Au cœur du quartier de Cronenbourg, la boulangerie Olland tire la sonnette d'alarme face à la flambée des prix de l'énergie. Nicolas, le propriétaire essaye d'adapter sa méthode de travail pour faire baisser ses coûts de production.
À deux pas de l'arrêt de tram Saint-Florent, la boulangerie Olland reste un incontournable du quartier de Cronenbourg à Strasbourg. La clientèle, toujours au rendez-vous, ne suffit pas à rassurer Nicolas Olland qui craint de devoir fermer boutique à cause de la flambée des prix de l'énergie. Avec un four, des réfrigérateurs et une enseigne ouverte six jours sur sept, ses prochaines factures risquent, en effet, de devenir plus que salées.
Boulanger de père en fils depuis 1935, le propriétaire actuel ne sait plus comment faire face à l'explosion de ses charges : "Le prix du beurre a doublé, celui des œufs a plus que triplé. La charcuterie a augmenté de 20% sur un an, les produits laitiers aussi", déplore-t-il. Des hausses provoquées en partie par la guerre en Ukraine.
Mais les hausses ne se limitent pas qu'aux produits alimentaires. Les prix de l'énergie ont augmenté et pèsent déjà dans le portefeuille de Nicolas : "J'ai récemment rencontré le commercial d'Électricité de Strasbourg et mes charges énergétiques vont passer de 3.000 euros à 7.000 euros en novembre 2022 et même à 9.000 euros en décembre", s'inquiète-t-il, "Pour être honnête, on ne s'attendait pas du tout à de telles factures".
Le contrat au tarif réglementé de la boulangerie avec le fournisseur d'électricité ÉS n'a pas été renouvelé, selon le gérant. Ils bénéficient désormais d'un tarif variable, qui serait moins économique. "Nous n'avons pas été prévenu en amont par l'entreprise et c'est désormais trop tard pour négocier", explique-t-il.
Une réorganisation pour limiter les coûts
Face à ces hausses, le boulanger met déjà la main à la pâte pour tenter de limiter la casse : "Depuis un mois, nous n'allumons plus notre façade, ni le logo de l'enseigne malgré nos horaires". En effet, Nicolas ouvre sa boutique de 4h du matin à 19h. "C'est déjà ça de pris, mais on sait que ça ne fera pas drastiquement baisser nos factures", ajoute-t-il.
Il imagine alors d'autres solutions : "En journée, on essaye de cuire nos pains avec un seul étage du four au lieu de quatre en temps normal", indique Nicolas, "On ne peut pas faire autrement. Je ne vais pas faire comme mon père qui cuisait tout le pain à 9h. C'est une perte de qualité après".
Avec les tarifs moindres en heures creuses, le propriétaire va tenter de maximiser sa production entre 22h et 6h : "Nos bredeles seront désormais faits le soir et nous allons essayer de faire cuire un maximum de choses durant ces horaires". Les réfrigérateurs, très énergivores, sont également éteints le week-end pour limiter les dégâts.
On a l'impression d'avoir le couteau sous la gorge
Nicolas Olland, propriétaire de la boulangerie Olland à Cronenbourg
Mais ces solutions ne viendront jamais compenser la totalité des pertes pour l'entreprise : "Entre les coûts des matières premières, les prix de l'électricité, les primes de Noël que nous verserons en décembre et le paiement à l'Urssaf en janvier, on a l'impression d'avoir le couteau sous la gorge", constate Nicolas.
Un bouclier tarifaire attendu
Pour faire face économiquement, la boulangerie n'a eu d'autre choix que d'augmenter le prix de la baguette en début d'année : "Le prix s'élève déjà à 1,15 euro aujourd'hui, mais si la hausse des factures se poursuit, nous serons obligés de l'augmenter encore de 5 centimes", affirme le boulanger qui espère que cela n'aura pas lieu pour ne pas pénaliser ses clients.
Alors que les meuniers de la boulangerie ont annoncé une augmentation de 15% des tarifs de la farine, Nicolas Olland appelle le gouvernement à l'aide : "Aujourd'hui, on n'a pas d'autres choix que de payer ce qui nous est demandé. Mais j'aimerais que le gouvernement mette en place un bouclier tarifaire similaire à celui annoncé pour les particuliers". Le gérant aimerait aussi pouvoir augmenter les salaires de ses employés qui subissent l'inflation, mais c'est pour l'instant "infaisable" au vu de la situation.
Alors qu'il craint de ne plus pouvoir se verser lui-même de salaire, le boulanger ne devrait pas célébrer le nouvel an 2023 avec des grandes coupes de champagne. En effet, les prix de l'énergie pourraient encore augmenter l'an prochain, selon EDF. Pour l'instant, Nicolas n'a pas connaissance des tarifs précis mais craint d'y laisser des plumes.