Damien Meslot, maire Les Républicains de Belfort (Territoire de Belfort), accuse le Rassemblement national de démarcher des adhérents LR à l'aide d'un fichier informatique dérobé illégalement, juste avant les élections législatives 2024. Alors que le RN nie en bloc, Les Républicains ont saisi la CNIL et envisagent de porter plainte.
Rififi dans le petit monde politique du Territoire de Belfort. À l'approche des élections législatives anticipées (30 juin-7 juillet), le maire de Belfort Damien Meslot (Les Républicains), suppléant de Ian Boucard, candidat LR dans la 1e circonscription du département, accuse le Rassemblement national de "démarchage illégal" auprès des adhérents Républicains.
"On est face à des méthodes de voyou" s'est insurgé Damien Meslot, contacté par France 3 Franche-Comté. "Un de nos adhérents nous a dit avoir été appelé par une femme en début de semaine dernière, qui se présentait comme une militante de Guillaume Bigot [candidat RN dans la 2e circonscription du Territoire de Belfort]".
"Cette femme m'a invité à une réunion de Guillaume Bigot"
Ludvic Frossard, directeur de cabinet du maire belfortain, raconte : "on m'a appelé lundi, vers 18h48" témoigne-t-il. "C'était une femme, avec une voix plutôt jeune, m'a invité à une réunion de Guillaume Bigot".
Surpris, je lui ai demandé si elle était au courant de mes responsabilités chez Les Républicains. Elle m'a répondu "oui, c'est même pour ça que nous vous appelons, pour le rassemblement des droites".
Ludvic Frossard,directeur de cabinet du maire de Belfort
Après avoir décliné la proposition, Ludvic Frossard se demande alors "comment cette femme s'est-elle procurée mon numéro ?" "J'ai d'abord pensé à une fuite au niveau national, mais ça me paraissait un peu gros" se souvient le trentenaire. "Ce n'est qu'après, en voyant que je n'étais pas le seul à avoir été contacté, que j'ai été vraiment agacé".
En effet, selon Damien Meslot, maire de Belfort, ce sont environ cinq militants, toutes membres LR du département, qui ont été démarchées par la même personne. "Ce n'est pas un hasard" reprend Damien Meslot. "Ils présentent tous le même profil : des jeunes adhérents LR, présents avec nous depuis au moins deux ans. C'est du débauchage".
Pour les LR : "un fichier a été volé"
L'élu LR en est persuadé : un fichier de contact a fuité. "Aucun de nos nouveaux adhérents, ceux qui nous ont rejoints il y a moins de deux ans, n'ont été appelés" reprend-il. "Bizarrement, tous nos militants contactés étaient répertoriés dans un fichier créé pour les dernières législatives, en 2022. Il nous a été volé" estime l'élu.
Nous avons consulté la Commission nationale de l'informatique et des libertés, pour faire la lumière sur toute la légalité de ce démarchage.
Damien Meslot,maire (LR) de Belfort
"Nous sommes clairement dans un cas d'utilisation de données sans l'accord des personnes concernées" avance Ludvic Frossard. "La CNIL m'a fait savoir que je pouvais demander au numéro qui m'a démarché où elle avait trouvé mon contact. S'il n'y a pas de réponse d'ici à un mois, nous pouvons déposer un recours".
À l'heure où nous écrivons ces lignes, le directeur de cabinet du maire de Belfort nous assure que malgré sa demande, sa démarcheuse ne lui a pas répondu. La section locale des Républicains commence donc à constituer un dossier sur ce fait, et ne s'interdit pas de porter plainte après les élections législatives.
"Nous menons notre enquête, nous recoupons les informations et les législatives passées, nous contacterons toutes les personnes inscrites sur ce fichier pour voir combien ont réellement été démarchées" conclut Damien Meslot. "C'est quelque chose d'illégal, d'inadmissible et de pénalement répréhensible".
Après les appels téléphoniques, des mails reçus
Selon nos informations, de nombreux adhérents des Républicains auraient également reçu par mail un courriel envoyé par l'adresse contact@rassemblementdesdroites.com, intitulé "Pour faire triompher la droite, donnons-nous les moyens". Celui-ci renvoie sur une page web contenant une cagnotte pour aider financièrement "la campagne des Républicains à droite".
Du côté du Rassemblement national et de Guillaume Bigot, nommément cité, selon Ludvic Brossard, par la démarcheuse téléphonique, on nie en bloc. "J'ai appris l'existence de ce fichier en même temps que vous, les journalistes" nous a répondu le candidat RN de la 2e circonscription du Territoire de Belfort.
Les bras m'en tombent. Ce sont des basses manœuvres des Républicains, qui sont sûrement très agacés par l'éclatement de leur parti.
Guillaume Bigot,candidat RN de la 2e circonscription du Territoire de Belfort
Pour Guillaume Bigot, le RN est victime "d'un procès en sorcellerie". "Il y a des contacts avec des militants LR, je ne m'en cache pas" reprend l'éditorialiste de CNews. "Mais cela se fait par le bouche-à-oreille, ou car on a des jeunes républicains qui viennent à nos réunions. Mais il n'y a pas eu de vol de fichier informatique, c'est n'importe quoi".
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Guillaume Bigot l'affirme. Si jamais Les Républicains portent plainte à ce sujet, "nous porterons plainte pour diffamation. On nous désigne comme les boucs émissaires, avec des fausses allégations qui viennent troubler l'élection, pour influencer les votants".