Coronavirus Covid-19 : "confinement", "catastrophe sanitaire"... Comment gérer psychologiquement cette situation ?

Alors que l'épidémie de coronavirus continue à progresser rapidement en France, le gouvernement a pris plusieurs mesures drastiques pour enrayer la contagion. Pourquoi cette situation est anxiogène et comment gérer psychologiquement une telle situation ? Une psychologue nous répond.

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L'épidémie de coronavirus, virus également appelé Covid-19, sévit en Europe et en France depuis maintenant plusieurs semaines. En quelques jours, les choses se sont considérablement accélérées sur notre territoire, au rythme des différentes annonces du Président Emmanuel Macron et de son gouvernement. Dans le Doubs et le Territoire de Belfort, la situation est particulièrement préoccupante, notamment dans les hôpitaux. 
 
Dimanche 15 mars, 412 personnes ont été testées biologiquement et identifiées comme positives au COVID-19 en Bourgogne-Franche-Comté, soit 73 de plus que samedi. Ce chiffre a presque doublé en 72 heures, signe de l’accélération de l’épidémie, explique l'Agence Régionale de Santé (voir l'évolution de la maladie dans notre région). 

Avant qu'un confinement renforcé ce lundi soir soit annoncé par le président de la République Emmanuel Macron, de nombreux médecins et spécialistes en infectiologie ont durci le ton en demandant expressément à la population française d'adopter des mesures de confinement, dans le but de freiner la propagation du coronavirus et ainsi soulager les équipes soignantes, en surcharge de travail et en manque d'équipements pour certains. "J'invite les habitants de Bourgogne-Franche-Comté à se confiner à domicile, confiner son entourage, limiter les déplacements, une personne seulement dans la famille va faire les courses, on se lave les mains, on ne va pas voir les personnes fragiles..." a expliqué à plusieurs reprises Laurent Thines, membre du collectif inter-hôpitaux et docteur au centre hospitalier de Besançon sur France 3 Franche-Comté. De son côté le collectif inter-hôpitaux déclare : "Il faut nous préparer à une véritable catastrophe sanitaire", via les réseaux sociaux.

La situation est réellement hors du commun. Jamais la population française n'a vu l'ensemble de ses commerces fermés (pour au moins un mois). Même lors des différentes guerres et conflits internationaux, jamais une telle situation ne s'est déroulée sur le sol français. En Italie et en Espagne, les populations sont d'ores et déjà confinées, offrant à apprécier quelques scènes et situations inédites. 

En cette période, le stress et l'anxiété sont évidemment palpables pour tous. Plusieurs facteurs rendent la situation anxiogène : la nécessité de réorganiser sa vie professionnelle via la télétravail, le confinement, les informations contradictoires et la prolifération de fake news mais aussi la plongée dans l'inconnu en terme de durée mais aussi d'impact global sur nos vies, notre santé et notre économie.

Sophie Blin Durand Viel, psychologue à Besançon, a accepté de nous livrer quelques réflexes et attitudes à adopter, pour mieux comprendre nos fonctionnements psychologiques et les adapter à cette période troublée.


S'informer correctement
 

Il est important de rappeler que pour mesurer pleinement une situation, il faut être informé correctement. La propagation du coronavirus entraîne, parallèlement, la propagation d'une multitude de fausses informations. Il faut y faire attention et veiller à "repérer les canaux d'information ou les sites fiables", tout en partant du "principe que nous allons avoir des informations contradictoires, même sur les sites fiables, du fait que tout le monde navigue à vue" explique la psychologue.

En effet, des messages listant des recommandations "simples et accessibles" pour lutter contre le virus ont été partagés des milliers de fois ces derniers jours sur les réseaux sociaux Facebook et WhatsApp. La plupart du temps, ces messages transmis massivement par simple copier-coller, envoi d’e-mails groupés ou partage de publication sont truffés de fausses informations. Pour prendre la mesure du phénomène et ainsi gérer au mieux les émotions qui en découlent, il est important de ne pas s'attarder sur ces messages non sourcés et de ne pas les diffuser.
 

Travailler l'acceptation et l'adaptation


Informations changeantes et contradictoires, avenir incertain... L'épidémie de coronavirus met nos nerfs à rude épreuve. "Il faut réussir à se dire qu'il y a des choses sur lesquelles je n'ai pas la main. Je n'ai pas la main sur l'impact du virus sur la santé et la société, ni sur les décisions gouvernementales. Mes affaires à moi, c'est mon environnement, j'essaie de reprendre la main sur ce sur quoi je peux reprendre la main" conseille Sophie Blin Durand Viel. 

"Deux choses en ce moment sont particulièrement difficiles psychologiquement : le confinement qui demande une privation de liberté et une privation totale de liens sociaux en cas de confinement total" détaille la psychologue. Ces deux choses rendent l'acceptation difficile, puisque cela va à l'encontre de nos fonctionnements naturels d'êtres sociaux. "Il y a un travail de construction intellectuelle à faire : protéger mes parents c'est de ne pas les voir, alors que spontanément si on voulait les protéger on irait les voir" concède Sophie Blin Durand Viel.

"Et dans une société où les notions de liberté et de mobilité sont très valorisées, les mesures pour restreindre les déplacements et les réunions de personnes obligent les Français à revoir complètement leurs habitudes et à changer de paradigme" appuie le psychiatre Christian Navarre, interrogé par nos confrères de 20minutes.

"On a le choix de le vivre comme une contrainte extérieure ou on peut se dire qu'on peut s'approprier l'importance de cette démarche, dans un souci de santé et de sécurité collective" encourage-t-elle, tout en précisant que l'être humain dispose d'une formidable capacité d'adaptation.
 
 

Penser collectif


Certaines personnes peinent à comprendre l'importance des gestes barrières ou encore l'importance de limiter drastiquement leurs déplacements. "Je suis en bonne santé, je ne risque rien !" entend-on si et là. Malheureusement, la situation apparaît bien plus compliquée que cela. 

"Les professionnels de santé ont pris des mesures fortes et nous avons l'impression que le gouvernement n'aide pas la société à suivre. On peut s'attendre à une crise profonde. Au centre hospitalier, on songe déjà à ne traiter que les urgences, dans les prochaines semaines", expliquait le Dr Thines sur notre plateau dimanche soir. Cette information est d'une importance capitale. En effet, les citoyens doivent comprendre que limiter leurs déplacements permet de ralentir la propagation et laisse ainsi une chance aux hôpitaux d'absorber correctement les malades entrants. Plus ils seront nombreux, sachant que le pic de l'épidémie n'est pas atteint selon les scientifiques, plus la situation sera grave.

Pourquoi certains Français ne respectent-ils pas les consignes de sécurité en période d'épidémie de covid-19 ? Pour Sophie Blin Durand Viel, "cela fait partie de notre principe de croissance. Tout ce qui est interdit suscite notre curiosité. C'est le principe du désir". De plus, les personnes sceptiques ou complotistes, possèdent leur propres système de pensée. "Tant que certaines personnes n'ont pas expérimenté elle-même la chose, elles ont le doute, et ça c'est très compliqué à déconstruire" détaille la psychologue. 
 

Comprendre les phénomènes de suivisme


Pour mieux comprendre les comportements humains, il faut remonter un peu plus loin dans notre histoire et dans la construction de nos êtres. Pourquoi les magasins sont-ils dévalisés depuis plusieurs jours alors que les professionnels du secteur de la grande distribution affirment qu'aucune pénurie n'est envisagée ?

"Le suivisme : c'est quelque chose qu'on explique par notre condition de grands mammifères grégaires. Pour simplifier, on vit en troupeau. Les phénomènes de contagion émotionnelle sont extrêments puissants car ils sont faits pour nous sauver la vie. On se contamine sur le plan émotionnel pour pouvoir survivre" conclut Sophie Blin Durand Viel, tout en précisant que ces notions et ces conseils s'adressent principalement aux personnes en bonne santé en situation de confinement.

"Cela fonctionne pour les gens qui ne sont pas dans des situations critiques, avec des pertes de proches par exemple ou des risques graves pour leur santé... Tout le monde à les mêmes règles, mais la réalité sera différente pour tout le monde. Malheureusement elle va forcément peser sur les plus précaires et les populations à risque" conclut-elle.
 
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