6e jour du procès de Nicolas Zepeda pour l'assassinat de Narumi Kurosaki : "Je ne m'inquiète pas pour elle", les étranges propos de l'accusé dévoilés

Nicolas Zepeda, accusé de l'assassinat de son ex-petite amie Narumi Kurosaki en 2016 à Besançon, est jugé devant la cour d'appel de Vesoul (Haute-Saône) du 4 au 22 décembre 2023. Revivez les débats du sixième jour de ce procès, minute à minute dans cet article.

► Pour lire les débats depuis le début, rendez-vous en bas de page.

Consultez les détails du 6e jour de procès dans cet article.

18h50 : l'audience est brièvement reprise avant d'être suspendue pour ce soir. Elle reprendra ce mardi à 9h avec l'audition d'Arthur Del Piccolo, petit ami de Narumi Kurosaki au moment de sa disparition. D'abord soupçonné par la police, il a finalement été mis hors de cause. Ensuite, la mère et les sœurs de la victime seront appelées à la barre. En première instance, leurs témoignages et la souffrance dont elles avaient témoigné face à la cour avaient profondément marqué les esprits.

18h42 : L'audience est suspendue en urgence. La mère de Narumi, Taeko Kurosaki, craque et se débat sur son banc avant de faire un malaise. Les propos de l'accusé lui sont insupportables. Elle est contenue par ses deux filles. 

18h36 : Me Portejoie, avocat de Nicolas Zepeda, veut également interroger son client. "Je suis un peu fatigué, j'aimerais bien avoir ma mère dans les bras", dit le Chilien. "Mon rôle est aussi de vous éprouver parfois. Je m'interdis de laisser partir les jurés dans ces conditions ce soir. Je ne sais pas si vous prenez la mesure de ce qu'il s'est passé ce matin et des implications que cela a pour votre procédure, explique l'avocat qui va tenter une nouvelle fois d'infléchir la position de son client. Alors qu'est-ce que vous nous dites ?". "J'aimerais bien avoir les réponses, croyez-moi je fais de mon mieux pour trouver des explications", dit l'accusé. "Il faut tout dire, vous avez compris ? Allez je vous laisse...", abandonne son conseil.

18h21 : Des questions de l'avocat général vont à présent être posées à l'accusé, concernant les débats qui ont eu lieu aujourd'hui. "Oui ou non, avez-vous demandé aux témoins de supprimer vos échanges ?", demande Etienne Manteaux. "Je n'ai pas demandé dans le sens d'ordonner. Ce que j'ai dit, c'est 'si ça te dérange, efface-le", répond l'accusé, prétextant avoir voulu donner "un conseil". "Vous avez fait deux réponses différentes ce matin", note le président. "Pourquoi elles vous envoient une copie d'écran pour attester de la suppression alors ?", appuie Etienne Manteaux. Nicolas Zepeda s'exprime toujours en français et livre des explications aléatoires. "Donc elles mentent ?", demande Etienne Manteaux. "Je ne sais pas", répond l'accusé. Il remet en doute des messages envoyés de sa part à Narumi Kurosaki lui demandant de supprimer les garçons de son compte Facebook. "C'est d'effacer ces gars et m'envoyer une copie d'écran de ça", peut-on lire sur des messages projetés dans la salle. L'accusé tente de brouiller les pistes et admet finalement, poussé par son avocat : "Je le regrette de toute façon. Je ne me reconnais pas dans ces phrases-là""Je m'en moque que vous regrettiez ! Vous l'avez écrit, vous êtes coutumier du fait", tempête Etienne Manteaux. "Oui, sûrement mais non je n'ai pas l'habitude de demander des captures d'écran", bégaie presque l'accusé sans pour autant se démonter.

18h17 : Concernant la déposition du cousin de l'accusé, Juan Felipe, témoin clé dans cette affaire, un mail lui a été adressé la semaine dernière de la part de la justice française. Aucune réponse n'a été reçue. "Je constate qu'on ne veut pas qu'il soit présent manifestement", dit Me Schwerdorffer. 

17h56 : l'audience reprend. Une déposition est lue concernant une autre affaire judiciaire, dans laquelle le corps d'une femme, de la même taille que la victime, a été transporté dans une grande valise. Une photo est projetée dans la salle, celle du corps de la femme recroquevillé dans la valise. Il est donc matériellement possible que le corps de Narumi Kurosaki ait été transporté dans une valise. 

17h18 : l'audience est suspendue pendant 25 minutes. Nicolas Zepeda va être interrogé dans la foulée.

16h54 : Christian R. intervient depuis la cour d'appel de Nancy, en visioconférence. Il est expert en informatique et a analysé l'ordinateur de la victime. Sa voix résonne dans une salle d'audience comble. Il détaille les fichiers retrouvés dans l'ordinateur de Narumi Kurosaki. "J'ai trouvé dans la corbeille de l'ordinateur une photo d'un homme avec un chapeau de Mickey et Narumi Kurosaki. La photo a été copiée sur le disque dur le 5 septembre 2016 puis placée dans la corbeille le 9 octobre 2016". Cet homme, c'est Nicolas Zepeda. La photo est intitulée "Meilleur couple de l'Année". "J'ai trouvé plus de 1000 messages échangés entre Nicolas Zepeda et Narumi Kurosaki. Certains évoquent une rupture amoureuse. Le 8 octobre 2016, il y a des échanges au sujet d'une mise enceinte de Narumi Kurosaki", explique Christian R. Comme pour chaque témoin, l'expert répond ensuite à la cour et aux différents avocats. 

16h43 : La mère de Narumi Kurosaki semble particulièrement touchée par cet exposé. Elle apparaît de plus en plus repliée sur elle-même sur son banc. Ses filles, installées de chaque côté d'elle, la prennent dans leurs bras. Me Portejoie, avocat de Nicolas Zepeda, interroge à son tour l'expert. La question centrale est la suivante : Narumi Kurosaki a-t-elle pu être tuée sans que la scène de crime ne laisse apparaître de traces de sang ? "C'est tout à fait possible", répond le légiste en développant à nouveau sa démonstration. Nicolas Zepeda est impassible dans son box. "Je n'ai pas d'arguments pour hiérarchiser les modes opératoires qui auraient pu mettre un terme à la vie de Narumi Kurosaki", conclut le médecin légiste avant d'être remercié pour son concours. 

16h32 : Le médecin légiste continue à répondre à des questions très techniques concernant les méthodes pour donner la mort à quelqu'un et notamment sur la durée du processus, ainsi que sur le temps qu'il faut à un corps pour entrer en décomposition. La semaine dernière plusieurs témoins ont dit avoir entendu des cris et des bruits dans la résidence universitaire dans laquelle vivait la victime, pendant 5, 10 minutes. Les enquêteurs supposent que Narumi Kurosaki, qui mesurait 1m62 pour 54 kilos, a pu être tuée par un étranglement ou une asphyxie. Son corps aurait pu être plié pour être dissimulé dans une "grande valise". "C'est tout à fait possible", dit Antoine T.. Étienne Manteaux, avocat général, rappelle aux mémoires une autre affaire bien connue à Vesoul : celle du meurtre par son mari d'Alexia Daval, en 2017. Aucune trace de sang n'avait été retrouvée dans la maison du couple de Haute-Saône. "Je m'excuse auprès de la famille d'entrer dans des détails de ce type", dit le médecin légiste qui poursuit ses explications au sujet du processus de destruction d'un cadavre. 

16h28 : Me Schwerdorffer, avocat d'Arthur Del Piccolo, l'interroge : "Combien de temps pour qu'une personne décède par strangulation à mains nues ?". "Cela dépend d'où on appuie mais cela peut durer environ 10 secondes pour que la victime perde connaissance et ensuite si la pression est maintenue, le décès intervient en l'espace de 5 minutes en moyenne", détaille le médecin légiste. L'avocat bisontin interroge ensuite Antoine T. concernant les morts par suffocation. "La personne va perdre connaissance entre 1 à 2 minutes d'apnée. Cinq minutes après on aura des lésions irréversibles au niveau du cerveau". La rigidité complète d'un corps intervient 12h après le décès d'une personne, explique le médecin.

Si l'on reste sur l'hypothèse de la strangulation pure, cela ne laisse pas nécessairement de trace sur la scène de crime.

Antoine T., médecin légiste

16h03 : L'audience reprend avec l'audition d'un expert, Antoine T.. Ce dernier a analysé le dossier médical de Narumi Kurosaki. Le médecin légiste intervient en visioconférence depuis Besançon. Le 26 octobre 2016, la victime a fait l'objet d'une visite médicale "systématique" qui pourrait avoir été prescrite aux étudiants étrangers de manière automatique. "Au 26 octobre 2016, Mademoiselle Kurosaki âgée de 21 ans était en bon état de santé, n'était pas enceinte et ne montrait aucun signe d'une quelconque pathologie, psychiatrique, somatique ou dentaire". Pour rappel, le corps de la victime n'a pas pu être analysé par un médecin légiste, puisqu'il n'a jamais été retrouvé. 

L'audience est suspendue jusqu'à 15h55.

14h41 : Nicolas Zepeda souhaite poser quelques questions à la témoin par l'intermédiaire du président. "Madame Sugisaki dit qu'elle n'a pas fait partie d'un groupe sur les réseaux sociaux concernant la disparition de Narumi Kurosaki, demande Nicolas Zepeda. Qu'est-ce que vous me direz si je vous dis que j'ai une capture d'écran d'une fille japonaise qui a fait partie de ce groupe, dans lequel vous vous organisez pour m'accabler ?" Le président ne souhaite pas que cette question soit posée à la témoin car elle a déjà répondu, qu'à sa connaissance, aucun groupe de ce type n'avait été créé. Dernière question du président à Monsieur Zepeda : "Avez-vous demandé à la témoin d'effacer les échanges que vous avez eus avec elle ?". "Ce que je lui ai dit, j'essaie d'être précis, c'est 'si ça dérange efface-le", l'idée développée par l'accusé, qui s'exprime en français, est tout simplement incompréhensible. 

14h31 : L'audience reprend. La pièce est versée au débat. Me Portejoie poursuit ses questions. "Je suis désolé d'insister, il est tard, vous allez m'en vouloir", précise l'avocat avant d'aborder la question de l'existence d'un groupe sur les réseaux sociaux en lien avec la disparition de Narumi Kurosaki. Mégumi Sugisaki répond : "un groupe de ce type n'a jamais été constitué". "J'essaie d'approfondir...", termine Me Portejoie, dont les questions sont quelque peu tombées à plat.

L'audience est suspendue 10 minutes.

14h12 : Scène quelque peu insolite : l'avocat de la défense demande à la témoin si elle dispose encore, dans son portable, des preuves d'effacement des conversations avec Nicolas Zepeda. À la demande du président, elle sort son téléphone de son sac posé à ses pieds et le fait parvenir jusqu'à François Arnaud. Cette preuve n'apparaissait pas dans le dossier jusqu'à présent. Des photocopies de la photo doivent être faites pour être transmises aux différentes parties... La pause méridienne n'a pas encore eu lieu mais l'audience doit être suspendue quelques minutes pour réaliser ces opérations. L'audition de l'expert en ADN, prévue dans l'après-midi, est d'ores et déjà décalée à vendredi, en raison du retard accumulé ce lundi.

13h53 : Me Portejoie veut connaître les autres phrases traduites par la témoin à la demande de son client. Mégumi Sugisaki ne s'en souvient pas. L'avocat de Nicolas Zepeda s'attarde sur plusieurs points de détail. Ils représentent les seuls leviers d'action dont il dispose pour défendre son client face à ce témoignage. Nicolas Zepeda dans son box se lève et parle à son avocat, durant un moment de flottement, comme s'il le conseillait. 

13h33 : Me Galley, avocate de la famille de Narumi Kurosaki, demande à la témoin Mégumi Sugisaki de préciser le caractère de Nicolas Zepeda. "Il ne supporte pas les contradictions, de qui que ce soit", répond la jeune femme qui explique aussi que l'accusé disait "des horreurs" sur son ex-petite amie, à partir du 15 décembre 2016. Me Portejoie, avocat de Nicolas Zepeda, prend à son tour la main sur les questions. "Vous êtes arrivée quand en France ? Et vous repartez quand ? On peut vous demander qui a financé ce voyage [depuis le Japon] ?", lui demande-t-il, sous-entendant que l'investissement de la témoin est démesuré et qu'il répond à une certaine "colère" d'avoir été manipulée. "Samedi matin. [Et je pars] le 23 décembre, répond la jeune femme toujours très calme, comme depuis le début. Mes billets d'avion ont été payés par la justice française. Et mon hôtel a été réservé par mes soins, mais je ne sais pas qui va payer mon séjour".

13h05 : Ce témoignage spontané a été particulièrement nourri et éclairant. Les questions sont à la cour, puis aux avocats des parties civiles, suivies de celles des avocats de la défense. "J'avais confiance en lui. J'aimerais connaître la vérité, comme tout le monde, et je voulais montrer à Nicolas qui se trouve ici que j'assumais mon rôle, en étant physiquement présente", dit Mégumi Sugisaki, d'un calme impressionnant. Nicolas Zepeda l'écoute depuis son box sans réaction particulière et continue à prendre des notes. L'accusé a tenu nombre de propos qui ont interpellé la témoin : "c'est lui-même qui m'a donné ces éléments". Il lui a notamment expliqué qu'un Chilien ne pouvait pas être extradé vers la France, en raison d'un accord entre les deux pays, et qu'on ne savait pas où avait pu partir le criminel, puisqu'en Europe, il n'y a pas besoin de passeport pour passer les frontières. "Je ne veux pas qu’on me soupçonne de sa disparition, je te remercie de ne pas évoquer notre conversation avec qui que ce soit", lui a-t-il dit aussi. "Il parlait très vite, comme une mitraillette", se souvient la témoin.

Je ne m'inquiète pas pour elle (ndlr, Narumi Kurosaki). Elle s'amuse sûrement avec un autre homme. Je suis sûr qu'elle réapparaîtra bientôt.

Propos tenus par Nicolas Zepeda à la témoin

12h20 : Le 29 décembre 2016, elle apprend que Nicolas Zepeda est le principal suspect dans la disparition de Narumi Kurosaki. "Quand j'ai eu l'information concernant un Chilien impliqué dans la disparition de Narumi, cela ne faisait pas de doute pour moi. Il s'agissait de Nicolas. Cela a été dur car c'était mon ami. Et cela a été dur car c'est quelque chose que je pensais déjà dans ma tête. J'ai eu un grand choc, je me souviens très bien de cette date", rapporte-t-elle, toujours aussi précise dans sa déposition. Elle se rappelle le moment où la police lui a précisé quelles phrases avaient été envoyées depuis le portable de Narumi Kurosaki à ses proches, ces mêmes phrases traduites par la témoin à l'accusé. "Cela a été un choc indescriptible". La témoin, qui parle spontanément depuis environ une heure, explique avoir poursuivi les échanges avec l'accusé pour tenter d'en savoir plus au sujet de la disparition de Narumi Kurosaki. Mégumi Sugisaki dit avoir été "manipulée par [Nicolas Zepeda]". Elle dit avoir perçu une vraie distance de l'accusé par rapport à la disparition de Narumi Kurosaki, qui justifiait sa présence au Chili, et lui parlait de sa nouvelle vie, sans rien qu'elle lui demande : "Il n'avait pas l'air de s'inquiéter". "Ces éléments ont renforcé les soupçons que j'avais sur lui. Tout ce qu'il me disait ou me montrait faisait partie de son autodéfense", dit à la barre Mégumi Sugisaki, ancienne amie de l'accusé.

12h07 : "En 2016, j'ai eu un message de Nicolas Zepeda qui me demandait de traduire deux petites phrases : 'Je prends un train pour partir en voyage, je ne peux pas me servir du wifi' et 'Je me suis disputé avec [quelqu'un]', se souvient la témoin. Elle parle d'échanges particuliers et développe ensuite son propos, de manière claire et posée. "Je lui ai demandé maintes fois pourquoi et pour qui il voulait utiliser ces phrases. Il n'a jamais répondu", ajoute-t-elle. Elle aussi, comme la témoin précédente, a trouvé ces demandes étranges, précisant que Nicolas Zepeda voulait absolument traduire des phrases comme si c'est une femme qui les prononçait. Elle ne se souvient pas bien des dates auxquelles ont eu lieu ces échanges, mais d'une autre date : "Le 15 décembre 2016, il m'a demandé de l'appeler par téléphone. Il m'a demandé d'effacer les échanges de messages et m'a dit de ne pas lui demander pourquoi." Une fois encore, le Chilien a demandé une preuve de suppression à son amie. Elle s'exécute. Pour rappel, Narumi Kurosaki a disparu dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016. "La disparition ou pas de Narumi n'était plus son affaire", rapporte la témoin. Nicolas Zepeda lui dit d'ailleurs ne pas être très peiné car il a tourné la page et a une nouvelle petite copine allemande. L'accusé a aussi dit spontanément à son amie que Narumi Kurosaki était violente avec lui, qu'elle le frappait. Cette version n'a pas convaincu du tout Mégumi Sugisaki qui décrit la victime comme "très souriante, comme un soleil".

11h43 : "Il était toujours aidant, aimable, gentil et attentionné. J'avais l'impression d'avoir un grand frère soudainement. Je me confiais souvent à lui", se souvient la témoin qui explique qu'elle va décrire la personnalité de Nicolas Zepeda de manière "subjective". "Il était facile à aborder et amical. Je percevais sa rapidité de réflexion et l'intelligence qu'il avait. Au Brésil, j'ai failli me noyer, et il m'a sauvée", explique Mégumi Sugisaki. "C'était quelqu'un de fier, une fierté qui dénote. Il détestait qu'on se moque de lui, même en s'amusant", ajoute-t-elle. Grâce à cette témoin, ancienne amie, on en apprend un peu plus sur la personnalité du Chilien de 33 ans. "Parfois, il devenait très émotif. J'ai constaté qu'il était infantile. Il a une fluctuation émotionnelle d'une ampleur insondable", se souvient Mégumi Sugisaki, en donnant des exemples d'une situation précise, notamment d'un séjour à Disneyland. Elle ignorait totalement que l'accusé avait une petite amie. "Je n'ai jamais rencontré Narumi Kurosaki", dit-elle, alors que les deux femmes se trouvaient sur le sol chilien au même moment. "Il protège sa vie privée de façon extrême, analyse-t-elle. Il ne parlait jamais de ses faiblesses. Il ne voulait jamais se dévoiler".

Avec le temps, j'ai commencé à sentir un petit décalage entre nous. Il est brillant, il en est conscient. Et cette conscience lui a donné une sorte de sentiment de supériorité. Il se décrivait lui-même comme étant nettement supérieur aux autres.

Mégumi Sugisaki, témoin

11h21 : Troisième témoin de cette matinée, Mégumi Sugisaki. Elle est physiquement présente dans la salle d'audience vésulienne. Elle a vécu un mois avec l'accusé au Chili. "En 2013, j'ai décidé d'étudier l'espagnol et le site que j'avais choisi pour le faire était Tsukuba. Je me suis engagée dans un cercle d'amis pour échanger des cours de langue. C'est là que j'ai rencontré monsieur Zepeda", déclare en japonais la jeune femme. "En 2015, j'ai décidé d'aller au Chili pour me perfectionner en espagnol. J'ai été logé pendant un mois dans l'appartement partagé par Nicolas Zepeda et sa soeur", explique-t-elle. Après son départ de l'appartement, elle a continué à échanger avec l'accusé. Cette dernière a également voyagé au Brésil avec Nicolas Zepeda, car ils avaient des amis en commun dans ce pays. 

11h07 : Les échanges techniques et les détails concernant des connexions frauduleuses de la part de l'accusé sur le compte numérique universitaire de Narumi Kurosaki se poursuivent. Pour rappel, Nicolas Zepeda est soupçonné d'avoir effectué une surveillance accrue de son ancienne petite amie sur internet. La semaine dernière, une témoin a expliqué à la cour que Nicolas Zepeda avait supprimé tous les contacts masculins du compte Facebook de Narumi Kurosaki, corroborant la thèse de l'emprise du jeune homme sur la victime. Etienne Manteaux, avocat général, rappelle que 128 connexions ont également eu lieu sur le profil Facebook d'Arthur Del Piccolo, petit ami de la victime à Besançon, de la part d'un appareil enregistré au nom de Zepeda. Le témoin confirme que les appareils appartenant à l'accusé ont bien été identifiés clairement. 

10h35 : Deuxième témoin de la journée : Takeshi Manaka, toujours depuis le Japon. L'homme en costume cravate décline son identité avant de commencer sa déposition spontanée. Il est employé technicien sur le campus de Tsukuba, université dans laquelle était inscrite la victime. Il gère le réseau wifi sur ce site. Ce dernier a donné des informations à la police japonaise concernant l'utilisation du réseau wifi sur le campus de Tsukuba ainsi que sur certaines données informatiques. Pour rappel, Nicolas Zepeda est suspecté d'avoir piraté les comptes numériques universitaires de la victime, après le départ de cette dernière pour Besançon, alors que l'accusé se trouvait au Japon depuis plusieurs mois. Il y avait rejoint Narumi Kurosaki. Cette dernière avait pourtant décidé de se rendre en France pour y apprendre la langue. "Des traces d'une cinquantaine d'accès sur le réseau wifi de Tsukuba ont été constatées entre la fin août 2016 et début octobre 2016", dit le témoin. "Nous avons pu identifier le nom de Zepeda pour ces accès", explique l'homme, avant de répondre aux questions de la cour.

L'audience est levée une quinzaine de minutes. 

9h56 : Le président François Arnaud demande à la témoin de réagir aux propos de l'accusé. "Ce que j'ai eu comme demande c'était vraiment de traduire ces deux bouts de phrases dans un style particulier, tel que je l'aurais dit moi-même en tant que femme", répond Rina Sakamaki. Me Schwerdorffer, avocat des parties civiles, interroge à son tour l'accusé : "est-ce une menteuse ?". "Nous avons tout simplement des souvenirs différents", répond Nicolas Zepeda. Arthur Del Piccolo, petit ami de la Japonaise au moment de sa disparition, fronce les sourcils en fixant Nicolas Zepeda. 

9h43 : Me Portejoie souhaite interroger Nicolas Zepeda son client : "Qu'avez-vous envie d'expliquer à la cour ?". "C'est un peu bouleversant de voir des amis témoigner contre moi. Ce sont des gens avec lesquels j'ai passé de très bons moments. Aujourd'hui, j'essaie de comprendre, je prends note, mais c'est un peu de l'incompréhension", entame Nicolas Zepeda, qui s'exprime en français. "Vous reconnaissez cet entretien avec madame Sakamaki autour du 11 décembre ?", demande Me Portejoie. "On a eu des échanges car on était des amis. Aujourd'hui, c'est mon anniversaire et c'était à ce moment-là aussi", répond Nicolas Zepeda, qui fête ce jour ses 33 ans. "Avez-vous demandé d'effectuer des traductions ?", reprend simplement Me Portejoie. Nicolas Zepeda se lance dans une explication détaillée sans répondre à la question directement. "De façon plus concrète, avez-vous demandé des traductions ?", insiste Me Portejoie. L'accusé reconnaît avoir fait traduire des paragraphes pour améliorer son japonais mais pas les phrases décrites par la témoin. "Je vous demande de répondre simplement", poursuit Me Portejoie. "Je n'ai pas demandé ces phrases en particulier", répond Nicolas Zepeda à son avocat de Clermont-Ferrand.

9h36 : "Pourquoi supprimez vous ces échanges à la demande de Nicolas Zepeda ?", demande l'avocat général Etienne Manteaux. "J'ai senti que Nicolas était tourmenté. Je n'ai pas compris et pas vraiment cru ses explications étranges, mais vers la fin de l'année, j'étais en train de rédiger ma thèse et j'étais très occupée. Pour me débarrasser des échanges interminables qu'on avait, j'ai accepté d'effacer", justifie-t-elle.

9h29 : la cour pose à présent ses questions. Comme d'habitude, les débats sont traduits du japonais vers le français, en simultané. Des précisions sont demandées sur la nature des traductions et notamment sur le fait que les messages traduits laissaient apparaître des formules de phrases utilisées par une femme. Nicolas Zepeda multiplie les interpellations de son avocat Me Portejoie. Debout dans son box, il parle à l'oreille de son conseil et prend des notes, comme la semaine précédente. 

Quand j'ai vu les messages envoyés à la famille de Narumi Kurosaki, je me suis immédiatement souvenue des phrases que j'avais traduites pour Nicolas.

Rina Sakamaki, témoin

9h09 : Rina Sakamaki accepte d'effacer les messages. Nicolas Zepeda lui demande alors une preuve. Une capture d’écran démontrant qu’elle a bien effacé l’historique. Le 24 décembre, l'accusé lui envoie des photos et des vidéos pour lui montrer comment on fête Noël au Chili. La témoin dit trouver "très bizarre" cette façon qu’il a d’insister sur le fait qu’il est là-bas. Les phrases qu’elle a traduites pour Nicolas Zepeda et dont elle se souvient très bien, prennent tout leur sens : elles correspondent à celles que Narumi Kurosaki aurait écrites après sa disparition. "C’est un copié-collé" dit-elle. Elle prend peur. Elle décide alors de prévenir la police. La jeune femme, qui porte un masque, dit n'avoir appris la disparition de Narumi Kurosaki, qu'elle ne connaissait pas, que le 2 janvier 2017.

8h47 : La témoin était étudiante à l'université de Tokyo. Elle croisait quelques fois l'accusé lors d'activités communes, sans lien plus poussé. Après s'être perdus de vue plusieurs années, Rina Sakamaki reçoit un message le 11 décembre 2016 de la part de Nicolas Zepeda. La témoin se dit "surprise". Nicolas Zepeda lui dit qu'il poursuit ses études de japonais au Chili et lui demande de l’aide pour traduire des phrases. Par exemple : "comment répondre en japonais à une question portant sur un voyage" ou, plus révélateur encore : "je viens de rencontrer un nouveau petit-ami". Il lui demande une réponse en langage familier et insiste sur le fait qu’il veut quelque chose que dirait une fille, sur le style amical. Quatre jours après, le 15 décembre 2016, elle reçoit un autre message via Messenger : Nicolas Zepeda lui demande d’effacer son historique de conversations. Le ton de la requête semble tendu, inquiet. Il lui explique alors qu’il a eu connaissance de rumeurs de la part des amis de Narumi Kurosaki, de Tsukuba, et qu’il ne souhaite pas être embêté avec ça.

8h29 : Les débats ont repris à 8h10 ce lundi avec une viosioconférence depuis le Japon. Le premier témoin de la journée est Rina Sakamaki. Elle connaissait Nicolas Zepeda depuis 2014. Présence notable dans la salle d'audience à Vesoul contrairement à la première semaine de procès : celle d'Arthur Del Piccolo, petit ami de Narumi Kurosaki lors de sa disparition en décembre 2016. Ce matin, les messages qui auraient été envoyés par Nicolas Zepeda depuis le portable de la victime, après sa mort, en se faisant passer pour elle, sont mis en lumière.

L'audience doit débuter avec les dépositions de plusieurs témoins, dont certains en visioconférence depuis le Japon. Ironie du calendrier, ce jour, le Chilien fête ses 33 ans, dans le box des accusés. Des experts se succéderont également à la barre. 

Lors de la première semaine de ce procès hors du commun, l'accusé chilien Nicolas Zepeda n'a pu répondre qu'à quelques questions mais a admis, pour la première fois depuis le début de cette affaire, avoir menti sur certains points comme sur l'objet de sa présence en Franche-Comté début décembre 2016. Il est venu pour voir Narumi Kurosaki et avait l'intention de se remettre en couple avec elle mais il nie toujours son implication dans sa mort. Son interrogatoire de personnalité a été repoussé à cette semaine, pour laisser la place à de nombreux témoignages et notamment ceux d'amis de la victime et voisins de chambre qui ont entendu des cris d'horreur, dans la nuit du 4 au 5 décembre 2016, dans la résidence universitaire dans laquelle vivait la victime. Rien à voir avec des cris de plaisir en lien avec des relations sexuelles intenses, comme l'a dit l'accusé aux policiers à plusieurs reprises.

Deux enquêteurs ont longuement été auditionnés à la barre jeudi et vendredi, laissant apparaître des éléments troublants pointant dans la direction de Nicolas Zepeda : jalousie maladive, menaces, surveillance accrue, achat de matériel inflammable et d'allumettes, usurpation d'identité de la victime après sa mort potentielle pour brouiller les pistes... Concernant la manière dont a été tuée Narumi Kurosaki et dont son corps a été sorti du bâtiment du Crous bisontin, les hypothèses demeurent. Les certitudes et les preuves irréfutables sont rares dans cette affaire "complexe". 

(Re)lire le déroulé complet de la cinquième journée du procès, le mardi 5 décembre 2023.

Nicolas Zepeda, qui clame depuis le début son innocence, a été condamné à 28 ans de réclusion lors de son procès en première instance, à Besançon, en avril 2022. Le corps de la victime n'a jamais été retrouvé malgré des années de recherches. Le Chilien risque une peine de réclusion à perpétuité.  

ARCHIVES. De la disparition de Narumi Kurosaki à la condamnation en première instance de Nicolas Zepeda pour assassinat :

Du 4 au 22 décembre 2023, suivez en direct les débats en cours à l'intérieur de la salle d'assises du procès en appel de Nicolas Zepeda à Vesoul. Rendez-vous chaque matin sur l'article "DIRECT" de notre site internet.

Retrouvez tous nos articles au sujet de l'assassinat de Narumi Kurosaki.

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