Richard Delgenes, l'avocat qui murmure à l'oreille de Monique Olivier : "Il faut savoir l'interroger"

Alors que le procès de Monique Olivier touche à sa fin, son avocat, Richard Delegenes, est revenu sur le difficile interrogatoire de sa cliente, "fatiguée" et "manipulable".

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

► MISE À JOUR 19/12 13h : ajout des dernières déclarations de Richard Delgenes en fin d'article.

Au-delà de l'horreur des faits, c'est peut-être le sentiment d'avoir laissé échapper la vérité qui restera du procès de Monique Olivier. L'ex-femme de Michel Fourniret est jugée depuis le 28 novembre pour complicité dans le meurtre et l'enlèvement de Marie-Angèle Domèce (1988), Joanna Parrish (1990) et Estelle Mouzin (2003).

Ce lundi 18 décembre, les avocats généraux ont requis la perpétuité contre l'accusée de 75 ans. Le procès touche désormais à sa fin. Après trois semaines de débats chaotiques, il ne reste plus qu'à l'avocat de Monique Olivier et à Monique Olivier elle-même de prendre la parole, avant que le jury ne se retire pour délibérer. L'ultime occasion d'entendre la "femme de l'ogre". Avant cette dernière ligne droite, son avocat, maître Richard Delgenes s'est confié à la presse en fin de journée, jeudi 14 décembre.

"500 heures d'audition, et on voudrait tout refaire en quelques heures ?"

Ce jeudi, Monique Olivier a été interrogée de 9 heures 30 à 19 heures sur Estelle Mouzin et les circonstances de son décès. À la fin de la séance, Richard Delgenes, questionné sur les difficultés de Monique Olivier à répondre aux questions, explique à la presse que sa cliente est "fatiguée" par les longues heures de débats. "C'est compliqué. Ma cliente a été entendue pendant 4 ans, 500 heures d'audition avec la juge d'instruction, tous les enquêteurs de la SR [section de recherches] de Dijon, pour arriver à l'endroit où était le corps [d'Estelle Mouzin], qu'on n'a pas retrouvé d'ailleurs. Et aujourd'hui, en quelques heures, on voudrait tout refaire ?"

L'avocat de Monique Olivier revient sur une expression employée par la juge d'instruction Sabine Kheris, expliquant qu'on "montait par l'escalier" pour atteindre la vérité. "Eh bien, on est redescendu tout en bas", regrette maître Delgenes ce 14 décembre. 

"À la fin, ma cliente est fatiguée, je pense qu'elle ne sait même plus son prénom et qu'elle n'arrive même plus à savoir si ses aveux sont des aveux."

Richard Delgenes

avocat de Monique Olivier

"Il faut faire attention : les gens, dans un box, au bout de 8 heures, 10 heures, 12 heures d'audition, les mêmes questions par des personnes avec "vous avez dit ça", "mais alors vous ne nous dites pas la vérité", "vous ne nous aidez pas".... À force, trop de questions, ça étouffe." 

"Après trois semaines de procès dans le box, n'importe qui serait un peu paumé, c'est normal", défend maître Delgenes, rappelant aussi l'âge de Monique Olivier (75 ans). 

Monique Olivier, "on peut lui faire dire tout et n'importe quoi"

Il faut noter que ces trois semaines d'audience ont été marquées, notamment, par l'attitude du président de la cour d'assises, Didier Safar, qui semble faire l'unanimité contre lui. "Pour rater un interrogatoire aux assises, il faut être deux. Monique Olivier et Didier Safar s’y sont employés conjointement", assène Le Monde. De fait, jeudi, le président a d'abord monologué pendant sept longues minutes avant de poser sa première question à Monique Olivier. 

Durant cet interrogatoire, maître Delgenes échangeait régulièrement avec sa cliente, à voix basse, lui enjoignant de se "lâcher" et de dire ce qu'elle savait. Mais les questions, insistantes et parfois agressives du président, n'ont fait que braquer l'accusée. Richard Delgenes le répète : il y a des manières de faire parler Monique Olivier. "Il faut que ça vienne d'elle. Du moment que ça vient d'elle, vous pouvez avoir des choses qui sont vraies. À partir du moment où vous l'incitez, si vous êtes directif dans les questions, c'est son caractère : ou bien elle s'enferme ou bien elle va dans votre sens, et vous avez des contre-résultats. Elle est manipulable et on peut arriver à lui faire dire tout et n'importe quoi."

L'avocat revient sur cet interrogatoire par moments entaché de fausses informations. "[La cour] reproche à Monique Olivier "Vous ne nous avez pas dit où est le corps", alors qu'elle l'a dit puisqu'on a fait des fouilles ! Et elle répond quelque chose d'aussi faux que la question en disant "Je ne sais pas où est le corps", alors qu'elle le sait puisqu'elle a dit où il était."

"On a une question absurde, une réponse tout aussi absurde, et on tourne dessus en boucle pendant 3 heures."

Richard Delgenes

avocat de Monique Olivier

Interrogé par une journaliste sur les souvenirs de Monique Olivier dans la maison de Ville-sur-Lume (l'ancienne demeure des Fourniret, où des fouilles ont été menées dans le cadre de l'enquête Estelle Mouzin), Richard Delgenes répond : "Je pense qu'elle a réussi à rentrer dans cette maison à un moment du procès, qu'elle a revisualisé un certain nombre de choses, mais qu'à force de lui poser des questions, on l'a fait sortir de ses souvenirs."

"On oublie même de faire avouer Monique Olivier"

Richard Delgenes rappelle une nouvelle fois qu'il a fallu 500 heures d'audition, avec la juge et les enquêteurs, pour "trouver un modus operandi permettant d'avoir, au vu de la personnalité de ma cliente, des aveux réels et sincères". 

Monique Olivier, il faut savoir l'interroger. Ça paraît simple mais c'est compliqué, en fait. (...)

Richard Delgenes

avocat de Monique Olivier

Selon maître Delgenes, ces débats embrouillés en ont même fait oublier "que l'objet de ce procès, c'est de confirmer les aveux" de Monique Olivier. "On met des zones d'ombre en avant et on en oublie les réalités et les vérités qui ont été avouées. On oublie même de faire avouer Monique Olivier, au final !"

"Elle m'a demandé ce qu'elle devait dire"

"On a eu des moments quand même, quand l'assesseure a posé des questions en laissant parler Monique Olivier", rappellait maître Delgenes jeudi. Ce lundi après-midi, il a plaidé en faveur de sa cliente. Puis, c'est elle qui a eu le dernier mot, ce mardi matin : "Je demande pardon", "tout en sachant que c'est impardonnable tout ce que j'ai fait", "je regrette tout ce que j'ai fait", a-t-elle simplement déclaré. "Ces derniers mots ne pouvaient pas être autre chose que tout ce qu'elle a montré pendant ces trois semaines de procès", analayse Richard Delgenes, qui ne s'attendait pas à ce qu'elle se lance "dans une longue diatribe".

"Elle parle par des mots simples, sujet-verbe-complément, elle exprime des regrets, qu'on veut ou pas entendre."

Richard Delgenes

avocat de Monique Olivier

"Elle m'a demandé ce qu'elle devait dire et comment elle devait le dire", ajoute l'avocat de Monique Olivier. "Je lui ai dit "dites tout ce que vous avez envie de dire"". Le verdict est attendu ce mardi 19 décembre, dans l'après-midi.

► Avec Audrey Champigny

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information