À tout juste 25 ans, Swann Van Rechem vient de remporter samedi 24 septembre la finale du 58e Concours international de jeunes chefs d'orchestre de Besançon et les prix Coup de coeur du public et de l'Orchestre national d'Ile-de-France. Rencontre avec le lauréat, formé au conservatoire de Lille et sa famille venue le soutenir dans cette étape cruciale pour sa carrière.
C'était une belle finale avec trois bons candidats. Comment départager le français Swann Van Rechem, le coréen Hae Lee et le chinois Chao Dong après une semaine d'épreuves de direction d'orchestre ? Le 18 septembre, ils étaient encore vingt candidats sur les 280 inscrits au concours.
Le jury international du prestigieux concours de jeunes chefs d'orchestre de Besançon prend sa décision sur l'ensemble du concours et aussi, selon le chef Jean-François Verdier, directeur artistique de l'orchestre Victor Hugo, sur ce "petit truc en plus" dans la musique, totalement subjectif et bien difficile à décrire.
C'est souvent dès l'enfance que les destins se forgent. La famille recomposée du jeune chef est venue tout spécialement assister à la finale de ce concours international qui ouvre grand les portes de prestigieux orchestres. Ils ont confié à nos confrères Vanessa Hirson et Eric Debief leurs souvenirs.
Une famille de musiciens
La mère, le père et le beau-père de Swann Van Rechem sont tous les trois percussionnistes. Sa belle-mère est pianiste. Tous les quatre croient au talent du jeune homme.
On était totalement à fond. On connaît sa passion, son envie, sa capacité de travail énorme depuis toujours, cela a payé aujourd'hui.
Xavier Van Rechem, père de Swann Van Rechem
C'est sans doute dans un détail que se nichent les clés de compréhension d'une personnalité. Sa mère Sylvie Reynaert se souvient d'un petit moment de vie familiale qui, aujourd'hui, prend tout son sens.
Je le vois encore tout petit devant le miroir. Il est allé mettre un CD et il a dirigé.
Sylvie Reynaert, mère de Swann Van Rechem
Dès ses six ans, Swann Van Rechem commence à jouer de la musique au conservatoire de Lille . Après des études de piano, il apprend les percussions à l’âge de 11 ans. À 18 ans, il part à Paris, poursuivre le parcours classique des élèves doués ; il est admis au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris.
Musicien et chef, voilà ce que veut être Swann Van Rechem.
Le plus beau souvenir, c'est le jour où il est rentré à la maison en disant "Je me suis inscrit en classe de direction d'orchestre. Il avait décidé. Comme pour beaucoup de choses, depuis qu'il est petit, il décide et il fait.
Xavier Van Rechem, père de Swann Van Rechem
Trop jeune pour intégrer la classe de direction du conservatoire de Lille, il sera au départ juste auditeur. Swann avait déjà gagné ce jour-là. Il avait su convaincre son professeur. Plus tard, il intégrera la classe de George Pehlivanian au Conservatoire national de Paris.
Le voici justement sur notre plateau du JT Ici 12/13 . Le jeune chef explique à Aude Sillans ses relations avec l'orchestre.
Le talent et le travail
À 25 ans, le jeune homme a déjà tracé sa route. Rapidement, il part à Amsterdam puis à Weimar pour maîtriser l'anglais et l'allemand. Savoir partager ses intentions aux musiciens ne passe pas que par les gestes, trouver le mot juste peut être utile.
Swann Van Rechem a déjà travaillé auprès de formations telles que l'Orchestre National de Metz, MDRSinfonieorchester, Jenaer Philharmonie, Thüringen Philharmonie Gotha-Eisenach, Nord Nederland Orkest, Hradec Králové Philharmonic.
Passionné par l’Opéra, il participe à des productions à l’Opéra de Nantes, à l'Opéra de Rouen Normandie, et bientôt à l’Opera Ballet Vlaanderen (Belgique).
Gagner le "Grand prix de direction" du concours international de Besançon ouvre les portes d'orchestre dans le monde entier. La dotation de ce prix comprend un accompagnement de carrière de trois mois, 12 000 euros et surtout des engagements avec une vingtaine d'orchestres partenaires.
On est tellement focalisé sur la musique durant la semaine du concours qu'on en oublie presque pourquoi on est là ! Et quand on peut accéder au tour d'après, on est surtout content de pouvoir enfin diriger ce que l'on a préparé pendant des mois.
Swann Van Rechem
Cet été, Swann Van Rechem a répété tous les jours l'ensemble du répertoire du concours même s'il n'était pas sûr de jouer toutes les pièces.
Une finale relevée
Et comme la tradition le veut, les chefs ont dirigé la création mondiale du compositeur en résidence Alexandros Markeas. Une commande du festival : "Living happily during the war". Pièce sublime et complexe qui demande beaucoup de concentration aux chefs.
À noter la mention spéciale à Chao Dong (25 ans, Chine), remise par le compositeur Alexandros Markeas, pour saluer son interprétation de l’œuvre créée lors de la finale, Living happily during the war. Pour cette création, c'est lui qui avait ce "petit truc en plus". Le compositeur, membre du Jury, a été "touché par l'énergie" du jeune Chinois.
Quand Swann Van Rechem est sorti de ses quarante minutes de direction pour la finale, après une semaine d'un impressionnant marathon musical, son cœur "devait battre à 200. C'est beaucoup d'énergie" confient-ils à nos confrères.
Gagner un concours, c'est une chance que l'on donne. Je suis très conscient de cela. Il faut penser à la suite. Comme au rugby, on marque un essai, il faut le transformer.
Swann Van Rechem
Qu'a-t-il ressenti lorsqu'il a reçu ses trois prix (le Grand prix, les prix Coup de cœur du public et de l'orchestre) ? Comme à son habitude, il s'était préparé psychologiquement à toutes les possibilités. "Pour tenir le coup et planifier la suite". Tout est dit, c'est sans doute cela, "ce petit truc en plus".
Le voilà maintenant dans la liste prestigieuse des lauréats du concours de chefs, réputé comme étant "le plus complet au monde" : Seiji Osawa, Alexander Gibson, Sergiu Comissiona, Gerd Albrecht, Michel Plasson, Lionel Bringuier. Depuis 2005, il n'y avait pas eu de lauréat français.