Ligne Sncf Belfort-Delle : le tribunal administratif de Besançon annule la déclaration d'utilité publique

Alors que les trains circulent de nouveau sur la ligne Belfort-Delle depuis décembre 2018, le tribunal administratif de Besançon annule la déclaration d’utilité publique du projet de réouverture de cette ligne. Toute la question est de savoir si cette liaison est rentable. 

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Dans son communiqué, le tribunal précise que  l’arrêté du 22 juillet 2015 par lequel le préfet du Territoire de Belfort avait déclaré d’utilité publique le projet est annulé. Les arrêtés du préfet en date des 26 août 2015 et 11 mai 2017 déclarant cessibles plusieurs terrains privés situés sur le territoire de la commune de Danjoutin sont également annulés."

Cette ligne Belfort-Delle était restée fermée depuis 1992 et après trois années de travaux, elle a été de nouveau mise en service en décembre dernier. A l'époque, notre confrère précisait que 16 allers et retours sont désormais prévus entre la Suisse et la France. Cette liaison est pratique pour les Suisses qui veulent rejoindre la gare TGV de Meroux.

La décision du tribunal administratif n'implique pas une destruction des travaux entrepris dans le cadre de cette déclaration d'utilité publique. Si cette annulation avait été prise avant les travaux, elle aurait impliqué l'arrêt du chantier. Mais comme aujourd'hui, c'est devenu un ouvrage public, il n'est pas soumis à destruction selon des décisions qui font jurisprudence. Il n'est pas question non plus de modifier le montant des indemnités versés pour les terrains qui ont du être cédés à RFF. En fait, cette décision pose la question de la rentabilité de cette liaison et son utilité.

Pour Michel Neugnot, premier vice-président du conseil régional de Bourgogne Franche-Comté, le temps de la justice n'est pas celui des transports. L'objectif de la collectivité est de parvenir à 1600 voyageurs par jour en 2022. L'élu rappelle qu'il est trop tôt pour évaluer le bon fonctionnement d'une ligne remise en service en décembre. Michel Neugnot donne rendez-vous à la rentrée de septembre pour une évaluation de la ligne. Une campagne de communication va être lancée à la même période pour développer l'usage de cette liason ferraviaire. 

Plus de 110 millions d'euros pour cette liaison franco-suisse 


Des travaux décidés par la France et la Suisse. D'après le tribunal, "le coût total du projet s’élevait à 110,5 millions d’euros. Son financement était prévu par une seconde convention conclue, en août 2014, par la République française, la Confédération suisse, le canton du Jura, la région FrancheComté, le département du Territoire de Belfort, la communauté d’agglomération belfortaine, la communauté de communes du Sud Territoire et RFF (devenu SNCF Réseau)".

Mais lors de l'enquête publique, des voix s'élèvent contre ce projet. L'association de défense de la Grande Combe refusait les travaux de la nouvelle halte ferroviaire de Danjoutin et l'ancien président MRC du département du Territoire-de-Belfort, Christian Proust, dénonçait un manque de transparence de la part des services de l'Etat. D'où leurs requêtes devant le Tribunal administratif de Besançon. Les juges viennent de leur donner raison dans son jugement du 2 juillet. 

Geneviève Signe, la présidente de l'association de défense de la Grande Combe, est "très contente du résultat". Pour elle, cette ligne n'a de sens que si elle est directe pour déservir la gare TGV. 
Quant à Christian Proust, il précise que même si cela ne changera rien dans l'immédiat, cette décision de justice peut servir de base dans d'autres dossiers et qu'à l'avenir "les préfets fassent sérieusement leur travail". L'homme politique reproche aux différents préfets du Territoire-de-Belfort, d'avoir "trahi leurs engagements. Ils n'ont pas fait en sorte de transmettre les infos nécessaires aux élus et aux citoyens" lors de l'enquête publique. 

200 voyageurs par jour au lieu de 3700


Pour Christian Proust, il s'agit d'une "escroquerie. 200 voyageurs empruntent chaque jour cette ligne qui a coûté 110 millions alors que les études en annonçaient 3700 !"

Un déséquilibre économique souligné par le tribunal administratif de Besançon. Pour établie son jugement du 2 juillet, le tribunal a examiné la légalité de l’arrêté de déclaration d’utilité publique au regard de la jurisprudence classique du Conseil d’Etat, selon laquelle « une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, éventuellement, les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ». 

Si le tribunal reconnaît l"'intérêt public" de la ligne mais le coût financier est excessif : 

Toutefois, le tribunal considère que la rentabilité socio-économique de l’investissement en cause est intimement liée aux perspectives de fréquentation de la ligne. Celles-ci dépendent du nombre de voyageurs potentiels, présents et à venir, dans l’aire géographique concernée et de la capacité de la nouvelle offre ferroviaire à capter ces voyageurs. A cet égard, si SNCF Réseau prévoyait une fréquentation de la ligne de 3 700 voyageurs par jour en tenant compte d’un cadencement des trains à la demi-heure en heures de pointe et à l’heure en heures creuses, dans chaque sens de circulation, le tribunal estime que la faisabilité d’un cadencement à la demi-heure en heures de pointe est très faible compte tenu du déficit d’exploitation particulièrement élevé qu’il impliquerait. Il juge également que les prévisions de fréquentation concernant les scolaires, les travailleurs de l’aire urbaine du sud du Territoire de Belfort, les travailleurs frontaliers et les usagers du TGV, pourtant déterminantes pour l’utilité et la rentabilité du projet, apparaissent largement surévaluées et, à tout le moins, entachées de très grande incertitudes. Dans ces conditions, le tribunal estime que les inconvénients du projet (en particulier son coût financier et les atteintes à la propriété privée qu’il implique) l’emportent, dans les circonstances de l’espèce, sur ses avantages dans des conditions de nature à lui faire perdre son caractère d’utilité publique.


D'où l'annulation de la déclaration d’utilité publique du 22 juillet 2015 jugée illégale ainsi que les deux arrêtés rendant cessibles les terrains visés par l’expropriation. Cette décision ne devrait pas boulverser du jour au lendemain le fonctionnement de la ligne mais c'est embarrassant pour la préfecture du Territoire-de-Belfort et les partisans politiques de cette desserte. 

Contactée, la préfecture du Territoire-de-Belfort, précise qu'elle attend l'analyse juridique du ministère de l'Intérieur pour réagir à cette annulation. En tout cas, l'Etat et RFF peuvent faire appel de cette décision auprès de la cour administrative d'Appel de Nancy.  Une procédure qui peut durer deux ans.  
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