À l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, ce vendredi 8 mars 2024, trois femmes lorraines, âgées de 20 à 66 ans, nous expliquent leur parcours et leur engagement en faveur de l’IVG. La France est le premier pays à inscrire l’interruption volontaire de grossesse dans sa Constitution.
La France est devenue lundi 4 mars 2024 le premier pays au monde à inscrire explicitement dans sa Constitution l'interruption volontaire de grossesse. À l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars 2024, trois femmes lorraines témoignent à ce sujet. Elles sont âgées de 20 à 66 ans et sont fermement engagées pour le droit à l’IVG.
Françoise Derman, 66 ans, gynécologue-obstétricien
Françoise Derman est gynécologue-obstétricien depuis plus de 30 ans au centre de santé sexuelle de Nancy et au centre d’IVG de la maternité du CHRU de Nancy, où un millier d'interruptions volontaires de grossesse est enregistré chaque année. “Dans le monde, une femme meurt toutes les neuf minutes des suites d'un avortement clandestin. On assiste à de nombreux retours en arrière à l’étranger, c’est pourquoi nous devons rester très vigilants, même en France. L'IVG est une question essentielle pour le droit des femmes”, insiste celle qui défend l'IVG depuis plusieurs décennies.
À la maternité de Nancy, nous recevons des patientes qui ont essuyé plusieurs refus d’accès à l’IVG avant d’arriver chez nous
Dr Françoise Derman, gynécologue-obstétricien
Pour ce médecin, l’inscription de l’IVG dans la Constitution est un progrès mais ne garantit pas pour autant un accès facile à l'interruption volontaire de grossesse : “À la maternité de Nancy, nous recevons des patientes qui ont essuyé plusieurs refus d’accès à l’IVG avant d’arriver chez nous. Dans certains territoires, la situation est compliquée et certains hôpitaux n’ont pas le personnel suffisant pour répondre aux besoins. Il est important de généraliser cet accès à l'IVG, notamment en formant les sages-femmes à la pratique de l’IVG instrumentale”.
Évangéline Neveu, 20 ans, étudiante et militante féministe
Évangéline est membre de l’association féministe Noustoutes54 depuis un an. À 20 ans, elle suit une formation en métiers du livre et du patrimoine à Nancy (Meurthe-et-Moselle) pour devenir libraire. “J’ai été formée au féminisme sur les réseaux sociaux, comme beaucoup de personnes de ma génération. J’ai aussi beaucoup lu à ce sujet, des ouvrages de Titiou Lecoq, Rose Lamy, Jennifer Padjemi, ou les bandes dessinées de Pénélope Bagieu, par exemple”, détaille la jeune femme.
Ça a été inscrit dans la Constitution comme une liberté et non comme un droit
Évangéline Neveu, étudiante et militante féministe
L’étudiante se réjouit de l’inscription de l’IVG dans la Constitution tout en émettant des réserves : “Ça a été inscrit dans la Constitution comme une liberté et non comme un droit. Cette subtilité de langage n’est pas anodine. L’État ne s’engage pas à mettre en place les moyens nécessaires pour garantir l’accès effectif à l’IVG. Une centaine de centres IVG a fermé en France ces quinze dernières années. C’est une belle victoire mais le combat n’est pas fini. Au travail, comme dans la vie, les inégalités et les violences perdurent”.
Servane Diaferia-Azevedo Reyes, 49 ans, militante féministe
Servane Diaferia-Azevedo Reyes est la fondatrice du collectif féministe intersectionnel et inclusif La Grenade, à Metz (Moselle). Cette mère de quatre enfants de 49 ans est militante activiste depuis trois ans. “Je ne supporte pas les injustices et les discriminations. J’ai vécu moi-même de nombreuses violences psychologiques et physiques, je suis une survivante. À présent, je veux donner de mon temps pour faire bouger les choses”, confie la Messine.
Il faut de vrais moyens maintenant, l’accès à l'IVG est toujours un problème en France
Servane Diaferia-Azevedo Reyes, militante féministe
La militante se félicite de l’inscription de l’IVG dans la Constitution mais fait aussi part de ses craintes : “L’inscription de l’IVG dans la Constitution est un symbole très fort mais ça ne la rend pas intouchable pour autant, très loin de là. Il faut de vrais moyens maintenant, l’accès à l'IVG est toujours un problème en France, notamment dans certains territoires. Il y aura toujours la clause de conscience pour les médecins, des inégalités et des disparités d’accès à l’IVG pour les plus précaires. Nous devons rester très vigilantes et se battre pour ce droit en France et partout dans le monde”.
Selon les derniers chiffres de la DREES, 234 300 interruptions volontaires de grossesse ont été enregistrées en France en 2022.