuvre les économies imposées par l’État dans le cadre du Projet de loi de finances 2025.
“On n’est pas prêt à payer les erreurs de gestion de l’État”, l’adjoint aux finances de la ville de Besançon, Anthony Poulin (EELV) est catégorique : “le gouvernement fragilise les collectivités”. Il poursuit : “Si je cumule l’ensemble des ponctions pour les collectivités de Franche-Comté - annoncées dans le Projet de loi de Finances 2025 -, cela correspond à plus de 110 millions d’euros”.
D’où la question posée par la banderole déployée ce 7 novembre par la majorité de l'écologiste, et maire Anne Vignot : “L’État ampute le budget municipal de Besançon de 5,6 millions d’euros. On les prend où ?”. Selon les élus de la majorité bisontine, ces 5,6 millions d’euros, cela pourrait se traduire à “priver tous les élèves de cantine à Besançon” ou encore à “supprimer la police municipale”. Un choix “absurde” que ne fera pas la municipalité. C’est juste pour se rendre compte des conséquences, jugées comme “dramatiques” par les élus, de ce projet d’économies voulu par le gouvernement.
L'équivalent d'un an de budget sécurité/tranquillité publique
À Besançon, 5,6 millions d’euros “c’est l’équivalent du budget consacré à la sécurité/tranquillité publique, à la moitié de la subvention versée au CCAS ou aux deux tiers du budget dédié aux subventions des associations”. En 2025, le budget de la ville de Besançon (voté en mars) devrait être de 212 millions d’euros.
Cette banderole a été accrochée juste le jour du conseil municipal de la ville prévu à partir de 17 heures jeudi 7 novembre. Les orientations budgétaires ne sont pas à l’ordre du jour, mais il se pourrait que cette question s’invite au débat. Une motion doit être proposée par l’ensemble des groupes politiques de la majorité bisontine.
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Majorité bisontine
“Le gouvernement engage unilatéralement un programme d’économie de 60 milliards d’euros” en demandant aux villes, aux départements, aux régions de faire des économies. Une “injustice” pour Anthony Poulin, l’adjoint en charge des finances.
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En conclusion de cette motion, le conseil municipal de Besançon demande aux parlementaires de “rejeter ce projet de loi de finances mortifère” et au gouvernement de “retirer les mesures de ce PLF qui imposent une ponction aux collectivités territoriales”.
“Deux salles, deux ambiances”
Il n’y a pas que les élus de gauche ou écologistes qui contestent cette décision du gouvernement Barnier. Le premier Ministre a annoncé vouloir faire 60 milliards d’économie dont 5 milliards demandés aux collectivités. À droite aussi, les responsables des collectivités trouvent la pilule amère.
Le département du Doubs devrait réaliser 25 millions d’économies sur son budget 2025. Comme la maire de Besançon Anne Vignot (EELV), la présidente, Christine Bouquin (LR), a, elle aussi, réagit fin octobre vivement à ces restrictions budgétaires. Pour le département du Doubs, cela représente environ 25 millions d’euros de moins sur un budget de 650 à 655 millions d’euros en moins soit entre 3,84 et 3.81%
Le chef de file de l’opposition municipale, Ludovic Fagaut (LR), siège également au conseil départemental du Doubs, mais là, il est dans la majorité de la présidente Christine Bouquin (LR). L'élu est premier vice-président en charge du retour à l'emploi, de l'insertion et de l'action sociale.
Pour lui, cette banderole déroulée sur la façade de l’hôtel de ville, “c’est assez démago” et il estime qu’on ne peut pas comparer les deux collectivités. “Prendre la façade de l’hôtel de ville pour une tribune partisane, cela me dérange” affirme l’élu dans l’opposition municipale. Selon Ludovic Fagaut, élu au sein des deux collectivités, il y a “deux salles, deux ambiances”. Il oppose “les propos démagogiques” de la maire de Besançon à l’attitude “combative” de la présidente du département.
Dans les faits, Anne Vignot comme Christine Bouquin sont opposées aux restrictions budgétaires qui devraient être votées par les parlementaires dans le projet de loi de finances de l’État.
Selon Ludovic Fagaut, les conséquences de la cure d’austérité budgétaire décidée par le gouvernement ont moins de conséquences pour les municipalités que pour les départements.
“Nous devons être combatifs”
La présidente du conseil départemental veut maintenir le vote du budget 2025 de sa collectivité dans un "esprit combatif et de résistance", sans inclure les mesures d'économies que pourrait lui imposer l'État.
"Nous avons fait le choix de garder notre calendrier budgétaire et de maintenir le vote de notre budget au mois de décembre prochain", a déclaré Christine Bouquin en séance plénière, faisant ainsi le choix inverse d'autres collectivités, qui ont reporté le vote de leur budget pour y intégrer les mesures qui seront décidées à l'issue du vote au Parlement du projet de loi de finances (PLF) 2025 de l'État.
Selon elle, "si l'ensemble des mesures envisagées dans le PLF 2025 étaient appliquées, ce sont 25 millions d'euros qui seraient retirés au département du Doubs", ce qui affecterait aussi bien "la rénovation des collèges" que la "modernisation des Ehpad", et entraînerait "l'abandon de 80%" des investissements sur les routes départementales".
"Nous devons être combatifs et certainement pas nous avouer déjà vaincus. Même si le temps presse, nous avons encore du temps pour refuser, convaincre et proposer", a-t-elle affirmé devant les élus du département, vilipendant les "techniciens de Bercy", "enfermés dans leur tour d'ivoire, si loin des réalités du terrain".
La position de Christine Bouquin a été soutenue à l'unanimité des membres du Conseil départemental, qui ont également adopté la résolution de l'association des départements de France alertant le gouvernement et les parlementaires sur "l'ampleur de l'effort demandé".
Des élus mobilisés ailleurs en France
Besançon n’est pas la seule ville à afficher sur une banderole son opposition aux coupes budgétaires du gouvernement Barnier.
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Depuis le 4 novembre, une banderole du même type que celle de Besançon a été déployée sur la façade de la mairie de Bordeaux. La démarche du maire écologiste Pierre Hurmic (EELV) devrait être également reprise par le maire EELV de Lyon. La ville de La Rochelle s'apprête aussi à afficher son opposition.
🔴 Attaque frontale contre la démocratie locale : le projet de loi de finances du gouvernement prévoit une coupe budgétaire de 16,5 millions d’euros pour la Ville de Bordeaux !
— Pierre HURMIC (@PierreHurmic) November 4, 2024
L’État veut faire payer aux collectivités sa gestion calamiteuse au lieu d’assumer les conséquences de… pic.twitter.com/7lH2hgnCuU
Ce jeudi 7 novembre, plusieurs dizaines d'élus locaux de la région toulousaine, pour beaucoup ceints d'écharpes tricolores, se sont mobilisées devant la préfecture de Haute-Garonne pour adresser un "message de colère" face aux mesures d'économie "drastiques et brutales" qui leur sont demandées dans le projet de loi de finances 2025.
Dans toute la France, de nombreuses collectivités ont exprimé leur inquiétude face aux économies demandées dans le Projet de loi de finances 2025. En Occitanie, fin octobre, le département du Gers, avait ainsi plongé dans le noir son hémicycle, pour dénoncer un "hold-up" de l'État sur les finances locales.