Témoignages. Confinement : “Psychologiquement, je suis à bout. À bout de patience”

Publié le Mis à jour le Écrit par Sophie Courageot et Sylvia Bouhadra
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Comment vivez-vous psychologiquement ce deuxième confinement ? Nous vous avons posé la question sur la page Facebook de France 3 Franche-Comté. 

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L’appel à témoignages lancé ce mardi 24 novembre sur notre page Facebook a été suivi d'un pluie de messages et commentaires. Confiné(e)s, vous avez eu envie de nous parler de votre situation sur le plan psychologique.  

La santé mentale des Français s’est dégradée lors de ce deuxième confinement

Ras le bol, stress, anxiété ou déprime, l’impact du confinement est réel. "La santé mentale des Français s’est significativement dégradée entre fin septembre et début novembre", déclarait Olivier Véran, jeudi 19 novembre. Le ministre de la Santé révélait dans le même temps que le numéro d'aide mis en place sur ces questions (le 0 800 130 000), géré par des associations, recevait près de 20 000 appels par jour.

Dès le 23 mars, Santé publique France a lancé l'enquête CoviPrev auprès de 2 000 personnes, afin de suivre leur état psychologique et l'évolution de leurs comportements dans un contexte inédit. Après une semaine de confinement, l'anxiété touchait 26,7% des personnes interrogées, contre 13,5% en 2017. 

Dans cet article, nous vous donnons la parole. Chacun vit ce confinement automnal de façon différente. 

Difficile ce confinement quand on a 20 ans 

Manon, 20 ans, travaille dans une boulangerie du Haut-Jura. Même dans les beaux paysages jurassiens, le confinement n’est pas facile à vivre pour elle. "Nous tombons dans une dépression, et nous avons du mal à rester positif. Le fait de ne plus voir personne est dur. Nous sommes déjà seuls car nous vivons en montagne, le fait de se retrouver entre voisins et collègues nous faisait du bien. Nous entamons la saison hivernale qui va être rude pour nous tous" confie Manon qui s’attend à perdre son emploi à la fin du mois en raison de la crise du Covid.

Lucy vit en Bourgogne. "J'ai 19 ans. C'est extrêmement difficile de se projeter avec la crise sanitaire. Je voulais acheter une maison avec mon copain, c'est impossible. Trouver un CDI également. On est jeunes et on a l'impression que malgré notre jeunesse et nos diplômes beaucoup de portes sont fermées depuis le coronavirus. Cela joue psychologiquement. On en a marre de bosser toute la semaine pour ne pas sortir le week-end, mais c'est comme ça.  Avec cette crise sanitaire nous avons peur pour notre avenir et notre épanouissement personnel et professionnel."

Pour Maxime, jeune diplomé, la situation est difficile sur le plan professionnel. "Je suis actuellement sans emploi, titulaire d'un bac+5 et impossible de trouver quelque chose, même en mettant de côté mon diplôme. L'avenir est incertain, les entreprises sont frileuses face au recrutement et l'ambiance sanitaire n'arrange rien du tout. Résultat : on s'enlise dans le chômage, chaque jour on se sent de plus en plus coupable de bénéficier des aides de l'état, de bénéficier de ce pour quoi les autres citoyens travaillent alors que malgré tous nos efforts, on ne trouve pas. Psychologiquement, je suis à bout. À bout de patience, à bout de solutions, à bout de voir les entreprises et petits commerces fermer peu à peu et la vie sociale française que j'aimais tant s'évanouir dans le néant".

Confinés pour sauver des vies, certains se sont fait une raison

Céline vit à Belfort. Cette mère de famille trentenaire, vit plutôt bien le deuxième confinement : "Personnellement ça ne me dérange pas d'être confinée si c'est pour sauver des vies. Je trouve que les Français ne font pas du tout preuve de résilience. On leur demande juste de respecter quelques règles afin de sauver des vies et la plupart se plaignent".

Pour Clara et Sylvie, "nous devons faire preuve de patience face à ce confinement. Des gens pleuraient car ils devaient aller à la guerre, nous on pleure car on est enfermés chez nous et qu’on a tout juste à attendre, les gens sont désespérants" estiment-t-elles. Sylvie ajoute : "Il faut être réaliste, si on veut s'en sortir il faut savoir se restreindre et aider à ce qu'il y ait moins de décès. Alors arrêtons de nous plaindre et restons chez nous" écrit cette Franc-Comtoise. "Il vaut mieux être confiné chez soi qu’à l’hôpital" tempère Michèle.

Travail et confinement, un quotidien où la souffrance est palpable

Coralie vit en Haute-Saône. Elle travaille dans une jardinerie animalerie. Le confinement, elle le vit à travers son regard d’employée de commerce. "Je peux vous dire que c'est dur. La plupart des gens s'en foutent, et ne respectent rien. On se fait insulter car des rayons sont fermés. Nous sommes aussi en première ligne, face à des gens irrespectueux (masques sales, aucune désinfection au gel en entrant), ils viennent juste se promener pour voir. On est en chômage partiel, donc on a moins de paye, on travaille du lundi au samedi pour ne même pas pouvoir sortir et changer d'air le dimanche. On voit des inconnus toute la journée, toute la semaine, mais on ne peut pas voir notre famille. C'est dur moralement", explique Coralie qui attend avec impatience le déconfinement. 

Dans le Jura, c’est boulot dodo pour Nicolas qui travaille en usine. "Je vis seul et j’ai pour habitude dès que je suis en repos d’aller en forêt ou en prairies pour faire des balades photos. Et là, c’est dodo boulot. C’est très déprimant avec ces attestations et la peur des contrôles et il y en a eu. Je me suis fait contrôler sur mon trottoir à côté de chez moi sans masque alors que j’entretenais ma haie... Pour ma part, ce deuxième confinement, je le vis très mal, je suis d’ailleurs allé voir mon médecin. J’adore la nature, la photographie animalière et les beaux paysages, pour moi, la règle des 1 km en nature est aberrante".  

Coco vit à Dole dans le Jura, et travaille dans le secteur de la culture. Cette artiste musicienne vit seule et ressent beaucoup de colère face à la situation actuelle. "Ce deuxième confinement me semble beaucoup plus difficile que le précédent... Les incohérences des décisions sont excessives, les punitions pour délit d'existence trop sévères. Le politique abandonne ses citoyens en les infantilisant. De nombreux secteurs d'activité sont laissés pour compte, de nombreuses catégories de personnes, surtout les plus fragiles, sont également maltraitées. La colère est grande et même si la protection de l'ensemble des citoyens est et était nécessaire, c'est l'incompréhension et la tromperie. Psychologiquement donc,c’est pour moi un confinement beaucoup plus douloureux dans laquelle la peur (d'être puni), la colère (des incohérences), la souffrance (de l'isolement) sont insupportables. À mon travail, le télétravail n'est pas du tout encouragé par crainte de laisser-aller de la part des agents, à l'exception des agents proactifs ou "de confiance". Pourtant, nous avons interdiction de mener toutes les actions sociales que nous menons d'habitude vers les publics. Un symbole que dans ce deuxième confinement, le social est littéralement aux oubliettes."

"Relisons Anne Franck et relativisons ce confinement"

Eve, sexagénaire du Jura a pris elle aussi la plume pour nous écrire. "Je trouve qu'il est vraiment indécent de se plaindre de ces histoires de confinement pour la simple raison que ce sont des confinements de "pacotille". Je pense à nos anciens, "vraiment" confinés dans les Ehpad, jusqu'à en mourir. Je pense à nos aïeux ayant subi les deux dernières guerres, "vraiment" confinés dans des tranchées immondes, bouffés par les rats, ou à la population "vraiment" confinée en tremblant dans des caves, de peur des bombes hurlantes quotidiennes. Eux aussi étaient séparés de leurs proches et pour longtemps, voire définitivement… Psychologiquement, il me semble qu’en 2020, nos conditions de "confinement" et "d'isolement" sont supportables... En mémoire et par respect pour tous ceux qui ont enduré cela, un peu de courage et de discernement serait de mise... Imaginez le confinement d'Anne Frank et relisez le livre : de quoi remettre les idées bien en place... Personnellement je m'adapte aux conditions actuelles, ce n'est pas la mer à boire, il y a bien pire ailleurs. Je suis libre d'aller me promener un peu tous les jours si je le veux. Rien ne me manque car je peux aller faire des courses (sans tickets de rationnement ni craindre qu'un obus me tombe sur la tête). Cessons de nous plaindre dès que notre petit confort est ébranlé. Voilà mon humble avis" estime Eve. 

Quand le lien social fait cruellement défaut….

Victor est confiné en ville à Besançon. Cet amoureux de la cuisine espère lui aussi des jours meilleurs. "Pour moi le confinement c’est surtout la rupture du lien social. Je continue à travailler parce que je suis photographe culinaire et assistant d’éducation. Le plus dur je crois, c’est de ne pas pouvoir aller voir ma grand-mère qui habite loin... Heureusement, j’ai de la famille dans le coin et je m’occupe d’eux comme je peux !" nous explique le jeune homme.

L’appel de la nature... 

Yoan, 35 ans trouve aussi le temps long. Pour ce Bisontin : "Cela devient lassant de semaine en semaine surtout pour la restriction de déplacement dans un rayon de 1km d'une heure maximum avec ces belles journées ensoleillées... Toujours devoir faire des tours de quartier et ne pas se ressourcer en nature devient mentalement lourd. Pour ma part en plus de ça je suis adepte des salles de sport ou le bien être mental et physique m'apporte beaucoup. C’est difficile de ne pas pouvoir en faire et quand le gouvernement annonce pour janvier la réouverture, c'est un deuxième coup de massue." Côté travail, son activité de chantiers de nettoyage s’est réduite à quelques heures... "C’est dur à encaisser car j'aime mon activité. Alors, oui, globalement ce second confinement est plus dur à supporter, et le stress envahit par moment, avec l'exaspération de tout cela". 

Ce deuxième confinement vous questionne sur la société

"Ce n'est pas le confinement qui me déprime mais le manque de perspectives, ne pas savoir de quoi demain sera fait, et puis aussi l'ambiance délétère qui règne dans notre pays, l'agressivité, le manque de civisme, l'égoïsme" estime Arlette.
"Ce confinement oui n’est pas tous les jours évident à vivre ! Pensées pour les jeunes qui ont besoin de liberté, de se divertir... Et surtout aussi les personnes hospitalisées en raison du virus, les personnes âgées. Certaines vivent la misère. C’est bien pire que nous" conclut Agnès.

Nous n’avons pas été en mesure de relayer l'ensemble de vos messages (des dizaines et des centaines de commentaires). Merci à celles et ceux qui nous ont écrit par message privé. Vous pouvez lire d’autres commentaires sous notre post facebook.

 

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