Alors que le Salon de l'agriculture 2024 arrive dans sa dernière ligne droite, Thomas Grigis part à la conquête de Paris. Microbrasseur depuis six ans, installé dans l'Aube, il va présenter sa bière artisanale tout au long du dernier week-end du salon. Une manière pour lui de se faire connaître et de faire la démonstration que la côte des Bar n'est pas que celle du champagne.
Devant le hangar, le camion est prêt à partir pour Paris, direction la porte de Versailles. C’est là-bas que Thomas Grigis va passer la fin de semaine. Visiteur dans sa jeunesse (pas si lointaine), il va participer à son premier Salon International de l’Agriculture comme exposant. Dans sa remorque, 300 litres de bières en fûts, tout un panel représentatif de la production de sa microbrasserie auboise.
Même s’il écoule sa bière dans son département, il reconnaît "que s'il y a deux, trois professionnels parisiens qui passent, c'est toujours bon à prendre". À Paris, les visiteurs du SIA pourront goûter ses breuvages sur le stand du Conseil départemental de l’Aube. Et le jeune entrepreneur a bien conscience qu’il ne sera pas le seul à proposer ses bières artisanales dans les allées du salon. "La France est le pays, après les États-Unis, où il a le plus de microbrasseries par nombre d’habitants", précise Thomas Grigis, "il y en a 2500".
La bière, j’y suis venu un peu par hasard.
Thomas Grigis
Installé à Fouchères, dans l’Aube, commune d’un peu plus de 500 âmes traversée par la Seine, en plein cœur d’une côte des Bar surtout réputée pour ses vins de champagne, Thomas Grigis s’est lancé dans la production de bière il y a un peu plus de six ans. Auparavant, il était régisseur lumière. Mais, un jour, une envie d’ailleurs : "tu adores ce que tu fais, c'est le moment de partir". Sa véritable passion, c’est faire à manger. Au départ, il envisage l’ouverture d’un restaurant sur l’exploitation familiale pour mettre en avant des produits locaux. Une idée vite abandonnée. "La bière, j’y suis venu un peu par hasard en visitant deux, trois brasseries où je me suis dit mais c'est ça que je veux faire", admet-il. Le voilà parti pour trois jours de formation à l’Institut Français des Boissons de la Brasserie et de la Malterie de Nancy suivi par huit mois de stage chez un brasseur de l’Aisne.
Aujourd’hui, Thomas Grigis produit, avec sa sœur, 430 hectolitres de bière par an. La Roof, c’est le nom de la microbrasserie (une référence aux rouflaquettes de son créateur) se décline en blanches, blondes, ambrées ou noires (Stout). On l’a dit, il aime cuisiner, sa bière il la voit "comme un plat liquide", il cherche l’équilibre parfait. "Quand je vais utiliser du thym ou de la sauge, il faut que ça apporte un plus à la bière mais il ne faut pas que ça sente le thym ou la sauge". Tout un art.
Six ans après, il n’est pas peu fier de cette collection tout en reconnaissant que le soutien familial a été essentiel dans sa reconversion professionnelle. "Le gros luxe, c’est qu’il y avait déjà une ferme ici, donc je ne pars pas de rien", explique-t-il, "je ne suis pas sûr qu’en partant de zéro, j'aurais monté une microbrasserie dans un hangar à la campagne".
Malgré tout, il a fallu, à l’époque, investir 60 000 euros et faire de la "récup" pour lancer la brasserie. L’ambition de Thomas Grigis aujourd’hui, c’est de faire grandir sa petite entreprise, d’une part pour être en phase avec sa conception du métier et, d’autre part, pour gonfler un peu les revenus du duo. "Je me verse à peine un SMIC et ma sœur l’équivalent d’un mi-temps". Il n’est pas question d’augmenter les prix, "chez nous, la bouteille la moins chère est à 2,20 euros, à ce tarif on a deux ou trois bières industriels". Alors il faut augmenter la marge en réduisant les coûts de production. Et ça passe par l’acquisition d’une malterie.
L’opération est en cours et devrait permettre de se passer d’un intermédiaire dès la récolte d’orge de 2025. "On sera alors dans une démarche vraiment paysanne", se réjouit Thomas Grigis. Plus besoin d’envoyer la récolte familiale vers le centre de la France, "ça devrait réduire le prix du malt de moitié". Quant à cette philosophie "du champ au verre", comme il la décrit, nul doute qu’elle devrait trouver écho dans les allées du Salon de l’agriculture.