Adrien Favre est photographe animalier. Installé dans le Haut-Jura, il a filmé pendant plusieurs mois des animaux sauvages près de chez lui. Il entend renouveler l'expérience rapidement pour sensibiliser à la protection de la nature.
"Le Haut-Jura, c’est une des plus belles régions du monde", avoue d'emblée Adrien Favre. Dans une autre vie, ce photographe animalier a visité presque tous les continents à l'occasion de projets professionnels. "J’allais un peu partout en France, au Canada, en Inde, j’ai visité l’Afrique aussi. Mais j'avoue que c'est ici que je me plais le plus".
Sous le charme, il a décidé de poser ses valises en Franche-Comté. Et sa terre d'adoption le fascine. Particulièrement les animaux sauvages qui y vivent. Alors, dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 2023, le trentenaire a décidé de mener une expérience pour le moins insolite. Adrien Favre a installé des "pièges photographiques" en pleine forêt, à proximité de son domicile.
Biches, lynx, blaireaux
"Ce sont des petits instruments qui nous permettent de prendre des photos qui ne sont pas exploitables parce que la qualité n’est pas bonne et qu’on n’est pas derrière l’objectif, mais dont on se sert pour faire des repérages", détaille Adrien Favre. "Ça nous permet de gagner un temps fou pour connaître les animaux qui peuplent tel ou tel endroit”,
Le dispositif est contraignant au point de vue technique : “l'enregistrement peut se déclencher à n'importe quel moment, à cause de la pluie, à cause de la neige, à cause de plein de choses différentes. Il a fallu faire un tri et ne garder que les séquences les plus intéressantes”, explique le photographe.
Mais le résultat est réussi. Pendant plusieurs minutes, comme le montre un montage qu'il a publié sur les réseaux sociaux, on peut apercevoir çà et là des sangliers, des lynx, des blaireaux et des biches au petit matin, en pleine journée ou à la nuit tombée.
Capturer la faune locale
Passionné par la vie sauvage, il savoure les enregistrements qu'il a pu faire. Il y a peu, il a même réussi à capturer l'image d'un lynx et rêve d'en croiser de nouveau. Mais la plus belle image qu'il garde de ce projet, c'est celle de "quatre ou cinq sangliers" qui gambadent. “Pour nous, les photographes animaliers, c’est un animal très dur à avoir en images parce qu’il est très chassé. Il est très nocturne, on le voit très peu en journée. Alors, je suis vraiment content".
Je compte poursuivre ce projet pendant plusieurs années.
Adrien Favre, photographe
Au-delà des sangliers, Adrien Favre est viscéralement attaché à la faune locale. Il a d'ailleurs été invité à exposer plusieurs de ses productions au premier festival de la photographie de Maîche (Doubs), qui se tient du 15 au 17 septembre. "On apprécie son travail, son engagement, donc on lui a demandé de venir à notre festival" explique Jean-François Varriot, co-organisateur de l'événement. Il salue "un homme qui est tourné vers la protection animale, la protection des milieux naturels qui commence à avoir une certaine renommée dans le milieu".
"On a les derniers lynx, belles prairies, belles forêts. Il faut faire en sorte que ça reste comme ça", défend de son côté Adrien Favre. Et d'ailleurs, il confesse que “le piège photographique" qu'il a installé au début de l'année "est toujours en place". "Je compte poursuivre ce projet pendant plusieurs années”.
Contemplations
Au cours de cette expérience, Adrien Favre a pu observer de très près les changements de la nature au gré des saisons. "J'ai commencé à filmer durant l'hiver. Pendant deux ou trois mois, il ne s’est pas passé grand-chose", se souvient le photographe, qui assure que "tout a changé à partir du printemps".
Dès que les températures sont reparties à la hausse, "j’ai vraiment eu l’impression que la nature s’éveillait, qu’elle revivait un peu", explique-t-il, assurant que "c’était vraiment beau à voir". Comme il aime à le rappeler, "le printemps est une période moins hostile pour les animaux et leur survie. Ils ont plus de ressources alimentaires".
Susciter un déclic
De son propre aveu, Adrien Favre n'a pas toujours été conscient de l'importance de la nature. "J'ai crapahuté à gauche et à droite Et puis pendant le confinement, j'ai eu une prise de conscience de mon empreinte carbone. J’ai compris que le voyage ne passait pas forcément par prendre l’avion, donc j’ai aussi changé mon fusil d'épaule”.
J’ai voulu ré-ensauvager ma vie, vivre dans des endroits où la nature est très présente.
Adrien Favre, photographe
Première résolution : quitter Paris et partir se mettre au vert. “J’ai voulu ré-ensauvager ma vie, vivre dans des endroits où la nature est très présente”, indique Adrien Favre. Alors, il décide de s’établir en Franche-Comté et souhaite limiter son empreinte carbone. “Je n’ai plus pris l’avion depuis trois ans pour mon travail. J'ai la chance de vivre dans un tout petit village. J’ai plein d’animaux autour de chez moi. Donc j'essaie de me concentrer sur la prise de vue animalière".
Aujourd'hui, Adrien Favre souhaite que la prise de conscience qu'il a eu se fasse chez d'autres. "On n’a pas forcément conscience de la fragilité de la nature. En France, il y a une grande majorité de la population qui est citadine et qui n’est pas forcément au fait des problématiques environnementales et de protection de l'environnement", constate-t-il. "Je ne suis qu’un photographe. Je n’ai pas vocation à sauver tous les animaux sauvages ni forcément changer les choses. Mais je suis convaincu que la photographie est un médium qui permet de sensibiliser les gens. C'est pour ça que je fais ce métier".