RÉCIT. Femme battue, violée, prostituée, Valérie Bacot a tué son mari (2/3). Le mari, victime qui ne manque à personne

Le 2 octobre 2017, en Saône-et-Loire, Valérie Bacot, 37 ans, est interpellée. Elle avoue avoir tué Daniel Polette. Il a été son mari, violent, après avoir été son beau-père, incestueux. Un homme connu pour être violent, mais que ni ses proches, ni la justice n'ont pu arrêter.

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En juin 2021 aura lieu le procès de Valérie Bacot. Elle est accusée d'avoir assassiné son mari Daniel Polette. Violences, viols, prostitution, durant 24 ans, ce dernier a fait vivre l'enfer à celle qui a d'abord été sa belle-fille avant de devenir son épouse. 

Cet article est le deuxième d'une série de 3 reportages consacrés à cette affaire hors norme. 
 

 

 

 

13 mars 2016, sortie de l'enfer

Le 13 mars 2016, la vie de Daniel Polette prend fin. Ce routier de 60 ans est tué d’une balle de revolver dans la nuque tirée par sa femme. Deux de ses enfants aident leur mère à enterrer le corps dans un bois, derrière le château de La Clayette (Saône-et-Loire). Il ne sera découvert que 17 mois plus tard.

Devant les gendarmes, Valérie Bacot, 36 ans, reconnait les fait et raconte sa vérité. Daniel Polette a d'abord été le compagnon de la mère de Valérie. L'auteure du coup de feu évoque la violence de son mari qui la force à se prostituer depuis 14 ans. Il passe des annonces pour trouver des clients et la conduit sur des parkings au bord de la RCEA (Route Centre Europe Atlantique) en Saône-et-Loire. La pratique est particulièrement élaborée et perverse. Daniel a spécialement aménagé le 806 familial pour cette activité. Il équipe Valérie d’une oreillette pour lui donner des instructions. Des déclarations confirmées par les clients auditionnés.

Mais, ce jour de mars, Valérie passe à l’acte. A la suite d’une passe difficile avec un client qu’elle décrit comme violent, elle tue Daniel d’une balle dans la nuque.
Face aux enquêteurs, elle reconnaît également avoir tenté, sans succès, de le droguer de somnifères dans son café le matin même.

On ne verra plus jamais Daniel

En mars 2016, Daniel disparaît. On ne le voit plus à Baudemont, la commune où il résidait avec Valérie et ses 4 enfants. Mais personne ne s’inquiète. Son employeur conclut à un abandon de poste et se contente de rédiger son solde de tout compte. De ses 7 frères et sœurs, seule une finit par aller se renseigner auprès des gendarmes plusieurs semaines après la disparition. Et cette indifférence apparente continue une fois le meurtre dévoilé.

Après l’autopsie, le corps est confié aux pompes funèbres de Chauffailles. Mais personne ne réclame la dépouille du défunt. Le gérant doit attendre plus de 4 semaines pour que deux frères et une sœur acceptent de remplir les formalités et de régler la note. La crémation se fait sans cérémonie et à moindre coût.

Tout le monde en avait peur dans la famille


Dans le pays claytois on n'aime pas beaucoup parler de Daniel Polette. Certains acceptent d'en dire quelques mots, mais guère plus. Au mieux, ils évoquent un homme avec qui ils échangeaient peu et qui présentait plutôt bien. D’autres se souviennent d’un homme violent dans sa jeunesse, mais qui semblait s’être calmé avec les années.

Seul un proche de la famille de Daniel accepte de revenir plus longuement sur la personnalité de celui qui, pour la justice, reste bien la victime. Le procès de Valérie Bacot doit se dérouler aux assises de Saône-et-Loire du 21 au 25 juin 2021.

 

"Ça a toujours été un violent !"

Jean* a côtoyé Daniel et sa famille durant plusieurs années. "Daniel, là où il est aujourd’hui, il est bien !" La formule paraît brutale. Mais elle prend sens progressivement avec le récit de l'homme, qui le connaît depuis l'enfance.

Daniel est né en 1956. Deuxième d'une fratrie de 8 enfants, il grandit dans la commune voisine de Gibles. "Ça a toujours été un violent, explique tout d'abord Jean. Combien de fois il a tapé sur son père et sa mère ! Le père était puisatier. Quand il est décédé, la mère a cumulé les boulots pour subvenir aux besoins de la famille."

Dès sa jeunesse, Daniel est connu pour faire régner une atmosphère de terreur dans la maison. "Tout le monde en avait peur dans la famille. A part une de ses sœurs, tout le monde ramassait et prenait des coups."  A 18 ans, Daniel achète sa première carabine, explique Jean. "Il lui arrivait de mettre en joue les membres de sa famille. Ensuite, il a toujours eu des armes." C'est avec l'une de ces armes que Valérie Bacot tue son mari. 

Des agressions physiques mais également sexuelles

Dès l'adolescence, Daniel se montre particulièrement violent. "Il a violé sa sœur alors qu’elle n’avait que 11 ans" témoigne Jean. Mais à cette époque, dans la famille Polette, ce n'est pas le fils qui est pointé du doigt, mais la soeur victime. "Elle a été placée en foyer. Plus tard, elle a essayé d’obtenir son dossier et elle s’est aperçue qu’ils avaient mis le viol sur le dos de son père qui était mort juste avant. Comme ça, Daniel il n’a jamais été embêté et il est resté dans la famille."

Daniel finit par quitter la maison familiale. Il a alors 3 enfants avec 3 femmes différentes. En 1992, il rencontre la mère de Valérie avec qui il se met en ménage. Au sein de ce foyer, rapidement, Jean décrit une atmosphère malsaine. "Une fois, ils rentraient de vacances, on était chez sa mère. Il s’est vanté qu’il avait photographié Valérie sous sa jupe alors qu’elle n’avait que 12 ou 13 ans. Beaucoup de monde le savait qu’il était tordu. La mère de Valérie devait bien voir qu’il y avait un problème !"

Au travail, Daniel donne satisfaction à ses employeurs. Mais selon notre témoin, ses collègues, eux, appréciaient beaucoup moins son caractère violent. "Une fois, il chargeait en même temps qu’un collègue sur Bourg-en-Bresse. Celui-ci discutait avec le cariste et Daniel a pensé qu’ils parlaient sur lui. Il a pris un chevron, il l’a balancé et ils l’ont reçu dans les jambes. C’est pour vous dire qu’il était quand même marteau."

A La Clayette, tout le monde semble s'accorder sur le caractère violent de Daniel, notamment dans sa jeunesse. Dans les bals, il est fréquemment impliqué dans des bagarres. D'autres évoquent des coups donnés à l’aide de chaînes de tronçonneuse. Daniel Polette a été condamné à de la prison ferme pour coups et blessures.

Condamné pour le viol de Valérie, sa belle-fille

Son deuxième séjour en prison, Daniel Polette le fait en 1995. Il est condamné pour avoir violé Valérie. Agée de 14 ans, elle est alors sa belle-fille. C’est la sœur de Daniel qui dénoncera les faits, pas la mère de Valérie. Daniel écope de 4 ans d’emprisonnement, mais sort au bout de deux ans et demi. Il réintègre alors le foyer. Et rien ne change.

A 17 ans, Valérie Bacot tombe enceinte de Daniel Polette de 25 ans son aîné. Valérie et Daniel quittent alors le domicile et s'installent sous le même toit. Ils auront 4 enfants. A cette époque, Jean, notre témoin, s'éloigne lui aussi de la famille. Il ne revoit Daniel que ponctuellement, notamment dans un contexte professionnel.

Daniel Polette est chauffeur routier. Chaque vendredi, il doit déposer son camion à Chauffailles, à une douzaine de kilomètres de son domicile. "C’était un vrai gourou, remarque Jean. Valérie venait le chercher à Chauffailles au dépôt et avec tous les gosses derrière. Ils devaient être obligés d’être là. Elle ne sortait pas de la voiture. Elle passait juste de la place de conducteur à passager." La moindre interraction avec une tierce personne pouvait créer un problème détaille Jean.  "Il était jaloux comme un pou. Une fois, un collègue un peu dragueur est allé taper la discussion avec Valérie. Daniel l’a attrapé et il lui a dit : "Si tu recommences, je t’en mets une !" Et il rigolait pas."

Si la mère de Valérie avait fait ce qu’il fallait, on n'en serait jamais arrivé là.


"Si la mère de Valérie avait fait ce qu’il fallait, on n'en serait jamais arrivé là. Ce serait dégueulasse que Valérie reparte en prison vu ce qu’elle a déjà payé, déclare Jean. Je ne parle pas de son année de prison [Valérie a fait un an de prison en détention provisoire avant d’être libérée jusqu’à son procès], je parle de tout ce qu’elle a vécu avant. C’est la mère qu’on devrait mettre en taule !" 

Le procès du meurtre de Danielle Polette est prévu du 21 au 25 juin 2021 devant les Assises de Saône-et-Loire. Quatre ans après sa mort, hormis l'avocate qui représente les intérêts du plus jeune des enfants du couple encore mineur, personne ne s’est porté partie civile. 

* Le prénom a été modifié 

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