"Excédés", "épuisés" : victime du tourisme, ce petit village du Jura ne veut plus subir les incivilités

Dans le Jura, le petit village Planches-Pré-Arbois est victime du succès de sa cascade des Tufs. Le maire de la commune appelle à un nouveau plan d'aménagement et tire la sonnette d'alarme face à la surfréquentation du site.

"Si rien n'est fait, ça va malheureusement mal se passer". L'avertissement est signé François Perrin, maire (sans étiquette) de la petite commune des Planches-prés-Arbois (Jura). Dans ce village de 91 habitants, l'attraction principale est la fameuse cascade des Tufs, écrin de nature exceptionnel où la rivière Cuisance a sculpté le paysage pour donner naissance à des chutes d'eau impressionnantes.

La beauté des lieux est connue dans toute la Franche-Comté, voir bien au-delà. La réputation de la cascade a en effet traversé les frontières jurassiennes pour forger à la cascade des Tufs une renommée nationale, voire internationale. Qui a entraîné l'arrivée de nombreux touristes. Trop selon François Perrin.

Plus de 400 personnes par jour en juin

"On est 91 habitants, et en 2019, on avait environ 800 véhicules par jour qui stationnaient dans et aux abords du village" lâche-t-il. "Cela fait plus de 1 000 personnes. En juin, avec le mauvais temps, on était descendu à 400 visiteurs par jour. Avec le retour du beau temps, ça va exploser". Une surfréquentation qui, en plus, de poser des problèmes environnementaux pour la préservation du site, a amené d'autres problématiques.

Bien sûr, certains commerces profitent des touristes. Mais pour les habitants, c'est au niveau de la circulation et de l'afflux de véhicules que ça devient très tendu. On ne peut plus suivre le rythme, avec des voitures qui se garent partout, même chez les gens

François Perrin,

maire (SE) des Planches-prés-Arbois

L'édile prend comme exemple le dernier week-end de l'Ascension, "où près de 200 voitures s'étaient garées sur des centaines de mètres" le long de la départementale menant au village, "jusqu'à bloquer la circulation qui ne pouvait se faire plus qu'à sens unique". "D'autres touristes avaient parqué leur véhicule dans la cour de certains habitants" révèle le maire. "Alors que tout stationnement dans le village est interdit. Et ce n'est pas la première fois que ça arrive".

Des péripéties qui, accumulées, ont créé un vrai ras-le-bol au sein de la commune. "Des conflits se créent entre habitants et touristes, c'est inévitable" avoue le maire. "Les riverains sont excédés et les touristes, souvent après une longue route pour venir, n'aiment pas s'entendre dire qu'ils ne peuvent pas stationner".

Une situation qui laisse les élus "épuisés et lassés". Et demandeurs de réels changements au niveau de l'aménagement des lieux, pour "continuer à accueillir les touristes, mais de manière raisonnée" explique la mairie. "On doit bien se rendre compte que les décisions passées n'ont pas eu les effets escomptés".

Des premières mesures dès 2020

En effet, dès 2020, déjà en raison de la surfréquentation du site, la municipalité avait supprimé les parkings juste à côté de la cascade et, un an plus tard, avait interdit les stationnements à l'intérieur du village.

La Communauté de commune Cœur du Jura avait ensuite acheté un pré à l'entrée des Planches-prés-Arbois, transformé en parking, alors que le département décidait d'aménager sur 300m la bordure de la départementale pour permettre le stationnement.

Des efforts nécessaires, mais insuffisants. "C'est nous, le personnel municipal, qui nous retrouvons à faire la circulation, à mettre et enlever les panneaux" souffle François Perrin. "Et puis quand il pleut, impossible d'ouvrir le pré. Donc les voitures reviennent malgré tout dans le village".

Un nouveau plan d'aménagement bientôt en place ?

À bout, l'édile porte donc depuis 2021 un nouveau projet d'aménagement et d'accès à la cascade des Tufs, qu'il a présenté à la Communauté de communes. "C'est un plan pour toute la reculée, incluant les communes d'Arbois, Mesnay, La Châtelaine, où les touristes passent pour venir ici" explique-t-il.

Nous voulons, pour la saison 2025, supprimer le dernier parking du village, derrière l'église. Nous installerons aussi des potelets pour empêcher les stationnements. Il faudrait un seul parking, à Arbois, relié à la cascade par navette.

François Perrin,

maire (SE) des Planches-prés-Arbois

Avec ce plan, aucune voiture ne pénétrerait dans le village, "mais nous aurions toujours des touristes" ajoute le maire. "De plus, d'un point de vue écologique, cela nous permettrait de réguler le nombre de visiteurs, en jouant sur le nombre de navettes, selon l'état du site". Cette solution a-t-elle convaincu la Communauté de communes Cœur du Jura ?

Contacté par France 3 Franche-Comté, son président, le maire de Poligny (Jura) Dominique Bonnet assure que "des changements seront effectués en urgence dès la saison prochaine". Lesquels ? "On va réinstaller des rondins de bois pour empêcher les stationnements sauvages le long de la départementale. Et on va créer un parking vers Arbois, avec plus de signalétiques" complète-t-il.

"Nous ne pouvons plus attendre"

Et le reste des mesures, notamment les navettes ? "On se laisse le temps de voir les effets des premières mesures, par phase" reprend Dominique Bonnet. "Mais le but n'est pas de faire fuir les touristes. Et puis nous n'avons pas 500 000 visiteurs non plus, la surfréquentation concerne des journées bien précises".

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Le maire des Planches-prés-Arbois, lui, est plus pressant."Nous ne pouvons plus attendre et je lance un ultimatum" estime François Perrin. "Dans l'idéal, nous voulions agir avec toutes les instances concernées. Mais si rien n'est décidé, nous commencerons les aménagements seuls, en supprimant les parkings et en mettant des potelets".

Avec le risque certain que, sans autre solution de stationnement, la situation dégénère rapidement. "C'est sûr que ça provoquera du bazar, mais le problème ne pourra plus être ignoré".