"J'ai tout détruit, ma famille, mes amis" : le pompier pyromane de Simandre condamné à 7 ans de prison ferme

Après un renvoi début janvier, Nicolas M. a comparu à nouveau au tribunal de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) ce jeudi 29 février. Il a été reconnu coupable d'avoir causé des incendies dans plusieurs fermes à Simandre, un petit village de la Bresse, entre juin et novembre 2023, et condamné notamment à 7 ans d'emprisonnement.

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Comme lors de la précédente audience, la salle du tribunal de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) est comble ce 29 février. Pompiers, victimes, ou habitants de Simandre ont une nouvelle fois fait le déplacement pour assister au procès de Nicolas M., mis en cause dans l'affaire des incendies qui ont ravagé les fermes de ce petit village de la Bresse bourguignonne entre juin et novembre 2023.

20h15 : Pour Stéphane Galopin, première victime du pyromane, la condamnation est un "soulagement à la hauteur de nos espérances. Mais ce sera difficile de se reconstruire et ça va prendre du temps, car dès qu'il y a de la fumée dans le village, on craint un nouvel incendie."

20h10 : "Nous allons faire appel", précise Me Elise Andali, avocate de Nicolas M. "La peine est particulièrement lourde, le président l'a lui-même indiqué. C'est compliqué pour mon client aussi, qui se retrouve face à des gens qu'il connaît. C'est dur pour lui de s'expliquer."

20h05 : Nicolas M. est reconnu coupable de tous les chefs d'inculpation. Il est condamné à 7 ans d'emprisonnement avec maintien en détention (une peine plus grave que celle requise par l'avocat générale) ainsi qu'à une peine de suivi socio-judiciaire de 5 ans. Il est aussi condamné à une injonction de soins psychologiques et addictologiques, l'oglibation d'indemniser les victimes et de suivre une formation professionnelle. Enfin, il lui est interdit de rentrer en contact avec les victimes et de se rendre sur les communes de Simandre et Baudrières. "La peine est lourde, parce qu'on reconnaît chez vous une dangerosité", justifie le président du tribunal.

19h15 : L'audience est suspendue. Les juges se sont retirés pour délibérer.

J'ai tout détruit, ma famille, mes amis...

Nicolas M.

19h00 : Les plaidoiries sont terminées. Nicolas M. prend une dernière fois la parole, les larmes aux yeux. "Encore aujourd'hui je n'ai pas les réponses. J'ai tout détruit, ma famille, mes amis... j'ai perdu tout ça aussi. Je pense que mes excuses, beaucoup n'en veulent pas. C'est tout à fait normal qu'on m'en veuille. Et aussi le SDIS, ça faisait 20 ans que j'étais parmi eux. La trahison, c'est la pire chose que j'ai faite. Je voulais m'excuser aussi envers eux. Auprès de ma fille aussi, qui subit tout ça alors qu'elle n'a rien demandé."

18h50 : Me Élise Andali, l'avocate de du prévenu, demande la relaxe partielle de Nicolas M. dans le cadre du 8e incendie, celui qu'il n'a pas reconnu. "Je trouve les réquisitions du ministère public particulièrement sévères. Monsieur M. a bien compris qu'il fallait faire quelque chose, il a eu une véritable prise de conscience. Les faits sont graves et personne ne le conteste, mais derrière ces faits il y a un homme. Il faut le prendre en compte."

18h40 : La procureur de la République, Aline Saenz-Cobo, requiert une peine de 6 ans d'emprisonnement avec maintien en détention, obligation d'indemniser, interdiction de rencontrer les victimes, interdiction d'exercer la profession de sapeur pompier et interdiction de se présenter à Simandre et Baudrières. "Une peine lourde commandée par la gravité des faits, la détresse des parties civiles, l'importance des dégâts, les questionnements qui demeurent et les risques de recidive", justifie la magistrate.

18h15 : "C'est rapide de ruiner des vies", assène la procureur de la République, Aline Saenz-Cobo, en référence aux dires du prévenu que "allumer un feu est facile". "Monsieur M. s'attaque à tout le monde, à ses connaissances et même à sa sœur ou son beau-frère. C'est une véritable psychose qui s'est répandue par sa faute."

"Cette psychose, elle est du fait d'une seule personne : monsieur M."

Aline Saenz-Cobo

procureur de la République

"Il y a 2 incendies au cours desquels des maisons jouxtent les fermes, poursuit la procureur. Monsieur M. le voit. Il a beau dire qu'il ne voulait blesser personne, c'est un sapeur pompier volontaire depuis 20 ans qui sait pertinemment que le feu peut se propager. Pour lui, les autres, c'est un dommage collatéral.

17h50 : Nicolas M. est également soupçonné d'avoir incendié une ferme le 24 octobre dernier. Contrairement aux autres faits, il n'a pas reconnu cet incendie, prétextant une tentative de suicide comme alibi. Inentendable pour Me Thomas Ronfard, l'avocat de la famille sinistrée : "pour toutes les victimes, c'est un bout de vie, un bout de l'héritage familial, qui est parti en fumée. Quelque chose qu'on espérait peut-être laisser aux enfants après soi. Malgré toutes les indemnisations possibles, rien ne remplacera jamais ça."

17h30 : Après une courte suspension de séance, les avocats des parties civiles débutent leurs plaidoiries. Tour à tour, ils mettent à mal les maigres explications du prévenu. "Monsieur M. dit très opportunément avoir commencé à boire en juin 2023, au moment du premier incendie. Puis il explique aux gendarmes pouvoir arrêter de boire pendant deux ou trois semaines avant de reprendre. Ce n'est pas un comportement d'addiction, ça ne tient pas."

Tout au long des plaidoiries, Nicolas M. reste prostré dans le box des accusés, le regard tourné vers ses pieds.

17h05 : Le colonel Frédéric Pigneau, du SDIS 71, évoque à la barre le sentiment de "trahison" vécu par ses collègues et lui. Il précise également que la somme due par le SDIS a Nicolas M. pour ses interventions en tant que pompier volontaire sur les incendies de Simandre est de... 650 euros. Pour rappel, le prévenu, lourdement endetté, avait déclaré intervenir sur les incendies en question notamment pour l'argent.

16h35 : Les témoignages des victimes se succèdent à la barre. L'émotion est vive alors que les agriculteurs évoquent la douleur psychologique causée par les incendies. 

"Il a été le premier pompier à arriver chez moi lors de l'incendie. Je me demande comment on peut mettre le feu chez quelqu'un et une demi heure après, nous regarder dans les yeux et nous demander comment ça s'est produit ?", demande Thibaut Cordier, l'un des agriculteurs sinistrés.

"Je m'étais rendu compte qu'il n'avait plus rien, et je ne voulais pas le laisser sur le bord de la route sans rien", affirme Nicolas M. au président. Dans le public, on entend quelques murmures d'indignation.

16h00 : Pendant une longue heure et demie, le tribunal s'attarde sur les faits, et particulièrement sur l'incendie du 26 septembre, qui aurait pu tourner au drame : c'est à cette date que les flamme se sont propagées à une habitation jouxtant une ferme incendiée. "Ça aurait pu être dramatique", admet le prévenu. "Pourquoi avez-vous continué, alors ?", questionne le président. "Je ne sais pas. Je ne sais pas", répète Nicolas M.

Le premier agriculteur victime, qui s'est constitué partie civile, demande à prendre la parole devant le tribunal. "Après les faits, il est venu me prêter main forte pour la récolte, a pris les devants pour retrouver du matériel... je ne comprends pas, j'aimerais bien comprendre !", s'interroge Stéphane Galopin. Dans son box, le prévenu se refuse à regarder la victime.

14h00 : "Je cherche toujours le pourquoi du comment", déclare d'emblée le prévenu, après avoir assisté, penaud, au rappel des faits par le président. "J'ai certaines réponses, que beaucoup de gens attendent, mais pas toutes les réponses."

Par rapport aux actes que j'ai commis, je suis toujours dans le flou total. Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ce que j'ai fait.

Nicolas M.,

prévenu dans l'affaire des incendies en série à Simandre

Un prévenu à la situation familiale difficile

Avant de prononcer le renvoi de l'audience le 8 janvier dernier, le président avait apporté quelques précisions sur les situations familiale, financière et psychologique du prévenu. Après avoir perdu ses parents en 2009 et 2015, il se sépare de son épouse en 2016. Il se voit contraint de verser une pension alimentaire pour sa fille. Lourdement endetté, il doit également vendre sa maison et monter un dossier de surendettement auprès de sa banque.

Une expertise médicale réalisée lors de sa détention a exclu l'hypothèse d'une altération du discernement chez Nicolas M. Elle a toutefois reconnu l'existence d'une "pathologie de pyromanie et d'alcool."

Incendies en série pendant l'été et l'automne 2023

Le premier incendie s'est produit au début de l'été dernier, le 30 juin 2023. On ne soupçonne alors pas encore l'œuvre d'un pyromane. "Quand mon frère et mon neveu sont arrivés sur les lieux de l'incendie avant moi, ils se sont dit : bon, ben c'est le tracteur qui a pris feu, quoi", déclarait à France 3 Bourgogne Stéphane Galopin, l'agriculteur touché.

Sauf que de nouveaux incendies vont avoir lieu tout au long de l'été jusqu'au début de l'automne. Un deuxième se déclare sur une exploitation voisine le 30 juillet, puis le 5 août. Fin septembre, dans la nuit du 26 au 27, un autre exploitant voit sa ferme touchée par un incendie. Petit à petit, la psychose s'empare du village.

En octobre, deux incendies ont lieu : l'un dans la nuit du 7 au 8, l'autre dans celle du 24 au 25. Puis à nouveau en novembre, entre le 8 et le 9. Ce sera finalement le dernier : le 11 novembre, le pyromane est arrêté par la compagnie de gendarmerie de Louhans, après près de quatre mois d'enquête. Âgé d'une trentaine d'années et pompier volontaire, il reconnaît immédiatement les faits.

► À LIRE AUSSI - Fermes incendiées à Simandre : planques nocturnes, lunettes thermiques... Comment les gendarmes ont arrêté le pyromane

Un épilogue au goût amer pour les habitants de Simandre : l'incendiaire présumé est bien connu dans le village, lui-même et une partie de sa famille y résidant. "La famille est brisée", déplorait un riverain au lendemain de l'arrestation. "Par rapport aux voisins, ils n'auront plus de communication. C'est embêtant." Si la série noire n'a fait aucune victime, elle a engendré, pour les exploitants touchés, des centaines de milliers d'euros de dégâts.

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