L’aciérie d’Imphy, dans la Nièvre, est aujourd’hui la seule survivante des forges royales de l’ancien régime. Le documentaire "Les gars de l’usine" offre un regard croisé entre les anciens ouvriers et ceux qui, aujourd’hui, continuent à forger la spécificité de l'ouvrier métallurgique imphycois.
Implantée en 1816, l’aciérie d’Imphy, dans la Nièvre, fait de sa spécialité les alliages et aciers inoxydables. C’est l’une des plus anciennes de France encore en activité.
La demeure éternelle des Métallos
Alors que dans le même temps, Fourchambault, le "Manchester français" disparaissait, Imphy restait et reste la demeure éternelle des Métallos.
Lieu d'innovation et de recherche en nuances d'acier de haute précision, elle trace un chemin singulier face à la loi de la désindustrialisation et de la décentralisation.
Une usine dans la ville
La ville a été construite autour de l’usine, au sens propre comme au figuré car l’usine est au centre d’Imphy.
Quand on travaille ici, on dit qu’on travaille à Imphy et non à Aperam, ce qui démontre que depuis plusieurs siècles, on a une identité commune entre l’entreprise et ses habitants.
Jean-Christophe Trontin, directeur du site Aperam d’Imphy
La plupart des habitants de la commune ont travaillé dans cette aciérie. Les petites maisons qui cernent l’usine, sont maintenant occupées par les ouvriers et ouvrières en retraite, les nouveaux employés préférant se loger à l’extérieur.
Une vie organisée autour de l’usine
Dans les années 1900, Imphy atteint 2 500 habitants dont 850 ouvriers. Tous habitent la cité qui s’est développée autour de l’usine, dans de petites maisons avec jardin.
À Imphy, toute la vie tourne autour de l’usine. L’avenir de chaque habitant est tracé d’avance : tous deviennent ouvriers, une tradition familiale perpétuée depuis de nombreuses générations. Dany, tourneur, forgeur et tréfileur désormais à la retraite, le confirme : Mon père était tréfileur, son père travaillait au laminoir…
En 1912, un centre d’apprentissage est créé à l’usine. Les ouvriers peuvent se former et de nombreuses matières sont au programme : dessin, géométrie, physique, chimie mais également histoire, géographie, français.
Dans ce centre, les ouvriers se forment aux différents postes nécessaires à l’usine : électriciens, forgerons-chaudronniers, tourneurs, fraiseurs.
Les employés peuvent évoluer dans l’entreprise en passant chef d’équipe comme Christian qui a fait toute sa carrière au sein de l’usine.
J’ai fait toute ma carrière au sein d’Imphy, dès l’âge de 14 ans jusqu’à 60 ans.
Christian, chaudronnier, lamineur, retraité
La sirène de l’usine, qui retentit trois fois par jour, règle la journée des travailleurs et des habitants de la commune.
À cette époque, le travail dans l’aciérie est rude raconte Guy, ajusteur à la retraite : J’avais 15 ans, on travaillait déjà 9 heures par jour et 6 jours par semaine. Il ajoute cependant que l’ambiance y était amicale car tout le monde se connaissait.
Le site d’Imphy d’aujourd’hui
Les conditions de travail au sein de l’aciérie ont fortement évoluées au cours des années, les mentalités également.
Si quelques femmes, comme Colette en 1975, faisaient partie du personnel de l’usine, c’était sur des postes bien définis comme l’enroulage ou le bobinage.
Aujourd’hui, les femmes sont mieux intégrées à l’entreprise.
C’est le cas de Rachel, première femme à travailler sur le poste des cisailles, un poste d’une grande précision.
Méticuleusement, elle fabrique des pièces de métal aussi fines que du papier à cigarette qui vont servir à élaboration de l'horlogerie de luxe.
On travaille pour des secteurs prestigieux, notre travail va se retrouver dans des belles montres.
Rachel
Pascal, ingénieur hautement qualifié, puise dans le savoir-faire des anciens pour adapter les process et les conditions de travail des aciéristes : Le gars de l’usine c’est quelqu’un qui a le souci du travail bien fait et qui sait que tout seul, il ne peut rien… il est collectif et solidaire.
Si Imphy ne compte plus beaucoup d’ouvriers parmi ses habitants , avoir une telle usine dans la ville c’est un formidable outil qu’on ne trouve pratiquement plus en France et qui draine sur l’ensemble du département, ajoute Joëlle Julien, conseillère départementale canton d’Imphy.
Cependant la ville n’attire plus et de nombreux logements sont à l’abandon. Joëlle Julien ne désespère pas qu’un jour la vie reprenne dans les rues et qu’Imphy retrouve son ambiance d’antan.
"Les gars de l’usine", Un film de Léo Amiot
Une coproduction France Télévisions / Les Films de l’Estran
Diffusion jeudi 13 avril à 22h45 et lundi 24 avril à 9h05
Déjà disponible sur la plateforme france.tv