La fabrication de cigarettes est délocalisée dans d’autres sites européens plus rentables : l’annonce de BAT, British American Tabacco, s’est abattue jeudi 14 décembre sur Boncourt et en France, juste de l’autre côté de la frontière dans le Doubs et Territoire de Belfort.
C’était comme une menace dans l’air depuis fin octobre, c’est confirmé : la fermeture du site BAT de Boncourt aura lieu en 2023. Un coup dur pour les Suisses et les Français, ce sentiment est unanime de chaque côté de la frontière.
BAT, British Tabacco American, était implantée à Boncourt, cette commune de Suisse proche du pays de Belfort-Montbéliard. 220 salariés vont perdre leur emploi dont 118 frontaliers français.
Des salariés dégoûtés
Selon le site de la radio RFJ, les salariés sont particulièrement dépités et en colère. Voici les propos de l’un d’entre eux qui a souhaité resté anonyme : « C’est comme une séparation ou la perte d’un être cher. Pour la plupart, cette entreprise était une famille. On a le sentiment d’avoir été trahi par un groupe pour lequel on a tout donné, travaillé des jours fériés, renoncé à des vacances…
La direction a vu un carnet de chèque plutôt que des êtres humains
Un salarié qui souhaite rester anonyme
Et il ajoute : "Tout le monde est rentré chez lui avec tristesse et dégoût."
Selon Yves Defferrard, membre du comité directeur national du syndicat Unia, interviewé par RFJ, les motivations du groupe américain sont claires : « … Nous sommes face à des décisions d’une multinationale. Pour nous, au niveau suisse, le site de Boncourt est rentable. Pour la direction, il n’est pas suffisamment rentable, ce n’est pas tout à fait pareil. »
Déception des élus, suisses et français
Le Gouvernement jurassien et le Conseil communal de Boncourt sont très inquiets pour les salariés et également pour leurs institutions : « BAT ne peut assurément pas se désengager de son site historique sans assurer des compensations à la hauteur des dommages engendrés pour le personnel en premier lieu, pour les entreprises régionales ensuite et pour les collectivités publiques enfin. »
Mêmes réactions côté français où les élus, eux aussi, et toutes tendances politiques confondues, s’offusquent de cette décision qui privent 220 personnes de travail.
C'est un coup dur à quelques jours de Noël pour ces salariés dont 118 Français
Ian Boucard et Cédric Perrin, élus LR du Territoire de Belfort
Dans un communiqué commun, Ian Boucard, député LR, et Cédric Perrin, sénateur LR et conseiller départemental de ce canton, ajoutent : « Cette délocalisation signe la fin d’un fleuron industriel suisse historique qui était vecteur d’attractivité pour notre territoire et l’activité locale. Nous regrettons également que la direction de BAT n’ait pas souhaité entendre les propositions formulées par les syndicats en faveur d’un plan de sauvetage pour sauver une partie des emplois. »
En effet, les syndicats avaient tenté d’amortir le choc en proposant un plan de sauvetage qui permettait de limiter la casse au niveau de l’emploi, plan qui n’a pas été retenu.
Les deux élus du Territoire de Belfort ont rencontré l’ambassadeur de Suisse en France et se sont assuré que les salariés français bénéficieront des mêmes droits que leurs collègues suisses dans ce licenciement collectif.
Plusieurs familles françaises touchées
Les communes de Boncourt, en Suisse, et de Delle, en France, sont voisines. Parmi les licenciés, se trouvent des habitants de Delle. La maire de cette ville, Sandrine Larcher Divers Gauche, s’offusque de cette délocalisation.
On est abasourdi.
Sandrine Larcher, maire Divers Gauche de Delle
Elle est sous le choc : « Le mois dernier, mon homologue de Boncourt que j’ai rencontré espérait encore. L’histoire de cette entreprise est intimement liée à celle de la ville de Boncourt. C’est une catastrophe pour eux : l’entreprise verse de l’argent à la commune et au canton, ils ne recevront plus rien. Et c’est aussi une catastrophe pour nous : ces salariés qui perdent leur emploi, c’est autant de familles touchées. Je connais des salariés de cette entreprise, qui y sont entrés très jeunes. Ils ont maintenant entre 40 et 60 ans, je connais même une maman solo qui travaille chez BAT. Et tout ça pour des histoires de profits ! C’est inadmissible. On se bat, nous les élus, sur le terrain pour l’emploi et pour une meilleure rentabilité 220 personnes se trouvent sans boulot… »
Un site historique de plus de 200 ans d'existence ferme ses portes
Cette entreprise est née à Boncourt en 1814. Elle a été rachetée en 1996 au cigarettier Rothmans International pour être revendue 3 ans plus tard à British American Tabacco dont le siège se trouve à Londres.
Boncourt, la commune suisse compte 1200 habitants et BAT employait 220 personnes.