Face à la recrudescence des agressions d'élus et quelque dix jours après la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (Loire-Atlantique), le gouvernement a lancé une cellule spécialisée, un "centre d’analyse et de lutte contre les violences faites aux élus". Une annonce qui résonne jusque dans notre région.
Plus de 2000 élus auraient été agressés en 2022, selon le ministère de l’Intérieur. Et les petites communes ne semblent pas épargnées. Maire (SE-DVD) de Bazincourt-sur-Epte (Eure), Hervé Glezgo a été violemment agressé à deux reprises. Il raconte.
Découvrez le sujet de C. Bonté-Baratciart et V. Arnould :
"Je ne vais pas jeter l'éponge comme ça"
A 37 ans, Hervé Glezgo administre la commune, 774 habitants, depuis 2020. En février 2021, il est frappé par trois jeunes hommes alors qu'il tente de stopper un rodéo urbain. En juin 2022, il est percuté de plein fouet par un 4x4, alors qu'il intervient pour défendre son voisin.
Le premier agresseur a été condamné à deux mois de prison avec sursis. Le deuxième, à sept mois fermes, "aménagés sous bracelet". "On est très loin de la peine maximale encourue. Pourtant, ce n'était pas une infraction minime", dénonce l'élu.
Mon agresseur, ce jour-là, j’étais la 5e et dernière victime qu’il a faite, avec arme. Il faut vraiment travailler sur le fond.
Hervé Glezgo
Pour autant, Hervé Glezgo n'a jamais souhaité démissionner. Et a reçu, en réponse à ces agressions, un grand soutien de ses administrés. "Je leur dois quelque-chose. Je ne vais pas jeter l'éponge comme ça", souligne-t-il. "Sur le patrimoine, la culture, on a énormément de projets à mener. On essaie de revitaliser notre village. Donc ce ne sont pas un ou deux énervés qui vont me faire jeter l'éponge."
"La pire des choses, c’est l’impunité"
Pour contrer les violences faites aux maires, le gouvernement a proposé d'alourdir les peines : jusqu'à 7 ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende, mais aussi de mieux former les administrés. Si l'édile affirme que ces agressions n'ont pas entamé sa vocation, il estime que les mesures proposées par le gouvernement sont insuffisantes et inadaptées. "Je ne pense pas que la solution proposée, former les élus par des référents du GIGN, soit une solution", assure-t-il.
"Il faut sanctionner beaucoup plus", estime, lui aussi, Christophe Bouillon, maire de Barentin et président de l’association des Petites Villes de France, invité du JT 19/20 Normandie ce jeudi 18 mai. "C'est une condition pour dissuader celles et ceux qui seraient tentés de s'en prendre aux élus. La pire des choses, c’est l’impunité."
Vous connaissez la célèbre formule : on dit des maires qu’ils sont à portée de baffe. Malheureusement ce n’est plus une formule aujourd’hui.
Christophe Bouillon
"Aujourd'hui, la peur est du côté des élus. En moins d'un an, il y a eu 30% d'agressions en plus", rappelle également Christophe Bouillon. "Il y a des démissions en nombre, souvent le résultat de ces agressions. Dès le premier signe avant-coureur, il faut qu’un élu se dise 'on m’écoute, on m’entend, on me comprend, on me soutient'. Ensuite, il faut que les sanctions annoncées soient mises en application."
Visionnez l'entretien avec Christophe Bouillon, invité du 19/20 Normandie du 18 mai 2023 :