La température moyenne de l'Hexagone pourrait augmenter de 3,8 degrés en 2100, selon une étude de plusieurs chercheurs du Centre National de Recherches Météorologiques à Toulouse. Le réchauffement sera encore plus fort en été, où les vagues de chaleurs, les épisodes de sécheresse et les incendies devraient être de plus en plus intenses et fréquents.
Année après année, le thermomètre n'en finit pas de monter. Et ce n'est que le début. Dans les prochaines décennies, le pays devrait même se réchauffer plus vite que ne le pensaient les scientifiques. Le réchauffement climatique, principalement dû aux activités humaines, devrait être pire que prévu en France, selon une étude publiée dans la revue Earth System Dynamics (en anglais).
En France, d'ici à 2100, la température moyenne pourrait augmenter de 3,8 degrés par rapport au début du XXᵉ siècle, dans un scénario d'émissions de gaz à effet de serre "modéré", le plus probable. "C'est-à-dire, un scénario dans lequel l'humanité fait des efforts pour limiter les émissions, mais peine à les faire baisser", précise Aurélien Ribes, auteur principal de l'étude et climatologue au Centre National de Recherches Météorologiques (CNRM) à Toulouse.
Pour obtenir ces résultats, les chercheurs ont appliqué une nouvelle méthode, également utilisée dans le dernier rapport du Giec. Elle consiste à combiner les prévisions générées par des modélisations, avec les données régionales observées ces dernières années. Et les températures sont jusqu'à 50% plus chaudes que ce que prévoyaient les précédentes études, pour des scénarios comparables. "C'était une surprise, mais on reste dans la fourchette d'incertitude des précédentes recherches, on est juste dans le haut de la fourchette", tient à préciser Aurélien Ribes.
Si les températures devraient en moyenne augmenter de 3,8 degrés, le phénomène est beaucoup plus marqué en été, où la France devrait se réchauffer de 5,1 degrés, contre 3,2 en hiver.
Dans un scénario plus pessimiste, les températures pourraient même augmenter de 7,5 degrés en été.
Après un été 2022 brûlant dans toute la France et en particulier en Aquitaine, cette étude est de mauvais augure pour la région. Avec les incendies de Landiras et de la Test-de-Buch notamment, la Gironde est le département français le plus touché par les feux de forêts cette année.
Et ce n'est qu'un début. La région tout entière, et ses nombreuses forêts, sont particulièrement vulnérables face au réchauffement climatique.
"L'année 2022 nous a déjà montré le florilège de ce qui peut s'annoncer et la vulnérabilité de notre région", prévient Didier Swingedouw, climatologue et membre d'AcclimaTerra, le Comité Scientifique Régional sur le Changement Climatique en Nouvelle-Aquitaine.
L'été 2022 va devenir la norme, ce qui veut dire qu'on aura des étés pires.
Didier Swingedouw, climatologue et membre d'AcclimaTerraà France 3 Aquitaine
Cette étude vient encore aggraver les prévisions, puisque chaque degré de plus enclenche des événements climatiques plus extrêmes et plus fréquents.
"L'Aquitaine est une région du sud, c'est donc déjà une région plus chaude, prévient Didier Swingedouw. Les secteurs méditerranéens sont en première ligne du changement climatique et pour les climatologues, Bordeaux n'est pas loin de la Méditerranée."
L'augmentation des températures, les vagues de chaleurs, le manque de précipitations entraînent la sécheresse et favorise les incendies. Avec des conséquences dramatiques sur la faune et la flore. Mais aussi sur la santé des habitants.
Les vagues de chaleur sont très pénibles pour les organismes, sans parler des fumées de feux que les Girondins ont respiré cet été. On s'attend déjà à une surmortalité qui n'est pas encore estimée, mais qui va sûrement être liée à ces vagues de chaleur.
Didier Swingedouw, climatologue et membre d'AcclimaTerraà France 3 Aquitaine rédaction web
Conséquence du réchauffement climatique, l'Aquitaine, région agricole par excellence, pourrait bien devoir renoncer à certaines cultures.
"Le niveau de température à lui seul conditionne la qualité, voire la possibilité de certaines cultures, ainsi que les rendements", explique Antoine Ribes.
Un réchauffement climatique plus rapide que prévu pourrait encore aggraver la situation, pour les habitants, et pour l'économie.
Si ces prévisions ne laissent pas présager un avenir radieux, elles sont nécessaires pour anticiper les effets du réchauffement climatique, et tenter de s'adapter.
Il faut essayer de se préparer à la possibilité d'un changement climatique plus important que ce qu'on avait imaginé avant.
Antoine Ribes, climatologue au CNRMà France 3 Aquitaine rédaction web
En France, la politique d'adaptation n'en est qu'à ses débuts. Mais avec une telle accélération, elle pourrait très vite montrer ses limites.
Le secteur du vin réfléchit à des solutions pour adapter les plants à la sécheresse : tailler plus courts pour éviter que les feuilles n'absorbent l'eau, faire pousser de l'herbe pour favoriser l'humidité... "Mais ces solutions restent des sparadraps, juge Didier Swingedouw. Au bout d'un moment, certains plants ne seront plus adaptés à ce climat."
Malgré ces impacts catastrophiques, Didier Swingedouw voit aussi le potentiel de l'Aquitaine. "C'est une région dans laquelle il y a peu d'éoliennes par exemple, on pourrait contribuer à la production d'énergie renouvelable, ce qui est également créateur d'emploi", affirme le climatologue.
Les projections, anticipées par l'étude d'Antoine Ribes, dépendront fortement des actions en faveur d'une réduction des émissions de CO2. Tout n'est donc pas perdu.