VIDEO. Le grand tétras qui fait le buzz sur les pistes de ski de fond est un coq fou...du Jura 

La vidéo de l’oiseau fait le tour des réseaux sociaux. De très près, un grand tétras s’approche d’un skieur nordique. “C’est un oiseau au comportement atypique”, explique le groupe tétras Jura.

Au milieu des sapins enneigés du Haut-Jura, la rencontre est rare. Croiser le regard et les magnifiques plumes du grand tétras est le bonheur de rares privilégiés.


Postée le 15 janvier sur une page Facebook, la vidéo a été partagée plus de 30.000 fois

On l’a cru un temps jurassien, puis même tchèque, et après quelques coups de téléphone et une investigation inattendue, le voici à nouveau avec un passeport comtois ! Bien en règle, à deux pas de la frontière suisse. “C’est un oiseau qu’on connait bien, et plus les jours passent, plus il devient agressif” explique Alexandra Depraz, coordinatrice du groupe Tétras Jura. L’oiseau vit quelque part sur le massif du Jura. Il fait partie de la famille des coqs fous, “ce sont des oiseaux qui perdent leur réflexe de fuite face à l’homme, ils le considèrent comme un rival” ajoute-t-elle. La vidéo a été prise au départ par un fondeur suédois travaillant en Suisse voisine. Elle a circulé et est devenue virale via la page facebook d'un citoyen français.

Dans les neiges du Jura, ce grand tétras était tranquillement sur le bord de la piste, tout va bien tant que le skieur le filme sans s’arrêter, mais quand le fondeur trébuche, le coq passe à l’attaque. C’est parfait pour les gros plans, mais ce skieur a eu de la chance. Car, prévient Alexandra Depraz, un coq est un animal puissant. "Si on en croise un, on peut le regarder, mais on passe son chemin, on prend son enfant sous le bras, on éloigne son chien, on ne nourrit pas l’animal” précise-t-elle.

Coqs fous et coqs mous

Dans le massif du Jura, le phénomène des coqs fous est bien connu. Ces oiseaux solitaires ont des comportements parfois différents. Les coqs fous sont agressifs, ils ne se reproduisent pas (un seul cas a été observé). D’autres deviennent des coqs mous. Dociles comme une bête de poulailler, ils s’installent parfois dans des villages, des poulaillers, des cours d’école. “Quand la saison avance, leur taux de testostérone remontent et ils repartent vers les zones forestières” explique le groupe Tétras Jura. Ces comportements anormaux touchent 1 grand tétras sur 100 dans le massif du Jura. Difficile de dire pourquoi. Est-ce une mutation génétique qui entraîne la perte de la crainte de l'homme ?  Un manque de contact avec d'autres congénères, visiblement non. L'hypothèse qui est actuellement mise en avant est un excès de dérangement durant leurs premiers mois de vie, indique le groupe Tétras Jura.

Ne pas déranger le grand tétras un animal qui reste fragile

Alexandra Depraz a vu arriver le buzz de la vidéo du grand tétras avec une certaine crainte. Qu’elle donne envie aux Jurassiens ou aux touristes de tenter d’approcher l’animal ou ces congénères qui vivent actuellement sur le massif.

“Le grand tétras est en forte régression sur le massif jurassien, on a 270 individus environ aujourd’hui, la population a chuté de 40% en 25 ans. Les facteurs sont multiples, perte des habitats, fréquentation humaine, changement climatique, et peut-être une consanguinité de la population”

Alexandra Depraz, Groupe Tétras Jura

L’hiver, une saison à danger pour le grand tétras

Le grand tétras, appelé aussi coq de bruyère, est le plus gros oiseau forestier de France. Le coq pèse de 2,5 kg à 5 kg pour 86 à 110 cm de longueur. La poule pèse de 1,5 kg à 2,5 kg pour 55 à 70 cm de longueur.

Quand la neige arrive, le grand tétras vit dans les arbres. Il se nourrit, la plupart du temps, d’aiguilles de résineux. La digestion de l’oiseau est lente et n'autorise que deux repas par jour. Cela est juste assez pour obtenir l'énergie nécessaire à sa survie dans les meilleures conditions de calme et de tranquillité. S'il n'est pas dérangé, un grand tétras peut ainsi rester presque tout l'hiver sur moins de dix hectares. Si l’homme dérange un grand tétras, de façon régulière, il met en danger l’animal. “Avec 270 individus aujourd’hui sur  le massif, ce n’est pas suffisant, il en faudrait deux fois plus pour que la population soit stable” indique le groupe tétras Jura. La meilleure façon de protéger l’animal est donc de passer son chemin. 

Au-delà du buzz de la vidéo, les défenseurs du grand tétras oeuvrent en permanence toute l’année pour préserver son habitat dans le Jura. Des actions de comptage ont lieu.

 

Des actions de sensibilisation ont lieu aussi auprès des scolaires, le parc naturel régional du Haut-Jura restaure certaines zones d’habitat, l’ONF adapte ses dates de travaux de coupe selon la saison. Les pistes de ski de fond sont tracées pour éviter de déranger tant que possible l’animal, les courses comme la Transjurassienne n’ont pas l’autorisation d’emprunter certaines zones. Le détail va même jusqu’à équiper les câbles des téléskis de bouées rouges, pour que les grands tétras voient bien l’obstacle (cagnotte en ligne Lilo). “On souhaite aussi démonter certaines clôtures encore présentes en forêt, des clôtures sources d’accidents pour les oiseaux” conclut Alexandra Depraz. Comme le lynx, espèce protégée qui vit dans le Jura, le grand tétras pourra continuer à vivre si l’homme agit à son échelle pour lui donner un maximum de chances. 

 

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