TEMOIGNAGE. "Depuis que je suis rentrée des camps de concentration, je n'ai plus jamais réussi à pleurer"

A Besançon, Jacqueline Teyssier est une rescapée des camps d'Auschwitz et Bergen-Belsen. A 96 ans, ses souvenirs de la déportation sont intacts et toujours aussi vifs. 

Soixante-quinze ans après la libération d'Auschwitz, les survivants de la Shoah sont de moins en moins nombreux. 1,1 million de victimes ont trouvé la mort à Auschwitz, au sud de la Pologne. 

Elle avait 20 ans. 17 mai 1944, Jacqueline Teyssier est une jeune Parisienne. Juive, elle arrêtée à Bobigny par la milice française, pour fait de résistance. Elle et sa famille sont emmenées dans le camp de concentration d'Auschwitz. Sa mère n'en reviendra pas vivante. 
 



Juste avant la libération du camp d'Auschwitz par les Soviétiques, le 27 janvier 1945, Jacqueline Teyssier est transférée à Bergen-Belsen, un camp en Allemagne. Elle y contracte le typhus. Commence une nouvelle attente. Elle ne sortira des camps de la mort qu'en juin 1945.

L'ancienne ouvrière parisienne témoigne inlassablement de l'horreur vécue avec les familles juives et les déportés.  Elle raconte avec ses mots et une incroyable lucidité ses tristes souvenirs de déportation. Et c'est avec le sourire et le punch d'une survivante, qu'elle transmet ce qu'elle a enduré, auprès des lycéens et des collègiens.


Je ne pleure jamais, c'est fini


Le tatouage de son matricule de déportée est encore visible sur son avant-bras. Jacqueline Teyssier se souvient des camps, les années n'ont rien effacé. Elle raconte ces nuits où les Allemands mettaient les femmes nues dehors en plein nuit, par tous les temps. Il fallait survivre. "Si on était avachies, c'était fini, c'était directement au four crématoire et à la chambre à gaz" se souvient-elle.

 

 

Je ne passe pas une journée sans penser aux camps de concentration


"Je pense à mes camarades qui n'ont pas pu survivre" raconte la Bisontine qui participait ce 27 janvier 2020, à Besançon, aux cérémonies du 75e anniversaire de la libération d'Auschwitz. "Vous vivez dans un pays démocratique aujourd'hui, vous êtes libres, vous pouvez vous exprimer, vous pouvez parler... soyez conscients que vous êtes dans un pays heureux !" lance au micro l'ancienne résistante, détenue suite au décret de 1941 "Nacht und Nebel" qui ordonne la déportation de tous les ennemis intérieurs du Reich.

Ce petit bout de femme aux cheveux blancs n'a rien oublié de l'horreur et de la souffrance dans les camps. "Tous les jours, je me dis que je vais dormir dans un bon lit, que les rats ne viendront pas sur nos pieds, pour nous voler notre pain, on le cachait contre notre poitrine" détaille-t-elle.

"J'ai été déportée à Auschwitz Birkenau. J'en suis repartie quelques jours avant l'arrivée des Soviétiques dans des wagons à bestiaux. On est repartis en Allemagne à 100 personnes par wagon, sous la neige, la pluie" confie Jacqueline Teyssier. 

Le peu de nourriture, les poux, l'attente, jusqu'à ce jour du 15 avril 1945 où Bergen-Belsen est libéré. "Les Anglais libérent le site, c'est un dimanche soir, il est 17 heures" se souvient Jacqueline Teyssier. Les militaires anglais vont d'abord désinfecter les prisonniers, puis ils distribuent du lait chaud. La fin de longues nuits d'enfer. Jacqueline Teyssier pèse 28 kilos quand elle est rapatriée sur Paris. Les médecins disent à son père qu'elle ne survivra pas. 
 

Ecoutez le témoignage en intégralité de Jacqueline Teyssier


Elle entend toujours la musique devant les chambres à gaz


Nous avions rencontrée Jacqueline Teyssier, chez elle en 2018, son fils préparait alors un film sur le parcours de sa mère. Pour que la mémoire de celle-ci ne se perde pas.
Jacqueline racontait cette musique d'orchestre présente à Auschwitz, des notes funestes destinées à masquer les cris des déportés qu'on asphyxiait dans les chambres à gaz.
 
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