L'URSSAF et l'Office de la statistique suisse publient un deuxième recueil de données, ce 28 janvier 2025. Revenus moyens, écarts de salaires hommes femmes, kilomètres parcourus... Découvrez les particularités des frontaliers vivant en Franche-Comté.
La France et la Suisse travaillent ensemble à mieux connaître le profil et les besoins des travailleurs frontaliers. Dans cette optique, l'URSSAF et l'Office fédéral de Statistique suisse (OFS) publient un deuxième recueil de données basé sur des statistiques de 2023, ce mardi 28 janvier.
Parmi les 224 000 frontaliers français, il en ressort que les Comtois sont ceux qui vivent dans les conditions les moins confortables. 47 500 personnes, dont 60% d'hommes, pour qui travailler en Suisse demande plus d'efforts que dans d'autres départements frontaliers. On vous explique pourquoi.
40.000 à 49.000 euros par an
Ils sont en premier lieu moins bien rémunérés. Le revenu fiscal de référence est la somme du salaire net imposable et d'autres revenus exonérés d'impôt. Celui des travailleurs frontaliers français était de 55 472 euros en 2023. Pour les Comtois, c'était moins : 49 570 dans le Doubs, 48 712 dans le Jura, tandis qu'on chute à 43 924 pour le Territoire de Belfort et 40 074 pour la Haute-Saône, le département français le moins bien loti en la matière.
Ces revenus restent nettement supérieurs à ceux que l'on connait en France, où le salaire moyen était de 2730€, la même année. Parmi les frontaliers, ceux qui tirent la moyenne vers le haut sont les frontaliers de l'Ain et de la Haute-Savoie, avec plus de 60 000 euros à l'année, soit 5 000 euros par mois. Ces écarts de salaires entre Alpins et Comtois ne sont d'ailleurs pas spécifiques à 2023, mais constants dans le temps, selon l'URSSAF.
Des emplois moins qualifiés...
Comment les expliquer ? Les Savoyards travaillent en majorité dans le canton de Genève, qui offre des emplois plus qualifiés, tandis que l'industrie manufacturière est prépondérante dans l'arc suisse nord, là où travaillent les frontaliers comtois.
À savoir que ces données ne comptabilisent pas les intérimaires, un type de contrat surreprésenté dans les professions médicales. Notons aussi que l'écart de salaire hommes femmes est de 21% pour les frontaliers français ; c'est un peu moins qu'en France.
... pour plus de temps de trajet
À cela s'ajoutent de plus rudes conditions de transports. Une étude de l'INSEE l'annonçait déjà en novembre dernier : les frontaliers comtois sont ceux qui parcourent les plus grandes distances pour se rendre au travail. 43 kilomètres en moyenne, contre 28 pour les frontaliers de la région Auvergne-Rhône-Alpes et 35 pour ceux du Grand Est. À titre de comparaison, le Français moyen vit à 14 km de son lieu de travail.
La distance n'est cependant pas toujours proportionnelle au temps de trajet. L'autoroute, dans le canton helvétique du Jura, amène plus rapidement les Belfortains au travail en Suisse, tandis qu'aux alentours de Jougne dans le Haut-Doubs, les bouchons quotidiens sur la RN 57 sont mal vécus par les automobilistes.
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Une population toujours en hausse
7 frontaliers comtois sur 10 vivent le Doubs. Le reste dans le Jura, le Territoire de Belfort et plus rarement en Haute-Saône. Dans les zones les plus proches de la frontière, mais aussi les mieux desservies jusqu'à la Suisse, le taux de frontaliers explose. Parmi les résidents de la communauté de communes Val de Morteau, un habitant sur deux travaille en Suisse, par exemple. Aux Rousses, à Pontarlier et à Maîche, c'est plutôt un sur trois.
Et cette population continue d'augmenter. De 8 à 10% dans le Doubs et le Jura, de 13% dans le Territoire de Belfort et de 17% en Haute-Saône, de juin 2024 à juin 2023, selon un autre rapport de France Travail Bourgogne-Franche-Comté. Cette nouvelle étude de l'URSSAF apporte une nuance : le nombre de frontaliers qui optent pour le système de Sécurité sociale, lui, diminue.
"Ce constat illustre sans doute en partie une attractivité moins forte de la Sécurité sociale française comparée à la Sécurité sociale Suisse, (...) plus favorable pour les actifs célibataires ou sans charge de famille et à hauts revenus", donne en guise d'explication le rapport.
Une mauvaise conjoncture en 2024
En 2024, ces chiffres seront-ils revus à la baisse en raison de la crise de l'horlogerie ? En Suisse, dans ce secteur, le taux de chômage a bondi de 70 % l'année dernière et les effectifs baisseront en 2025, selon le secrétaire général de la Convention patronale de l'industrie horlogère suisse.
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Une autre mauvaise nouvelle pend au nez des frontaliers. Depuis un accord européen de 2004, le versement de leurs allocations est assumé par l'UNEDIC, donc la France. Mais le gouvernement envisage de revoir la formule de calcul de ces allocations, pour les réduire in fine de moitié. La réforme dissuadera peut-être de tenter sa chance en Suisse, pays où les licenciements sont réputés fréquents et expéditifs.