Les aides-soignantes de l'Ehpad des Opalines ont mis un terme à leur mouvement de grève qui aura duré 117 jours. Des compensations financières et des congés payés exceptionnels ont été annoncés par la directeur de l'Ehpad. Retour sur l'un des plus longs conflits sociaux de ces dernières décennies.
Elles auront fait preuve d'une obstination, d'un courage et d'une abnégation rares. Les aides-soignantes de l'Ehpad des Opalines de Foucherans ont mis fin ce jeudi 27 juillet, à leur mouvement de grève après 117 jours de conflit. Une grève qui restera comme l'une des plus longues de ces dernières décennies. Elles sont parvenues à obtenir une prime de fin de grève de 450 euros nets et trois semaines de congés annuels pour cette année. Aussi, un observatoire sera mis en place pour mieux encadrer le métier d'aide-soignant dans les mois et les années à venir. Un arrangement qui intervient quelques jours après l'arrivée d'un médiateur venu de la capitale. Retour en sept dates sur ce conflit social hors-norme.
Le 3 avril : le début du conflit
C'est un lundi que la dizaine d'aides-soignantes de l'Ehpad des Opalines ont décidé de lancé leur mouvement de grève. Pour continuer de soigner les 77 patients de l'établissement, des soignantes en CDD avaient pris le relais. Elles s'indignaient d'un manque notable d'effectifs qui ne permettait pas de soigner convenablement les résidents de l'Ehpad et des mauvaises conditions de travail. "Il faut se poser la bonne question sur nos salaires. Ils ne sont peut-être assez attractifs. Aujourd'hui, une aide-soignante touche 1300 euros. Nous sommes payés 15 € pour nos primes de dimanches", s'insurgeait Anne-Sophie Pelletier, porte-parole des grévistes.25ème jour : la révolte
Installées depuis des semaines devant l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantess à Foucherans, les aides-soignantes, avaient fait impasse sur leurs salaires et ne comptaient pas arrêter leur mouvement de grève malgré un début de négociation avec la direction. Elle, qui, à ce moment, promettait une "organisation de travail moins fatiguante". Une avancée insuffisante pour les grèvistes. De leurs côtés, elles continuaient de réclamer des hausses de salaires et des embauches supplémentaires. "On veut retourner au travail avec des meilleurs conditions. Mais quand on voit que cela n'avance pas, ça nous révolte", avait expliqué Marion Van Der Becken, gréviste. De leur côté, toutes espéraient faire connaître leur cause. "On espère sincérement que le mouvement qu'on a mis en place va faire prendre conscience à d'autres collègues qu'on peut être contre ce système", expliquaient Anne-Sophie Pelletier. Les grèvistes demandaient alors à l'agence régionale de santé (ARS) d'intervenir dans le conflit afin de le résoudre. Sans succès.38ème jour : le soutien grandissant des anonymes
Les discussions entre les grèvistes et la direction de l'Ehpad semblaient rompues. Aucun d'entre elles était rémunérée et pourtant, elles avaient décidé de poursuivre leur mouvement de grève. Depuis quelques semaines, une grande solidarité s'était mis en place autour d'elles. Des initiatives personnelles qui leur permettaient de rester positives et motivées face à un dialogue visiblement au point mort avec la direction, qui refusait de répondre à la presse. Chaque jour, des anonymes venaient et donnaient à manger ou de l'argent. "Heureusement qu'elles ont cette solidarité", explique une mère de famille. Le renfort en personnel était envisagée par la direction mais rien ne semblait bouger pour les rémunérations. "On ne peut pas se permettre d'aller travailler sans avoir rien obtenu. Cela ne serait pas moral pour les personnes qui nous ont soutenu et les résidents", expliquait alors la porte parole des grévistes.
57ème jour : aucune sortie de crise possible ?
"On ne pensait pas être ignoré 57 jours", Marion semblait fatiguée après 57 jours d'un mouvement de grève, devenu l'un des plus longs de l'histoire française. Elle et la dizaine d'autres grévistes encore présentes sur le piquet de grève ne comptaient pas s'arrêter là, mais commencaient à s'impatienter. Elles n'avaient toujours pas vu leur principale revendication, une prime de dimanche de 26 € par salariée, entendue. Ni l'ARS, ni la préfecture, ni un médiateur n'avait été nommé pour résoudre ce conflit, qui s'enlise. Les grévistes avaient mis de côté leur envie d'obtenir une augmentation de salaire mais la prime de 26 € du dimanche continue de cristaliser les tensions. Néamoins, la direction avait validé la création de deux postes supplémentaires.109ème jour : un silence médiatique national rompu
Il s'agit bel et bien de l'événement clef de la résolution de ce conflit. Elles attendaient toutes ce moment. Le 18 juillet, le journal Le Monde publie à la une l'enquête de Florence Aubenas sur le conflit des aides-soignantes de l'Ehpad des Opalines de Foucherans. Un article qui aura eu comme conséquence d'amener les médias nationaux à s'intéresser à ce conflit qui dure à ce moment depuis 109 jours. À partir de cette date, le silence médiatique regretté par la dizaine de gréviste, était rompu. Immédiatement, RTL, Europe 1, TF1 et d'autres médias s'étaient rendus à Foucherans. Autre conséquence de ce regain de médiatisation, qui aura également un impact positif sur le reste du conflit, la prise de parole de François Ruffin, député La France Insoumise. À l'Assemblée nationale, le député et réalisateur, avait interpellé la ministre de la Santé et les députés République En Marche sur les salariées de Foucherans. Annie Vidal, députée REM de la 2e circonscription de Seine-Maritime s'était engagée à se rendre sur place dans le Jura. Une promesse qu'elle n'a pas pu tenir.
"Mme la Ministre, elles sont en grèves depuis 100 jours à l'EHPAD de Foucherans. Ces soignantes vous ont écrit, sans réponse." #InsoumisAN pic.twitter.com/EHCSv3eEm2
— François Ruffin (@Francois_Ruffin) 19 juillet 2017