"Elle ne sait jamais si elle pourra venir en cours le lendemain", une collégienne "presque déscolarisée", faute d'un transport adapté

Une collégienne de 13 ans a manqué 45 demi-journées de sa classe ULIS depuis que le département des Côtes d'Armor a mis fin au transport dont elle bénéficiait. Saisi par les parents, le juge des référés a réfuté le caractère urgent, sachant que la Région cherche une solution.

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La jeune fille est en effet âgée de 13 ans est censée être scolarisée en classe de 5e au collège Louis-Guilloux de Plémet dans le cadre d'une Unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS). Mais depuis la rentrée, elle a déjà été absente "quarante-cinq demi-journées", selon le rectorat : le 1er juillet 2024, le Département a mis fin au transport adapté dont elle bénéficiait.

Transports en commun

Il s’était prévalu d’un avis de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) pour qui l'adolescente "ne souffre pas d'un handicap faisant obstacle à ce qu'elle prenne les transports en commun". "Le bilan GEVA-Sco [Guide d'évaluation des besoins de compensation en matière de scolarisation, ndlr] ne fait mention que de difficultés d'apprentissage, mais pas en termes de relations (...) sociales (...) ou en termes de participation aux activités et sorties scolaires", justifiait la collectivité présidée par Christian Coails (PS).

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Les parents de la jeune fille avaient donc saisi la justice administrative dans le cadre d’un référé-liberté, une procédure d’extrême urgence destinée à censurer les décisions administratives qui portent une "atteinte grave et manifestement illégale" à une "liberté fondamentale" consacrée par la Constitution, comme ici le "droit à l'instruction" de l’adolescente. Ils voulaient ainsi contraindre le Département à remédier à la situation sous astreinte de 500 € par jour de retard.

Elle ne sait jamais si elle pourra venir en cours le lendemain

Me Stéphane Baron

"Le règlement (...) dispose que lorsqu'un enfant n'est pas reconnu apte à prendre les transports en commun et que ses parents ne peuvent utiliser leur véhicule personnel, le département met en place un transport adapté collectif", rappelait leur avocat, Me Stéphane Baron. Or ses clients n’ont "jamais eu connaissance" de l’avis de la MDPH des Côtes-d'Armor. Leur fille est de fait "presque déscolarisée" puisque son père "travaille de nuit" et que sa mère est "en situation de handicap et n'a pas le permis de conduire".

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"Aucune ligne de transport en commun n'assure les trajets de Laurenan à Plémet", insistait-il auprès de la juge des référés du tribunal administratif de Rennes. "Même si cette ligne existait, leur fille ne serait pas en mesure de faire les trajets. Elle ne peut que ponctuellement se rendre au collège, ce qui affecte son état de santé, sa motivation, ses apprentissages et leur continuité : elle ne peut investir detravaux sur plusieurs jours avec ses camarades, ne sachant jamais d'un jour sur l'autre si elle pourra venir en cours" a plaidé Me Baron.

Un taxi scolaire mutualisé

"Ma fille souffre d'angoisses majeures, qui font obstacle à ce qu'elle soit seule dans un environnement qu'elle ne connaît pas sans un adulte de référence", avait expliqué sa mère lors de l'audience au tribunal administratif de Rennes. "Le taxi scolaire qui assure le transport de mon fils vers le collège de Loudéac pourrait être mutualisé : il transite nécessairement par Plémet." Le grand frère de la jeune fille est en effet scolarisé en 3e SEGPA [Section d’enseignement général et professionnel adapté] au collège des Livaudières.

Me Clément Guillou, l’avocat du Département des Côtes-d'Armor, avait lui rappelé que la collégienne "participe sans difficulté aux sorties scolaires" du collège Louis-Guilloux et avait rejeté la responsabilité sur la région Bretagne. "La Région refuse au motif qu'elle n'est pas scolarisée dans son collège de secteur mais cela n'est pas possible puisque son collège de secteur ne comprend pas de dispositif ULIS", soulignait l’avocat du Département. Et les parents de la jeune fille ne jugent "pas envisageable" le fait de la scolariser en "milieu ordinaire".

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Le droit à l’éducation est garanti à chacun

L’académie de Rennes, de son côté, avait indiqué "ne pas prendre position" dans ce contentieux mais avait simplement fait remarquer que les "quarante-cinq demi-journées d'absence" de l'élève depuis la rentrée de septembre 2024 "affectent significativement ses apprentissages".

Pour sa part, la région Bretagne avait affirmé le 3 décembre 2024 qu’elle n’avait pas connaissance de demandes déposées par la famille mais qu’elle s’était rapprochée du Département, de la MDPH et du rectorat pour que le taxi scolaire soit mutualisé. Elle leur avait pourtant initialement répondu par la négative le 5 novembre 2024, selon la mère.

"Le droit à l'éducation est garanti à chacun", commence donc par rappeler la juge des référés du tribunal administratif de Rennes, en citant les dispositions du code de l’éducation, dans une ordonnance en date du 4 décembre 2024 qui vient d’être rendue publique. "Tout enfant a droit à une formation scolaire qui, complétant l'action de sa famille, concourt à son éducation. Pour favoriser l'égalité des chances, des dispositions appropriées rendent possible l'accès de chacun (...) aux différents types ou niveaux de formation."

Pas d'urgence d'un référé

"La privation pour un enfant (...) de la possibilité de bénéficier d'une scolarisation (...) est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (...) sous réserve qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention d'une mesure (...) dans les quarante-huit heures", détaille la juge. Or, dans ce dossier, les parents "ne peuvent (...) assurer eux-mêmes ces trajets et (...) la région Bretagne (...) a opposé un refus". "S'il est constant que cette absence de prise en charge (...) porte (...) une atteinte significative à son droit à la scolarisation (...), la région Bretagne a admis, en cours d'instance, (...) rechercher une solution", retient malgré tout la juge. "Compte tenu des diligences, mêmes tardives, accomplies par la région Bretagne, la condition particulière tenant à l'urgence ne peut être regardée comme satisfaite."

CB/GF (PressPepper)

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