HANDICAP. "Il est plus facile de trouver une barrette de Hasch qu'une AESH pour un myopathe", un clip de rap pour dénoncer le manque d'accompagnants scolaires

Deux Rennais, révoltés par le manque récurrent d'Accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), ont voulu dénoncer cette situation dans un clip de rap rageur tourné dans un quartier de la ville. Ils espèrent que leur cri de colère sera plus facilement entendable sous cette forme.

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"Chaque année, chaque rentrée

C'est le même couplet

Trop de gamins dans le noir complet

Les bus scolaires démarrent.

Mais des mères, la colère s'emparent

Trop d'handicapés laissés sur le trottoir

AESH faut que tu saches

C'est pas des mots que je mach-

Erai pour parler de notre taf

Et je serai cash.

Si tu nous vois pas au fond de la classe

C'est que ce métier est en disgrâce.

Il est plus facile de trouver une barrette

De Hasch à 5 heures du mat

Qu'une AESH pour un myopathe"

Ces textes forts sont de Clément Moutiez, un Rennais de 40 ans. Des paroles qu'il a écrites et qu'il interprète dans un clip de rap qu'il a tourné avec Emmanuel Massou, un réalisateur de 52 ans. Les deux compères ne sont pas dans le milieu du rap, mais ont choisi ce mode d'expression pour évoquer une thématique qui leur tient à cœur et aux tripes : le manque d'AESH (Accompagnant d'élèves en situation de handicap) dans les écoles primaires. 

Au résultat, un clip en noir et blanc, "Mise au ban d'École", tourné dans un quartier en construction de Rennes. Un fond musical de rap pour évoquer les enfants en situation de handicap qui "restent sur le trottoir", faute d'AESH.

Dans mon quartier, je connais pas moins de 15 enfants porteurs de handicap mental et qui s'ennuient chez eux car ils n'ont pas accès à l'école.

Clément Moutiez

auteur et interprètre de "Mise au ban d'Ecole"

Si la thématique du manque crucial d'AESH est au centre de leur morceau musical, c'est bien parce que les deux auteurs du clip sont confrontés dans leur vie au handicap : "Moi, je suis le grand frère d'une petite sœur handicapée qui a pu suivre sa scolarité et qui travaille maintenant dans un ESAT [Établissement et service d'accompagnement par le travail, NDLR]. Mon fils de 4 ans a une petite fille trisomique dans sa classe. De plus, en tant qu'ancien journaliste, j'ai traité maintes fois ce problème de manque d'AESH dans des articles. Emmanuel, lui, le handicap et tout ce qui va avec, il le connaît bien aussi, avec toutes les difficultés au quotidien car son frère jumeau est handicapé" explique Clément Moutiez. 

Et de rajouter que dans son quartier près de la plaine de Baud à Rennes, où a été tourné le clip vidéo, il connaît "pas moins de 15 enfants porteurs d'un handicap mental qui s'ennuient chez eux" car ne pouvant aller à l'école faute d'accompagnateur scolaire. Selon lui, dans ces situations, "l'école est un droit fondamental qui n'est pas respecté".

En mars dernier, lors d'une action commune d'une dizaine d'écoles de l'agglomération rennaise, des parents d'élèves soulignaient unanimement le rôle indispensable des AESH pour leurs enfants en situation de handicap. Ils avançaient le chiffre de 600 postes non pourvus en Ille-et-Vilaine pour que chaque enfant puisse se rendre à l'école.

À LIRE : Manque d’AESH : “Cela met en péril les enseignants et tous les enfants d’une même classe” les parents d’élèves se mobilisent en Ille-et-Vilaine

"Un cri de colère" car "rien ne change"

Et c'est bien parce que les actions se sont multipliées ces dernières années pour dénoncer ce manque crucial d'AESH et que malheureusement, "rien ne change" selon Clément Moutiez, que les deux amis ont voulu lancer un cri d'alarme et de colère.

À LIRE AUSSI : Faute d'accompagnants pour leurs enfants en situation de handicap, des parents recrutent sur Leboncoin

Clément Moutiez nous explique que le message sur la pénurie d'AESH, il veut avant tout "le faire passer aux personnes décisionnaires", ce "que j'ai déjà fait quand j'étais journaliste" ajoute-t-il. Mais il veut aussi "le faire passer auprès des couples qui ne savent pas ce que sait que d'avoir un enfant privé d'école". Et pour cela, il a pensé que de le faire sous la forme d'un rap permettrait de "toucher plus de monde" qu'un "n-ième écrit", d'où ce clip réalisé en 48 heures. 

L'intérêt des punchlines

L'interprète de "Mise au ban d'École", amoureux des mots et de l'écriture, explique que le rap permet d'exprimer sa colère grâce à des formules punchlines. Des textes qui peuvent ainsi trouver un public et le sensibiliser à la problématique.

Dans son clip, Clément Moutiez évoque aussi l'une des raisons pour laquelle l'Éducation nationale peine depuis des années à recruter suffisamment d'AESH. Il dénonce la précarité de ce métier, pas suffisamment reconnu par l'institution, et qui ne permet pas aux volontaires de se faire un salaire décent, les AESH touchant dans leur grande majorité un salaire bien inférieur au SMIC, car ne pouvant travailler à temps complet.

"Notre taf c’est pas Pomme de reinette
Et pomme d’Api d’api dépit gris
Comme l’horizon, pas de solution
Depuis des décennies
Plus de vocation
Trop de galère
Trop de crédit maison
Salaire de misère
Qui veut encore faire ce boulot
La vocation ça remplit pas le frigo".

Pour les deux auteurs de ce clip, les combats sociaux à dénoncer sont nombreux. D'où l'idée d'une "chaîne" dénommée "La vie dans tous ses fracas" et dont le premier opus est "Mise au ban d'École".

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