"Ce n'est pas le soignant qui tue, on abrège la souffrance du patient", une ancienne infirmière milite pour une aide à mourir

En France, le débat sur l’aide à mourir reste en suspens. Evelyne Brachet, ex-infirmière, plaide pour ce "soin ultime" qu'elle considère comme un respect du choix et de la dignité du patient.

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Ce 2 novembre est sous le signe de la sensibilisation du droit à mourir dans la dignité. En France, un projet de loi allait être examiné quand Emmanuel Macron décide de dissoudre l'Assemblée. Un projet qui, pour la première fois, prévoyait une aide à mourir. Mais voilà, depuis, rien. Ou presque rien. Le gouvernement de Michel Barnier se dit prêt à "reprendre le dialogue" mais pas forcément le projet de loi. 

Le droit de mourir dans la dignité

Evelyne Brachet a exercé le métier d'infirmière durant 40 ans. Il y a un an et demi, elle a cessé de travailler. Mais elle ne s'arrête pas pour autant de militer pour la législation d'une aide à mourir, comme c'est le cas en Belgique ou en Suisse. "Déjà dans les années 80-90, je m'interrogeais. Je me suis retrouvée face à des personnes qui se retrouvent dans des situations où on se demande''jusqu'où va-t-on pour maintenir la vie ?'", questionne-t-elle, allant jusqu'à parler de maltraitance. Pour elle, la loi Léonetti n'est pas suffisante. 

Difficile d'aborder le droit à mourir sans évoquer l'exemple des pays où l'on a le choix sur sa fin de vie. "En Belgique, les soins palliatifs représentent autre chose qu'en France, puisqu'il intègre la loi qu'ils ont adoptée. C'est à ce moment précis que je prends conscience du décalage avec la France", avoue-t-elle. Dans les couloirs, on parle d'augmenter les moyens mis en œuvre pour les soins palliatifs. "C'est bien, mais il faut avancer des deux côtés", martèle Evelyne.

Dans mon idéal, il faut que la branche de l'aide à mourir soit intégrée aux soins palliatifs. Que ce soit une possibilité pour le patient.

Evelyne Brachet, ancienne infirmière

L'aide à mourir, "le soin ultime"

Si les opposants à une aide à mourir parlent de "meurtre avec préméditation" – termes "inappropriés" qu'Evelyne ne peut entendre sans être révoltée – Evelyne, elle, parle plutôt de "soin ultime". Pour elle, ce geste s'inscrit pleinement dans la prise en charge du patient. "Les soignants des soins palliatifs se retranchent derrière 'tu ne dois pas tuer', mais si le patient le demande, que son état est justifié, que sa souffrance est intolérable et la maladie inexorable...", justifie-t-elle, consciente qu'il ne s'agit pas d'un acte bénin, mais au contraire, important.

Quand le patient en arrive là, ce n'est pas le soignant qui tue. On apaise et abrège sa souffrance.

Evelyne Brachet, ancienne infirmière

Depuis quelques mois, l'actualité témoigne de l'importance d'avancer sur le sujet. Que ce soit le cas de Loïc Résibois, atteint de la maladie de Charcot, qui a fait de sa fin de vie un combat pour l'aide à mourir, ou bien l'acquittement de Bernard Pallot, 78 ans, qui a étranglé sa femme atteinte de la maladie de Carrington, à sa demande, qualifiant son geste d'“euthanasie clandestine”. Quand le sujet de Loïc Résibois arrive sur le tapis, les mots ne manquent pas à Evelyne. "C'est un exemple formidable. Il a communiqué sur son combat jusqu'au bout. Il aurait pu choisir la facilité en allant en Suisse ou en Belgique, il a choisi la sédation profonde, qui peut être plus ou moins réussie. Pour moi, c'est une mort lente, c'est tuer de façon cruelle. C'est une agonie lente et dans la souffrance". 

"Non-assistance à personne en danger de souffrir"

Un autre argument employé par les opposants à une loi sur l'aide à mourir, est celui de la rupture du lien de confiance dans la relation soignant/soigné. Encore une fois, l'ancienne infirmière le contredit. 

Le premier rôle du soignant est de soulager la souffrance. Si la personne réclame la fin de cette souffrance, si on lui apporte, la confiance est plus que maintenue.

Evelyne Brachet, ancienne infirmière

"Je pense vraiment que si on ne peut pas proposer cet acte en tant que soignant, ça serait, pour moi, une non-assistance à personne en danger de souffrir." En plus de la souffrance physique, Evelyne insiste sur la souffrance psychique qu'engendre le fait "d'assister à sa propre déchéance". "C'est comme un enfer. Respecter leur volonté, c'est une forme de respect". 

Si Evelyne espère que toutes ces histoires servent d'appui, elle a du mal à croire à une avancée. 

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