"Aujourd’hui, l’espèce menacée, c’est plutôt l’éleveur que le loup", le ministre de l'Agriculture réagit aux attaques de troupeaux dans le Doubs

A Pontarlier (Doubs), le ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, a rencontré les agriculteurs et les élus ce samedi 22 octobre, à l'occasion du Super-Comice. La fête de l’élevage quinquennale fait son grand retour, dans un contexte d'attaques de loup.

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Voilà sept ans que les éleveurs l’attendaient, et il fait enfin son grand retour. Le Super-Comice s’est tenu ce samedi 22 octobre à Pontarlier, après deux reports liés au covid. Une tradition agricole qui rassemble les plus beaux spécimens de la race montbéliarde, tous les cinq ans, et attire des éleveurs de toute la France. 600 vaches ont pavané dans les rues de Pontarlier et 20 000 personnes se sont réunies pour les admirer… dont Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

 Un contexte tendu

Dès le matin, la visite officielle a pris du retard. Le ministre s’est rendu chez un éleveur ayant subi dans la nuit une attaque dans un troupeau, attribuée au loup. Un changement d’emploi du temps symptomatique du contexte dans lequel se déroule cette fête. Le Super-Comice est en effet rattrapé par les récentes attaques du loup dans les troupeaux et des "tirs de défense" contre le prédateur. Des opérations qui ont parfois donné lieu à des altercations entre associations de défense du canidé et agriculteurs.

Si Marc Fesneau assure que la visite "était prévu bien avant, il y a quelques semaines", il était évidemment attendu sur ces questions. "À l’écoute des éleveurs", le ministre dit tenter "d’apaiser la situation" et "d’ouvrir le dialogue", tout en pointant du doigt ce qu’il surnomme les "yaqu’àfautqu’onistes", "les gens qui sont dans des positions radicales : ‘y a rien à faire, c’est facile de protéger les bovins’."

Une posture que le ministre a tenu tout au long du comice, et qui peut se résumer en une phrase : "Aujourd’hui, l’espèce menacée, c’est plutôt l’éleveur que le loup dans ces territoires, et donc on a besoin de protéger les éleveurs." À plusieurs reprises, il affirme que les troupeaux du massif jurassien sont "à l’évidence non-protégeables". Chiffres à l'appui, Marc Fesneau déroule son explication : "Il faudrait mettre des dizaines de kilomètres de barrières partout, qui paye ? Il faudrait aussi mettre des patous (ndlr : chiens de montagne) partout dans un territoire qui par ailleurs a des circuits de randonnées, de VTTistes, des marcheurs… On a compté, il faudrait en tout 8000 patous."

Réguler le loup

Face à la "détresse" des agriculteurs, Marc Fesneau précise alors les solutions qu’il envisage. D’abord, faciliter les dispositifs de "tirs de défense" sur le prédateur. "On a des dispositions de tirs qui entravent la capacité de lutter contre de la prédation. Personne n’a remis en cause le fait qu’il y ait du loup. Cependant, il y a des cas où cela n’est plus compatible, où il n’y a pas de situation d’équilibre, détaille-t-il. Il faut qu’on ait des conditions de tir qui permettent, là où il y a de la pression de prédation, de la lever par du prélèvement de loup."

Ces mesures à l’échelle nationale pourraient être complétées par des discussions au sein de l’Union européenne. C’est en tout cas ce que souhaite le ministre : "Dans le cadre européen, nous devons faire évoluer le statut du loup. Non pas pour le faire disparaître, mais pour qu’on puisse le réguler parce que la biodiversité du loup c’est une chose, mais la biodiversité des haies, de l’alternance entre bois et prairies, c’est une disparition de la biodiversité qui serait gravissime."

 Le ministre réagit à l'agression de nos deux journalistes

Le 19 octobre dernier, au soir, deux journalistes de France 3 Franche-Comté ont été agressés par des agriculteurs lors d'un reportage à Chaux-Neuve. Nos collègues avaient couvert une opération de tir sur le loup, avortée par la présence de militants écologistes. Une altercation que nous avons détaillée dans cet article : VIDEO. "Ils voulaient nous éclater la gueule" : deux journalistes de France 3 Franche-Comté agressés par des éleveurs anti-loups dans le Haut-Doubs

De lui-même, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a apporté son soutien à nos collègues "chahutés lors d’une visite sur l’exploitation".  "Chahutés" ? Le terme semble inadéquat, puisque cette agression a causé 10 jours d’incapacité totale de travail (ITT) pour l’un des journalistes. Le ministre a repris : "Je condamne la violence. Elle est inacceptable partout. Je condamne toute forme de violence, quelles qu’elles soient. […] Moi je pense qu’il ne faut jamais de violence, qu’il faut se mettre autour de la table. Je le dis aux agriculteurs mais aussi à ceux qui ne respectent pas la loi."

Marc Fesneau a ensuite tenu à distinguer la situation des journalistes dans leur mission d’information et l’action des militants écologistes lors de cette soirée du 19 octobre : « Vos confrères ne sont pas le sujet. La nécessité de dialogue sur le territoire, ce n’est pas le sujet de personnes qui viennent sur des propriétés entraver une action décidée sur le Préfet et qui est une décision légale. Cela n’a rien à voir avec le travail de vos confrères. Vos collègues doivent pouvoir faire leur travail dans de bonnes conditions. La liberté de la presse pour moi est intangible et il y a le respect des personnes qui est intangible. Le respect du droit de propriété aussi, et ce ne sont pas vos collègues qui sont concernés, mais les associations qui viennent attiser la colère des agriculteurs. »

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