Bordeaux : un flashmob pour défendre les commerces et métiers « non essentiels »

Ils ont été plus de 300 à participer à une opération destinée à marquer les esprits. Les représentants de petits commerces, indépendants et intermittents se sont réunis place de la Comédie pour alerter sur leur situation économique

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Ils étaient vêtus de noir pour imiter l’événement organisé place du Capitole à Toulouse au début du mois. La couleur du deuil afin d'alerter sur la mort de leurs commerces. Derrière ces silhouettes sombres, des commerçants, propriétaires de bars, restaurants ou boîtes de nuit, mais aussi ceux qu’on appelle les « invisibles ». Ils n’ont pas de boutique aux stores fermés car ils sont danseurs, chanteurs, ou metteurs en scène.


Chaque secteur d’activité a été cité au micro, entraînant la chute au sol des commerçants concernés. Les intermittents ont clos le flashmob sur ces quelques notes de guitare qui auront rythmé l'ensemble de la manifestation. Elise Martimort est l’une des organisatrices de cette flashmob. "C’était super, il y a eu une grosse mobilisation", se rejouit-t-elle. Selon la jeune femme, plus de 300 personnes ont participé à ce flashmob longuement applaudi par le public.

Une délégation reçue à la préfecture ce matin

Le matin même, une délégation a été reçue en préfecture. Qu’en est-il ressorti ? "Ce matin ? Bah, voilà voilà… ", répond Elise Martimort désabusée. Pas de grandes avancées donc. "On a eu le droit à un état des lieux de l’évolution du Covid19 en France pendant vingt bonnes minutes sur l’heure qui nous était attribuée. Ce n’est pas le sujet, on n’est pas débiles, on sait ce qui se passe". Certains messages auraient néanmoins réussi à passer, "notamment sur les  intermittents qui vont perdre leurs droits". Les représentants du monde du mariage, eux, n’ont pas eu le temps de s’exprimer.

Déjà la crise des gilets jaunes...

Elise Martimort en fait partie. Elle tient une boutique de conception de robes de mariée dans le quartier Saint-Paul. Elle reçoit toute l’année sur rendez-vous. Il suffisait d'ajouter, selon elle, les gestes barrière et les règles d’hygiène pour être dans les clous. 

Pourquoi nous interdire d’ouvrir, quand c’était ouvert à Auchan ?

Elise Martimort

"Nous, par exemple, nous n’avons pas été éligibles au volet 1, cela s’est joué à seulement 1000 euros de  bénéfice près. Du coup, à cette période là, nous n’avons pas été éligibles à toutes les autres aides. On a en revanche été éligible au volet 2 en septembre, mais on attend toujours les sous. Et en octobre, ils ont comparé nos chiffres à ceux d’octobre 2019, et on est à 47% en moins sachant qu’en octobre 2019 où on était en pleine crise gilets jaunes. Donc on compare un chiffre catastrophique à un autre chiffre catstrophique. Résultat, on n’a pas eu le droit aux aides car il faut être sur des pertes de minimum 50% du chiffre d’affaires". Elise Martimort espère que le chef de l'Etat tiendra compte d'une donnée essentielle : le temps qu'il faudra à beaucoup de Français pour relancer leur activité une fois le déconfinement relancé. "L'activité ne reprendra pas aussitôt", alerte-t-elle.

On va mettre plus d'un an à s'en remettre.

Elise Martimort

Commerce ouvert mais... désert

Preuve que la situation est complexe, certains sont là, en observateurs solidaires mais sans participer au flashmob pour autant. C’est le cas de Marie-Line Cailleau. A la tête d’une mercerie dans le centre-ville de Bordeaux, elle fait partie des commerçants qui ont eu l’autorisation d’ouvrir. «Reconnue comme un commerce essentiel, sa boutique a pu ouvrir ses portes et accueillir sa clientèle. Comment explique-t-elle cette autorisation ? « C’est surement dû au lobbying venant de gros groupes notamment de tissu du secteur qui, lors premier confinement, avaient appuyé sur l’urgence à fabriquer des masques ». Seulement aujourd’hui, sa boutique est loin de faire le plein.

Etre ouvert dans un cœur de ville désert… comment on fait ?

Marie-Line Cailleau

"On a essayé de faire de la communication, on fait des livraison à vélo, du drive, les gens peuvent venir donc mais comment attire une clientèle à qui on demande de se confiner. On a une grosse perte de chiffre et on n’a pas le droit aux aides mis à part 1500 euros du Fondsde solidarité si on perd au moins 50% du chiffre d’affaires. Et 1500 euros c’est rien".

"Soyons solidaires"

"Depuis mars je n’ai pas de vie", poursuit Marie-Line Cailleau,  "C’est boulot, encore boulot, redoubler d’efforts, on est nombreux dans ce cas-là, soyons solidaires. J’ai reçu des insultes de la part de passants étonnés de me voir ouvert, on vit une drôle d’époque. Les gens sont agressifs car il y a une forme d’incompréhension". Après avoir hésité, Marie-Line a tout de même choisi de se rendre au flashmob, "par solidarité". En revanche, elle ne va pas y participer. Car contrairement à d'autres, son commerce a été reconnu comme "essentiel". Un brin de diplomatie pour éviter la fracture.

La colère des commerçants bordelais, au bord de la crise de nerf >



 
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